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Exposition “Danse comme je bouge” à Phnom Penh : Rencontre avec Romain Bernini

Retrouvez les œuvres de Romain Bernini le 9 mai 2024 à l’Institut français de Phnom Penh dans le cadre de la saison culturelle “Danse comme je bouge”. Cette exposition est un mariage de peintures, de photographies et de fragments archéologiques soulignant les gestes de la danse.

Adagp/Romain BerniniAdagp/Romain Bernini
Romain Bernini

Né en 1979, Romain Bernini est un artiste peintre et professeur à l’École des Beaux-Arts de Paris. Diplômé  en arts plastiques et en médiation culturelle de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, il se retrouve dans plusieurs collections publiques françaises notamment au centre national des arts plastiques, FRAC ile de france ou encore au musée de Chambéry. 

Pensionnaire de la Villa Médicis à Rome en 2010-2011, il a participé à de nombreuses expositions en France et à l’étranger ces dernières années. 

Plus récemment, en 2023, Romain Bernini a résidé à Siem Reap, à l’École française d’Extrême-Orient (EFEO). Fusionnant les cultures française et cambodgienne, on le retrouve à partir du 9 mai à Phnom Penh dans le cadre de la saison « Danse comme je bouge », pour une nouvelle série d’œuvres à la galerie de l’IFC. 

Romain Bernini utilise principalement la peinture à l’huile, explorant diverses thématiques telles que la société, l’espace, la mythologie ou la culture populaire. 

Ses tableaux, souvent créés en série, dévoilent un univers pictural complexe où réalité et fiction s'entremêlent. 

À travers son travail artistique, il utilise la toile comme un moyen d'exprimer ses réflexions sur l’étrangeté, l’utopie et la picturalité, mettant en avant l'usage de couleurs vives qui confèrent une dimension réaliste à ses représentations, notamment lorsqu'il explore des thèmes en lien avec la nature et les couleurs éclatantes. Ses œuvres offrent des univers où se côtoient archaïsme et contemporanéité” - Institut français du Cambodge

Le petit journal a rencontré Romain Bernini à l’occasion de cette exposition. 

 

LPJ: Avez-vous des thématiques récurrentes dans vos œuvres ? 

R.B: Dans mon travail, j’ai développé une thématique récurrente qui traverse mes œuvres depuis de nombreuses années : l'extase. J’entends l’extase comme une sortie de soi, une sorte de transe qui peut être suscitée par la musique, l'esthétique, ou d'autres formes d'expression artistique. 

Cette fascination pour l'extase m'a toujours captivé. Quand j’étais jeune, j’étais davantage attiré par des images et des danses mettant en scène cette expérience transcendante. J’avais un peu ce sentiment d’être dépossédé de moi. 

Je me suis intéressé progressivement aux arts extra-occidentaux, trouvant une force et une magie dans leur rapport à l'extase, qui semblait parfois absente dans notre approche plus cérébrale et auto-référentielle de l'art occidental contemporain. Je trouve une puissance et une générosité dans ces expressions artistiques, ce qui m'a conduit à m'intéresser davantage à ces traditions.

 

Romain Bernini
Romain Bernini,  "Danse comme je bouge" à l'Institut français du Cambodge

 

LPJ: Pourquoi le Cambodge ? Ce pays vous a-t-il permis de retrouver cette “extase”? 

R.B: En tant qu'artiste, le Cambodge m'a profondément inspiré. En découvrant sa culture riche, sa diversité et sa beauté, en arrivant j'ai ressenti comme le début d'un empire esthétique sans fin. La grâce et la douceur qui y sont mises en avant  contrastent avec d'autres formes d'art contemporain axées sur la confrontation et la violence. J’ai l’impression. que nous ne nous sommes pas toujours occupés de l’empathie chez nous. 

 

LPJ: Comment avez-vous transmis cela dans votre exposition ? 

R.B: Je ne sais pas si j’ai réussi à le transmettre mais en tout cas j'ai cherché à être le réceptacle des éléments que j'ai observés, de façon parcellaire bien évidemment. J'ai exploré comment les traditions cambodgiennes fonctionnaient, ma volonté était de penser à comment le Cambodge est confronté aujourd'hui à ces traditions, voir si elles sont encore opérantes ou simplement un peu endormies. Je voulais aussi comprendre comment les personnages, les figures contemporaines pouvaient se réapproprier ces traditions. 

Malgré la dureté de la vie parfois, j’ai relevé un grand sens de l’humour au Cambodge. J'ai donc tenté de décaler les symboles et les figures de la culture cambodgienne, tout en exprimant l'humour que j'ai observé dans la vie quotidienne au Cambodge. 

Je ne sais pas si ça fonctionne mais je sais qu'à partir du moment où on parle autrement qu'avec des mots, c’est compliqué de se faire comprendre, donc avec des images et des couleurs la chose est encore plus diffuse. Mais c'est ce qui crée un mystère parfois. 

 

Romain Bernini
Romain Bernini,  "Danse comme je bouge" à l'Institut français du Cambodge

 

LPJ: À quoi les visiteurs doivent-ils s’attendre pour cette exposition ? 

R.B: J’ai travaillé en 2023 à l’EFEO de Siem Reap, qui est depuis plus d'un siècle un acteur majeur de la restauration des monuments d'Angkor et du développement des études khmères. Valentin Rodriguez, directeur de l'institut français, a pensé que ce serait une bonne idée de nous mettre en relation.  L'exposition est ainsi le fruit de ma collaboration avec  l’EFEO..

Cette collaboration a créé un décalage avec mes habitudes, en tant normal je ne côtoie pas des archéologues et des anthropologues mais ici, j'ai pu explorer et échanger avec des chercheurs, mêlant ainsi mon regard d'artiste à leurs connaissances. En travaillant ensemble, ils ont pris le temps de me montrer un tas d’archives et de me parler de certaines traditions. 

L'exposition met en avant cette interaction. C’est un dialogue entre les images et ma propre production artistique. J'utilise différents formats et médias, de la peinture à la photographie en passant par le dessin et même des chiffons travaillés, pour exprimer la diversité et la richesse de ma vision. Je cherche à interroger les rôles de l'artiste et de l'archéologue dans la construction et la reconstruction des histoires et des cultures. 

En tant qu'artiste français exposant au Cambodge, je suis conscient des défis et des questions que cela soulève, notamment en ce qui concerne l'appropriation culturelle et le besoin de favoriser le dialogue et le partage entre les cultures. Mon souhait serait de voir émerger davantage de collaborations avec des artistes cambodgiens, afin de créer un espace où les différentes perspectives artistiques peuvent se rencontrer et s'enrichir mutuellement.

 

Photo expo Romain Bernini
Romain Bernini,  "Danse comme je bouge" à l'Institut français du Cambodge

 

LPJ: Qu'allez-vous garder de votre séjour au Cambodge ? 

R.B: Beaucoup de choses. C’est tellement pluriel: il y a tellement de grâce, de rencontres, de beauté, j’ai envie de pleurer en disant ça. Je vais essayer de garder un enseignement par rapport au monde joyeux et tragique. 

 

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Publié le 9 mai 2024, mis à jour le 9 mai 2024

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