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RELIGION – De Bouddha à Jésus : le Père Vincent explique

Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 26 juillet 2011, mis à jour le 8 février 2018

Ils sont khmers et ont fait le choix de devenir catholiques. L'année dernière, 300 Cambodgiens ont reçu le baptême à l'occasion de la fête de Pâques. Prêtre à Phnom Penh depuis 2007, le Père Vincent Sénéchal nous apporte son éclairage sur la conversion

(Crédit photos : Vincent Sénéchal)

Comment certains Khmers en viennent à s'intéresser au catholicisme ?
Les gens commencent souvent à s'intéresser car il y a des catholiques parmi leur entourage, leurs voisins? J'ai visité il y a peu une communauté à 30 km au nord de Phnom Penh et trois nouvelles personnes assistaient à la rencontre. Une mère et son fils avaient par exemple été invités par leur coiffeuse qui est catholique. Mais cela ne veut pas dire qu'ils vont automatiquement se convertir [?] Je crois qu'ils sont attirés par le fait de voir les chrétiens vivre communautairement. Il y a beaucoup de temps conviviaux dans la vie chrétienne : des rencontres, des repas ensemble.
Parfois, la porte d'entrée est un désir très pragmatique de recevoir de l'aide ou d'envoyer les enfants étudier dans de grandes écoles chrétiennes, comme l'institut Saint-Paul à Angtasom ou Don Bosco à Phnom Penh.

Comment se déroule une conversion ?
Il faut compter trois années avant d'être baptisé. C'est assez long, certaines personnes abandonnent.
Avant de recevoir le baptême il faut lire les Evangiles, comprendre qui est Jésus, son message. Il faut connaitre la vie de l'Eglise, la façon de vivre des chrétiens et découvrir la manière de prier, de célébrer. On lit ensemble les textes importants comme les Dix Commandements. Cela se fait à force de rencontres régulières.

Qui sont les Khmers qui font ce choix ?


Il s'agit souvent de gens qui ne pratiquaient pas le bouddhisme. Même s'ils baignaient dans le milieu, ils avaient pris une certaine distance par rapport à la pagode. Ce sont surtout des jeunes car la période Pol Pot a rendu difficile la transmission du bouddhisme entre générations. L'année dernière, à Pâques, 300 Khmers ont été baptisés et la moyenne d'âge était de 25-30 ans.

Comment sont-ils vus par les autres Cambodgiens ?
Il existe une grande tolérance. Mais le socle de la société reste marqué par le bouddhisme et ceux qui font le choix de la conversion se placent donc hors du courant majoritaire, ils rament à contre-sens. Il y a deux critiques qui reviennent souvent. La première est de trahir la Nation, de ne plus être khmer en reniant le bouddhisme. Il y a aussi une critique liée au fait que l'on n'honorera pas les anciens, les ancêtres. Certains sont sensibles à ces critiques. Mais en général ils voient dans les Evangiles qu'elles ont existé dans tous les siècles et qu'ils sont finalement comme les chrétiens avant eux. Mais quand j'interroge les jeunes à ce propos, ils me disent que le sujet ne revient pas si souvent. Il y a une grande ouverture d'esprit dans la société cambodgienne.

L'Eglise cherche néanmoins à s'adapter à la culture locale
Oui, lors du concile Vatican 2, qui s'est tenu de 1962 à 1965, les évêques et le pape avaient décidé d'autoriser l'adaptation de la liturgie selon les pays. C'est ce qu'ont fait les évêques du Cambodge dans les années 60-70. Il est important que la personne comprenne ce qu'elle fait quand elle le fait. On n'arrive pas en terrain vierge, il faut respecter la culture.
Par exemple, au Cambodge, on utilise les bâtonnets d'encens au lieu des grains qui sont utilisés en Europe. Dans le bouddhisme, ils servent à honorer les ancêtres et nous nous en servons pour honorer Jésus Christ, donc les gens ne sont pas perdus. On fait aussi le salut mains jointes et pas de génuflexions. Dans l'église, les gens sont assis par terre sur des nattes. L'autel est de ce fait plus bas et le prêtre est assis et non debout. On utilise aussi l'orfèvrerie locale pour le calice et la patène [plat destiné à recevoir l'Ostie] [?] La Toussaint et la Fête des Morts, qu'on fête normalement les 1er et 2 novembre, coïncident avec la fête du Pchum Ben qui célèbre les morts au Cambodge. Tout cela permet aux gens qui s'intéressent au christianisme de se sentir à la fois khmers et catholiques.

Propos recueillis par Camille Lorente (www.lepetitjournal.com) mardi 26 juillet 2011

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Publié le 26 juillet 2011, mis à jour le 8 février 2018

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