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Filtres de cigarette, un fléau plastique qui interroge l’ASEAN

Alors que les négociations sur le traité mondial contre la pollution plastique s’accélèrent, les pays de l’ASEAN sont poussés à agir sur un déchet encore trop ignoré : le filtre de cigarette.

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Photo : Cambodianess
Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 11 août 2025

L’ASEAN face à l’urgence plastique

Les négociations sur un traité mondial contre la pollution plastique entrent dans une phase décisive. En ce mois d’août, à Genève, les États membres s’efforcent de conclure un accord juridiquement contraignant.

Pour l’Asie du Sud-Est, fortement touchée par la pollution plastique, le moment est stratégique. L’ASEAN — qui compte plusieurs des pays les plus pollueurs en matière de plastique — peut peser dans la balance.

Depuis 2017, le Cambodge a introduit des mesures pour limiter les sacs plastiques. En 2023, il a rejoint la Global Plastic Action Partnership. Six autres pays de l’ASEAN ont aussi adopté des politiques ciblant les plastiques à usage unique.

Un plan d’action régional a été lancé en 2021, suivi d’un engagement commun en 2024 pour favoriser une économie circulaire du plastique. Mais les efforts restent dispersés, et insuffisants face à l’ampleur du défi.

Un déchet souvent oublié : le filtre de cigarette

Au cœur de cette crise, un déchet passe encore largement inaperçu : le filtre de cigarette.

Chaque année, 4 500 milliards de mégots sont jetés dans la nature. Constitués d’acétate de cellulose, ils mettent plus de dix ans à se dégrader et libèrent au passage nicotine, plomb, arsenic et microplastiques dans les sols et les eaux.

Et pourtant, ce fléau environnemental reste rarement évoqué dans les débats.

« Les filtres ne servent à rien. Ils ne protègent pas la santé et renforcent l’illusion de sécurité », rappellent plusieurs études.

Initialement conçus pour rassurer les fumeurs, les filtres sont avant tout un outil marketing.

Un coût lourd pour les pays de la région

Dans une région où le tabac reste omniprésent, les impacts du filtre sont à la fois sanitaires et économiques.

L’ASEAN dépense près de 10 milliards de dollars par an pour gérer les déchets liés aux produits du tabac. Rien que pour le Cambodge, cela représente plus de 100 millions de dollars par an, sans compter les coûts de santé liés au tabagisme.

L’industrie du tabac continue pourtant de détourner l’attention, en soutenant des campagnes de nettoyage ou en installant des cendriers, tout en promouvant activement les cigarettes filtrées.

Interdire les filtres : une piste crédible

Certaines juridictions passent à l’action. En octobre 2024, le comté de Santa Cruz (Californie) a annoncé la toute première interdiction des filtres à cigarette. D’autres régions étudient des mesures similaires.

En Europe, la Belgique et les Pays-Bas recommandent aussi leur suppression.

La Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT) plaide elle aussi pour une interdiction mondiale. Mais à ce jour, le projet de traité plastique des Nations unies ne mentionne pas le sujet.

L’ASEAN peut faire la différence

Depuis le début des négociations en 2022, presque tous les pays de l’ASEAN ont pris part aux discussions. À l’exception de l’Indonésie, tous sont membres de la CCLAT.

Ils connaissent les stratégies de l’industrie du tabac, et leurs conséquences. Le Cambodge, par exemple, dispose d’une loi antitabac complète, incluant l’emballage neutre.

Intégrer la question des filtres dans le futur traité serait une avancée majeure, pour la santé comme pour l’environnement.

« Le risque, c’est de laisser les industriels promouvoir de faux “filtres écologiques” pour maintenir leurs ventes », préviennent des observateurs.

Avec l'aimable autorisation de Cambodianess, qui nous permet d'offrir cet article à un public francophone. 

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