Le mot khmer Bangsokol défini à la fois l'habit blanc placé sur un mort lors de ses funérailles ainsi que le rituel pendant lequel ce même habit est retiré. Ce mot chargé de sens a été choisi par le compositeur Him Sophy et par le réalisateur Rithy Panh pour nommer leur nouvelle oeuvre, Bangsokol : A Requiem For Cambodia. Cette collaboration entre les deux poids lourds de la culture cambodgienne est une première, elle permettra via la musique et les images de remémorer les événements tragiques du régime Khmer rouge. Le 13 juillet dernier, le Cambodian Living Arts a organisé une conférence de presse, à laquelle nous étions présents, pour expliquer le concept du requiem.
Cambodian Living Arts a commandé Bangsokol : A Requiem For Cambodia non seulement pour développer la culture cambodgienne mais aussi pour aider à la résilience des Cambodgiens envers le génocide perpétré par les khmers rouges. Pour confronter cette partie de l'histoire, la musique traditionnelle khmère sera associée à la musique classique occidentale sous la direction de Him Sophy. La musique sera accompagnée du talent visuel de Rithy Panh afin d'offrir aux spectateurs, soit un moyen de découverte pour les étrangers, soit un moyen d'accompagnement et de guérison pour les Cambodgiens.
La production est supportée par de nombreux organismes internationaux. L'Australie a tiré son épingle du jeu et a joué un rôle important dans le développement de l'?uvre à l'image du scénographe Gideon Obarzanek. Le Melbournais considère celui-ci comme une synthèse entre le monde contemporain et le monde traditionnel, créant ainsi une performance nouvelle et unique. Telle une cérémonie, Bangsokol : A Requiem For Cambodia cherche à rendre le spectateur actif, le plaçant dans le rôle de témoin de la tragédie.
« On ne peut tourner les pages d'un livre dont les pages seraient blanches »
L'oeuvre possède donc un message puissant et clairement engagé contre la guerre et pour la paix. Pour Rithy Panh, le requiem doit s'ériger en monument en souvenir des morts, dont ceux qui furent enterrés sans nom. L'art, et en particulier cette ?uvre, ne doit pas être considéré comme conservateur mais comme progressiste. Il faut donc aller de l'avant, mais pour cela, Rithy Panh pense qu'il faut au préalable écrire l'histoire du Cambodge. On ne peut tourner les pages d'un livre dont les pages seraient blanches. L'art s'inscrit ainsi comme un outil de transmission de l'histoire aux jeunes générations.
Bangsokol : A Requiem For Cambodia ne sera présentée au Cambodge qu'en 2019, soit 40 ans après la chute du régime Khmer-Rouge. Cette période d'attente est due à deux facteurs. Le premier est qu'il est autant nécessaire de panser les plaies des Cambodgiens vivant au Cambodge que celles de la diaspora cambodgienne, elle aussi affectée. Le deuxième facteur est lié aux difficultés techniques engendrées par la présence de musique classique européenne dans ce requiem. Pour palier à cela, le Cambodian Living Arts met en place des ateliers afin d'atteindre en 2019 le niveau de performance demandé par une telle mise en scène. Cette exigence technique est bénéfique pour le Cambodge et peut être vue comme un pas en direction de la formation d'un orchestre national cambodgien.
Représentations :
Dates: 2017
· October ? PREMIERE, Melbourne, Australia
· 15 & 16 December ? Next Wave Festival 2017, Brooklyn Academy of Music (BAM), New York, USA
· 19 & 20 December ? Arts Emerson, Boston, USA
Dates: 2018
· 16 May ? Philharmonie de Paris, Paris, France
Dates: 2019
· TBA, Phnom Penh, Cambodia
Jim Baldy (www.lepetitjournal.com/cambodge) mardi 18 juillet 2017