Phnom Penh critique une résolution du Parlement européen dénonçant la répression des libertés civiles, plaidant pour une évaluation plus objective et un dialogue direct sur les droits humains.
Un rejet catégorique de la résolution européenne
Le Cambodge a fermement rejeté une résolution adoptée le 28 novembre par le Parlement européen, qualifiée de « biaisée » et « trompeuse ». Cette résolution accuse le gouvernement cambodgien de restreindre les libertés civiles et demande la libération des prisonniers politiques, journalistes, militants et défenseurs des droits humains détenus pour des motifs politiques.
Le Parlement européen appelle le Cambodge à mettre fin à sa répression de la société civile, à libérer les prisonniers politiques et à cesser les harcèlements à l’encontre des activistes. Cette résolution pourrait entraîner une réévaluation de l'accès du Cambodge au régime préférentiel "Tout sauf les armes" (EBA) de l'Union européenne, qui permet aux pays les moins avancés de commercer sans droits de douane avec l'UE. Le texte appelle également à des sanctions ciblées.
En 2020, l'UE avait déjà partiellement révoqué ce tarif préférentiel pour le Cambodge en raison de violations des droits humains, ce qui a eu un impact sur les exportations clés du pays, telles que les vêtements et les chaussures. Cette nouvelle résolution s'inscrit dans une révision plus large des droits humains en Asie.
Dans une déclaration officielle publiée le 30 novembre, l'Assemblée nationale cambodgienne a critiqué la résolution, affirmant qu'elle entrave les efforts du pays pour promouvoir les droits humains et les principes démocratiques. Selon son porte-parole, cité par Cambodianess les accusations d'emprisonnement de prisonniers politiques sont infondées :
« Il n'existe aucun prisonnier politique au Cambodge. Les actions judiciaires menées respectent les lois et procédures en vigueur pour garantir l'ordre public et la responsabilisation. »
Une réponse sur les droits et la société civile
La résolution européenne demande également des réformes législatives, notamment de la loi sur les syndicats et de la loi sur les associations et les ONG, pour aligner ces textes sur les normes internationales en matière de droits humains et de travail.
L'Assemblée nationale cambodgienne a défendu le bilan du pays en matière de droits civiques, affirmant qu'il existe plus de 6 000 organisations de la société civile officiellement reconnues et près de 2 000 médias traditionnels et numériques non censurés. Elle a également mis en avant les efforts déployés pour renforcer la collaboration entre le gouvernement et les acteurs de la société civile, notamment à travers des forums consultatifs biannuels au niveau national et local.
Des critiques sur le programme Better Factories Cambodia
La résolution du Parlement européen s'appuie sur une évaluation de l’ONG CENTRAL concernant le programme Better Factories Cambodia de l'Organisation internationale du travail (OIT), qui aurait révélé des violations de la liberté d'association et des normes du travail, ainsi que des suppressions de voix indépendantes.
En réponse, le Cambodge a rappelé qu'il a été le premier pays à adopter ce programme, qui a servi de modèle à d'autres initiatives similaires dans le monde. L'Assemblée nationale a également cité le rapport le plus récent de l'OIT, soulignant que le Cambodge affiche l'un des taux de chômage les plus bas parmi les pays de niveau économique comparable.
Appel au dialogue et à la coopération
Le porte-parole de l'Assemblée nationale a invité les membres concernés du Parlement européen à visiter le pays pour dialoguer avec les différents acteurs sur les questions de droits civiques et sociaux.
Sok Eysan, porte-parole du Parti du peuple cambodgien (PPC) au pouvoir depuis plus de 45 ans, a lui aussi réagi. Il a rejeté les accusations de répression politique et de rétrécissement de l’espace civique en soulignant la souveraineté du Cambodge. « C’est l’affaire [du Parlement européen], ils peuvent penser ce qu’ils veulent. Mais ici, nous nous efforçons de renforcer notre démocratie et l’État de droit », a déclaré Sok Eysan.
Le porte-parole du PPC, cité par CamboJa news, a également affirmé qu’il n'y avait pas de prisonniers politiques au Cambodge et que le pays comptait plus de 40 partis politiques. Selon lui, les seules personnes emprisonnées sont des « politiques » ayant enfreint les lois, notamment des activistes qui auraient servi des « groupes rebelles » et des « leaders extrémistes » à l’étranger.
Pen Bona, porte-parole du gouvernement cambodgien, a refusé de commenter la résolution européenne mais a demandé à la presse cambodgienne d'aider à « présenter le Cambodge sous un jour favorable ».
Une relation à préserver avec l'Union européenne
L'Assemblée nationale cambodgienne a souligné l'importance des relations étroites et du partenariat fructueux avec l'Union européenne, basé sur des valeurs communes, une compréhension mutuelle et un respect réciproque. Elle a appelé le Parlement européen à adopter une approche équilibrée et à reconsidérer ses conclusions pour favoriser un dialogue constructif.