Le Photo Phnom Penh Festival met en lumière Jean-François Spricigo et Aglaé Bory, qui explorent la nature et la jeunesse à travers des photographies évocatrices et engageantes.
JEAN-FRANCOIS SPRICIGO, France; Factory Phnom Penh
Une photographie est une vision, pas une reproduction. Ou, si elle reproduit quelque chose, c’est l’émotion d’une chose vue un instant et qu’elle a permis de capter. C’est ce que semble nous dire chaque photo de Jean-François Spricigo qui ne cesse, au quotidien comme au cours de ses voyages sur l’île de la Réunion, à Mayotte ou en Guyane, d’observer la nature. Il se questionne autant qu’il nous questionne sur la relation que nous entretenons avec elle et sur la façon dont nous la considérons et en tirons, ou non, des enseignements.
Ce fils d’un père Italien et d’une mère Belge, élevé en Belgique, formé à la photographie puis au cinéma et à l’image, s’exprime également par l’écriture, la radio et le théâtre, avec une grande liberté.
Même si certaines de ses photographies peuvent être dans des couleurs légères, il privilégie un noir et blanc à l’opposé du réalisme et que l’on pourrait qualifier de littéraire. Il ne raconte pas d’histoire mais avec ses évocations, autour entre autres des animaux, la plupart du temps élégants, pouvant également apparaître dangereux, il sait provoquer des émerveillements, nous dire avec douceur qu’il faut les regarder attentivement et respectueusement. Et attendre que l’image vienne à vous comme un cadeau qu’il partage.
Chez lui des flous, des ombres, des contrejours ne sont pas des effets mais une manière de nous toucher et de nous demander également ce que nous voyons vraiment.
Il a, entre autres distinctions, reçu en 2023 le prestigieux Prix Nadar pour son livre Nous l’horizon resterons seul.
AGLAÉ BORY, France, Factory Phnom Penh
Elle fait incontestablement partie de cette riche école documentaire française qui, depuis une vingtaine d’années, a renouvelé les propositions visuelles du genre avec une grande diversité.
Ce travail a été réalisé dans le cadre d’une commande tout à fait exceptionnelle du Ministre Français de la Culture, passée en 2022 et 2023 à 200 photo journalistes ou du domaine documentaire pour dresser leur portrait de la France après la pandémie de Covid.
L’ancienne étudiante en Histoire de l’art, qui poursuivit ensuite ses études à l’Ecole Nationale Supérieure de la photographie d’Arles, a choisi de concentrer son travail sur les pratiques artistiques de la jeunesse dans les quartiers populaires, qu’elle connait bien. Pendant le Covid, tous les lieux culturels avaient été fermés et l’après Covid a montré combien les jeunes avaient envie et besoin de retrouver la culture.
Comme toujours, Aglaé Bory a réalisé des portraits et elle a, comme à son habitude, pris le temps nécessaire pour leur donner un sens profond. Il ne s’agit pas de portraits formels mais de vraies rencontres avec des jeunes dans leur environnement. La photographe a d’abord rencontré ceux qui allaient devenir ses modèles, parlé avec eux, puis ils se sont mutuellement apprivoisés et les jeunes ont posé, seuls ou en groupe, beaucoup avec leurs instruments de musique ou en esquissant les pas de danse qui sont leur moyen d’expression.
Toutes ces images deviennent un album de famille car la photographe, très précise dans ses cadrages, qui ne sont jamais des effets qui prendraient plus d’importance que les personnages, a réussi à conserver une grande unité de lumière, douce, apaisée. Comme une renaissance où chacun se réinvente avec aussi une forme de fantaisie.