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Phnom Penh aux couleurs de l’arc-en-ciel pour PRIDE Fest 2025

Malgré la pluie et les obstacles, PRIDE Fest 2025 a rassemblé des milliers de Cambodgiens pour célébrer la diversité, l’amour et l’égalité des droits pour la communauté LGBTIQ+.

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Photo : Chanpor Koy, OHCHR Cambodia
Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 3 juillet 2025, mis à jour le 12 août 2025

Une fête arc-en-ciel sous la pluie à Phnom Penh

Sous une pluie battante, des milliers de personnes ont envahi les rives de Phnom Penh pour la plus grande célébration PRIDE jamais organisée au Cambodge. Si l’orage a brièvement dispersé la foule, la ferveur est rapidement revenue. Drapeaux arc-en-ciel au vent, parapluies multicolores et costumes étincelants ont illuminé la promenade, tandis que la musique résonnait.

Pour Nack Athens, fondateur et président de Pride Fest Cambodge, cet instant marquait l’aboutissement d’un combat de dix ans. « Nous ne nous cachons plus dans les bars. Nous montrons au Cambodge qui nous sommes — sans excuses », a-t-il déclaré au Bureau des droits de l'homme des Nations Unies.

Plus qu’une fête, PRIDE Fest 2025 a été un message de résilience, un appel à l’égalité et un symbole du progrès du mouvement LGBTIQ+ au Cambodge. Organisé par Pride Cambodia Organization avec le soutien du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme et d’autres agences onusiennes, le festival est devenu une vitrine essentielle pour la visibilité et les droits de la communauté LGBTIQ+ du pays.

Un événement sauvé de justesse

En 2024, PRIDE Cambodge a bien failli être annulée. À quelques semaines du Mois des fiertés, plusieurs sponsors historiques se sont désistés, invoquant un manque de rentabilité. « On était à court de temps, d’options, on ne savait pas vers qui se tourner », confie Athens, organisateur de l’événement.

En urgence, l’équipe a sollicité le bureau des droits de l’homme de l’ONU au Cambodge. Réactifs, leurs partenaires ont rapidement assuré la logistique, mobilisé des soutiens et sécurisé le festival.

« La PRIDE est bien plus qu’une fête. C’est une tribune pour la diversité et les droits humains », rappelle Benjamin Moreau, représentant adjoint de l’ONU au Cambodge. Athens insiste : au-delà du soutien matériel, l’ONU a apporté une légitimité précieuse. « Leur présence encourage d’autres à nous rejoindre », conclut-il.

Celebrating Unity, Diversity, and Joy!
© Hammad Ahmad, OHCHR Cambodia

 

PRIDE Fest : Une évolution marquante du mouvement LGBTIQ+

Pisey Ly, militante de premier plan et coordinatrice de l’organisation Rainbow Community Kampuchea (RoCK), voit dans cette évolution une preuve de la ténacité de la communauté. Fondée en 2009, son ONG a vu les célébrations de la PRIDE passer de réunions privées à des événements publics dans tout le pays, y compris en province.

« Ces événements sont essentiels pour rassembler la communauté LGBTIQ+ et ses alliés afin de célébrer ses talents, sa diversité et sa résilience, mais aussi le chemin parcouru vers l’égalité », dit-elle.

Créé en 2022 sous sa forme actuelle, PRIDE Fest a été conçu par Athens, diplômé de Phnom Penh et de l’Université de Washington, comme une plateforme valorisant le travail des ONG locales et favorisant l’inclusion à travers des événements dynamiques.

Parmi les activités emblématiques : la Rainbow Run, la Pride Remork Race, la Pride Walk, le concours local de drag Reajiny Pride, des défilés de mode et des concerts. Ces événements festifs sont aussi des outils de visibilité stratégique pour la cause. Ce qui n’était au départ qu’un investissement personnel est devenu une célébration nationale, attirant des milliers de personnes et le soutien de sponsors privés, d’ambassades et de l’ONU.

« PRIDE, c’est la présence, la joie et le fait d’être vus », résume Athens, qui se considère comme un bâtisseur de ponts.

Des progrès juridiques mais encore des lacunes

Si le Cambodge n’interdit pas explicitement les personnes LGBTIQ+, les protections juridiques restent faibles. L’article 31 de la Constitution garantit l’égalité devant la loi, sans mention explicite de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre. Cette absence laisse un vide juridique qui rend les personnes LGBTIQ+ vulnérables.

« L’acceptation progresse. Les familles, les employeurs, même des fonctionnaires nous soutiennent de plus en plus. Mais sans égalité de mariage, nos partenaires ne peuvent ni hériter ni décider pour nous à l’hôpital. Tout amour mérite d’être protégé », plaide Pisey Ly.

Lors du quatrième cycle de l’Examen périodique universel en 2024, douze recommandations concernant les droits LGBTIQ+ ont été formulées, toutes acceptées par le gouvernement cambodgien.

Des politiques publiques vont dans ce sens, comme le Plan national de prévention des violences contre les femmes qui inclut les femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres. Le ministère de l’Éducation a également intégré depuis 2017 des contenus LGBTIQ+ dans les programmes de « compétences de vie », et une stratégie contre la stigmatisation liée au VIH vise les hommes gays et bisexuels ainsi que les femmes transgenres. Toutefois, des actions concrètes restent attendues, notamment en matière de mariage pour tous.

Une visibilité croissante et un changement d’image

Grâce à PRIDE Fest et à d’autres initiatives, la perception du public évolue positivement. Malgré les discriminations persistantes, notamment en ligne, le soutien s’élargit dans tout le pays. Ly observe un soutien croissant des familles, des médias, des entreprises et des autorités.

« C’est bouleversant et réjouissant de voir à quel point les Cambodgiens ont un grand cœur et acceptent la diversité », dit-elle.

Athens constate aussi un enthousiasme inédit : des centres commerciaux et lieux publics font appel à des drag queens, un phénomène né du concours Reajiny Pride.

Même les plus hautes autorités s’impliquent. Keo Remy, président du Comité cambodgien des droits de l’homme, a salué le courage de la communauté :

« Les personnes LGBT+ sont de plus en plus visibles et fières d’aimer au grand jour, sans restriction. »

 

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