Édition internationale

Phnom Penh dit adieu à son aéroport de Pochentong

Après 66 ans d’histoire, l’aéroport de Pochentong fermera le 9 septembre 2025 pour céder la place au nouvel aéroport international Techo.

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Photo: Mom Sovithyea
Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 6 septembre 2025, mis à jour le 17 septembre 2025

Après près de sept décennies au service du pays comme principale porte d’entrée internationale, l’aéroport international de Phnom Penh – premier et plus ancien aéroport du Cambodge – s’apprête à tirer sa révérence, laissant place à une infrastructure plus grande et plus moderne.

Le nouvel aéroport international Techo – situé au sud de la capitale, à environ 20 kilomètres du centre-ville – commencera ses opérations le 9 septembre 2025, marquant le début d’une nouvelle ère du transport aérien que le gouvernement espère voir stimuler le développement et le tourisme.

Un rôle clé depuis les années 1950

« Si l’on remonte à l’époque où l’aéroport international de Pochentong fonctionnait durant la période du Sangkum Reastr Niyum, il a joué un rôle crucial dans la croissance du Cambodge, en particulier à la fin des années 1950 et au début des années 1960, en contribuant aux infrastructures du pays », explique Keo Duong, enseignant en histoire à l’Université Royale de Phnom Penh.

Inauguré en 1959, l’aéroport international de Phnom Penh – connu localement sous le nom de Pochentong – a traversé de nombreuses épreuves depuis l’indépendance du pays six ans plus tôt. Il a accueilli des dirigeants de renom, comme le président français Charles de Gaulle en 1966, suivi du Premier ministre singapourien Lee Kuan Yew en 1967.

Seav Sapphire, retraité, se souvient encore de l’effervescence lorsqu’il avait rejoint des milliers de Cambodgiens pour accueillir le président français aux portes de l’aéroport.

« J’avais 19 ans. Ce fut une journée inoubliable pour moi — la ville entière était en liesse. Le général Charles de Gaulle a été accueilli avec chaleur. La scène était incroyable. Je me souviens qu’environ 200 000 personnes s’étaient massées le long de la route, de Pochentong jusqu’au Palais royal », raconte Sapphire, aujourd’hui âgé de 78 ans.

De la guerre civile à la reconstruction

Avec le déclenchement de la guerre civile en 1970, l’aéroport servit à acheminer l’aide économique et militaire américaine destinée au régime de Lon Nol, alors que les forces khmères rouges progressaient.

Après la prise de pouvoir par les Khmers rouges en avril 1975, l’aéroport fut le théâtre d’épisodes sanglants. Selon les récits historiques, des étudiants cambodgiens revenus de l’étranger, attirés par la propagande promettant de reconstruire le pays, furent arrêtés dès leur arrivée sur le tarmac et disparurent à jamais. Seuls quelques vols en provenance de pays alliés du régime continuèrent à atterrir ponctuellement.

Durant les années 1980, alors que le pays tentait de se relever malgré les sanctions occidentales, Pochentong reprit une activité limitée, accueillant principalement des compagnies du bloc soviétique, comme Aeroflot, qui transportait régulièrement des étudiants cambodgiens vers l’URSS.

L’aéroport retrouva une atmosphère de liesse et d’espoir le 14 novembre 1991, lors du retour d’exil du prince Norodom Sihanouk après la signature des Accords de Paris. Ce fut aussi le début d’une renaissance, avec l’arrivée successive des vols transportant le personnel de l’APRONUC et les soldats de la paix, puis la reprise des vols commerciaux qui reconnectèrent le Cambodge au reste du monde après des années d’isolement.

Une modernisation progressive

Conscient du potentiel du secteur aérien, le gouvernement cambodgien signa en juillet 1995 un accord avec la coentreprise franco-malaisienne Société Concessionnaire d’Aéroport (SCA), lui confiant l’exploitation et la modernisation du site.

« En 30 ans, SCA a transformé l’aéroport international de Phnom Penh, multipliant par 20 le trafic, passé de 300 000 passagers en 1995 à six millions aujourd’hui », indiquait la société dans un communiqué en juillet, à l’occasion de son 30e anniversaire de gestion.

Techo International Airport : entre espoir et nostalgie

Le sort réservé à Pochentong n’est pas encore tranché. Le Premier ministre Hun Manet a toutefois écarté toute spéculation quant à une vente du terrain.

« Il n’y a jamais eu de décision de vendre cet aéroport, et il n’y en aura pas », a-t-il déclaré le 16 mai, précisant que le site resterait propriété de l’État et qu’une décision définitive serait prise lors de l’inauguration du nouvel aéroport.

Autour de Pochentong, la vie a évolué au rythme des avions. Les infrastructures routières se sont multipliées, les commerces se sont développés, apportant opportunités et espoirs aux riverains.

« L’infrastructure dans la communauté près de l’aéroport s’est beaucoup améliorée », confie Mach, habitant du quartier depuis 1979. « Je ressens de la mélancolie à l’idée qu’il va fermer dans quelques mois. »

Pour Kosal, vendeur ambulant de 45 ans installé près de la sortie, la fermeture est synonyme d’incertitude. « Je vends des boissons et des encas ici depuis cinq ans, cela a beaucoup aidé ma famille. C’est triste de savoir que je ne pourrai plus continuer. Je vais devoir trouver un autre endroit pour gagner ma vie. »

Quant à Sim Chanchakriya, 22 ans, elle se désole à l’idée de perdre la lumière des projecteurs de l’aéroport qui illuminaient son quartier : « Je ne peux pas imaginer à quel point ma maison sera sombre quand l’aéroport cessera de fonctionner. C’est tellement triste d’y penser. »

Cet article a été produit par la promotion 23, étudiants de deuxième année du DMC, dans le cadre du cours « News Writing and Reporting », et adapté par Cambodja News.

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Publié le 6 septembre 2025, mis à jour le 17 septembre 2025
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