Le 2 octobre, LePetitJournal.com Cambodge était invité au Raffles Hotel Le Royal pour assister au lancement et écouter un extrait de Bangsokol : A Requiem for Cambodia, une composition unique alliant musique, film, mouvement et voix. Cette réception, organisée par l’Ambassade d’Australie au Cambodge, Cambodian Living Arts et avec la présence de Phoeurng Sackona, Ministre de la Culture et des Beaux-Arts, a permis à l’assemblée de dire au revoir et bon voyage aux artistes de ce spectacle. Ceux-là même qui se préparent à monter sur la scène du Arts Centre Melbourne en Australie pour la grande première ce vendredi 13 octobre.
Bangsokol : A Requiem for Cambodia est la première œuvre symphonique majeure adressée aux années Khmers rouges. Elle symbolise également la première collaboration entre le réalisateur Rithy Panh et le compositeur Him Sophy, tous deux survivants du génocide. Neuf ans se sont écoulés entre l’idée, la conception et la préparation des valises pour la première représentation.
Cambodian Living Arts, qui a vu le jour à la fin des années 90, a été créée par Arn Chorn Pond dans le but d’assurer la renaissance culturelle du Royaume et transmettre des formes artistiques encore peu connues et menacées de disparaître après la dévastatrice période des Khmers rouges. A présent, cette organisation continue d’inspirer et de rassembler les nouvelles générations.
« L’Art est plus qu’un acte de mémoire ; c’est un acte de résistance, et de guérison » - Rithy Panh
Les membres de Cambodian Living Arts travaillent chaque jour à la création de projets artistiques à fort rayonnement culturel. À travers les arts, ils souhaitent délivrer un message au monde. « Comment commémorer le passé et honorer les deux millions d’âmes qui nous ont quittées, privées de cérémonie et de funérailles ?, s’est interrogé Prim Phloeun, directeur exécutif de Cambodian Living Arts. C’est ainsi qu’est née l’œuvre Bangkosol : A Requiem for Cambodia.
Le mot « bangsokol » décrit le linceul blanc qui couvre les morts pendant les rituels bouddhistes et le retrait de ce même linceul marquant leur transmigration vers une autre vie. « Un requiem se rapporte davantage à la culture occidentale et même à la religion catholique. Nous avons donc associé le compositeur Him Sophy à un jeune chercheur bouddhiste américain, Trent Walker, qui a passé beaucoup de temps au Cambodge à étudier les textes bouddhistes et les formes artistiques liées aux rituels et cérémonies cambodgiennes », nous explique Prim Phloeun.
Him Sophy a grandi dans une famille de musiciens cambodgiens et a poursuivi ses études au Conservatoire de musique à Moscou. Ses différentes influences lui ont permis de créer une véritable fusion musicale mêlant un orchestre traditionnel cambodgien, un orchestre de chambre occidental de musique classique et un chœur chantant les textes bouddhistes en pāli (langue des anciennes Écritures du bouddhisme méridional).
« Nous voulions donner une signification plus que musicale à Bangsokol, il fallait donc inclure des images à ce requiem. Rithy Panh, que nous avons contacté en 2013 suite à son film L’Image Manquante, a donné une toute autre dimension au concert qui est devenu un spectacle multidisciplinaire », nous raconte Prim Phloeun.
Un projet artistique fort pour une guérison sociale
Cambodian Living Arts a décidé de lancer une tournée mondiale avant même de présenter Bangsokol au Cambodge. Dans les villes hôtes de ce spectacle vit une diaspora cambodgienne importante qui, comme l’espère Prim Phloeun, assistera et participera aux représentations. Ces dernières seront accompagnées de différentes activités, organisées le temps d’une semaine, comme la diffusion de L’Image Manquante de Rithy Panh, des cérémonies dans des pagodes ou encore des panels de discussion sur le rôle des arts en termes d’après-guerre. « Cette panoplie d’événements va aider à contextualiser le spectacle », souligne Prim Phloeun. « Ce spectacle risque de faire jaillir des émotions de toutes sortes et nous voudrions qu’il y ait une interaction entre les générations, qu’elles puissent échanger et se guérir du passé », ajoute-il.
Bangsokol va être accueilli dans des lieux plus prestigieux les uns que les autres et notamment au Centre des Arts de Melbourne, à la Brooklyn Academy of Music à New York, à la Cité de la musique et à la Philharmonie de Paris et reviendra ensuite à Phnom Penh. Pour les plus impatients, il faudra tout de même attendre jusqu’en 2019 !
« Nous voulons ramener le spectacle au Cambodge pour commémorer les quarante ans de la fin des Khmers rouges, célébrer les arts et la paix. Je tiens à remercier tous ceux qui ont participé à la production de ce spectacle. Des collaborateurs à travers le monde ont appuyé nos artistes cambodgiens pour créer ce projet totalement nouveau », conclut Prim Phloeun.
Bangsokol : A Requiem for Cambodia est un acte essentiel de mémoire, de réconciliation et de paix. Cambodian Living Arts espère qu’il servira d’inspiration pour les pays qui ont connu la guerre, pour reconstruire, transmettre et innover à travers les arts, offrir un espace de guérison pour ceux qui ont souffert de violents conflits, qui ont été forcés d’immigrer et en honneur de ceux qui sont morts.
Dates et infos pratiques :
Bangsokol : A Requiem for Cambodia / Durée: 1h / Réservations des places sur le site de Bangsokol
2017 : 13-14 octobre à Melbourne, Australie - Melbourne Festival, Arts Centre Melbourne ; 15-16 décembre à New York, USA - Next Wave Festival, BAM ; 19-20 décembre à Boston, USA – ArtsEmerson.
2018 : 16 mai à Paris, France – Cité de la musique – Philharmonie de Paris.
2019 : (date encore inconnue) à Phnom Penh, Cambodge