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Maria Toader : Un Centre Culturel franco-roumain à Nantes

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Écrit par Grégory Rateau
Publié le 20 juillet 2020, mis à jour le 20 juillet 2020
Cette semaine notre rédaction est allée à la rencontre de Maria Toader qui va lancer à Nantes pour cette rentrée, un Centre Culturel franco-roumain. Une belle victoire pour cette Roumaine désireuse de valoriser la culture de son pays d'origine.
 
 
 
Grégory Rateau : Vous ouvrez à la rentrée un Centre Culturel franco-Roumain à Nantes. Pourquoi avoir choisi cette ville?

Plusieurs facteurs m'ont conduit à cette initiative. Premièrement, Nantes est une ville qui inspire la créativité et le pas de côté: en m’y installant en 2015 suite à une mobilité professionnelle, j’ai découvert cette ville qui, déjà en 2013, attirait mon attention en recevant le prix de la Capitale Verte de l’Europe. Elle correspond complètement à mon état d’esprit, à savoir l'audace et l'originalité. Deuxièmement, la culture y joue un rôle important: le réputé parcours culturel et touristique Voyage à Nantes a déjà fait le tour du monde ! La Saison France-Roumanie a été aussi un élément déterminant, plusieurs manifestations culturelles en lien avec la Roumanie ayant eu lieu à Nantes en 2019.

En creusant, j’ai découvert que la ville de Nantes a signé un partenariat avec la ville de Cluj-Napoca au début des années 1990. Cet accord est aujourd’hui en attente de nouvelles initiatives qui puissent redonner vie à de nouveaux projets. Un des objectifs du Centre Culturel franco-roumain de Nantes est justement le développement de cet accord de partenariat.
Dernier facteur, ce sont les rencontres humaines que j’y ai faites, notamment les retrouvailles à Nantes avec Anaïs Girard, franco-roumaine et ex-collègue de l’Ambassade de France en Roumanie. Cet heureux hasard m'a encouragée à poursuivre l'objectif que je vise depuis 3 ans : faciliter les liens entre la France et la Roumanie.
 
 
Depuis quand avez-vous quitté la Roumanie?
 
J’ai quitté la Roumanie en 2013 après l’obtention d’une Bourse du gouvernement français afin de poursuivre mes études de master en double diplôme “Politique en Europe: Etats, frontières, sociétés” de la Faculté de Sciences politiques de l’Université de Bucarest à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Paris.

 

Qu'est-ce qui vous manque le plus de votre pays?

Instinctivement, je dirais la famille et les amis d'enfance. Mais, après réflexion, ce qui me manque souvent c'est la facilité de m’exprimer en roumain à travers des expressions inédites qui traduisent une certaine légèreté d’esprit à la roumaine, comme “las-o ba ca merge-asa”, ou une créativité débordante des Roumains comme “are mintea creata”. Je crois que vous, LePetitJournal.com de Bucarest, avez déjà répertorié pas mal d’expressions amusantes en roumain, non ?
 
 
En effet, on aime beaucoup faire découvrir la culture roumaine et ses expressions en sont très représentatives. Ce qui m'amène d'ailleurs à la question suivante : comment évolue selon vous l'image des Roumains en France?
 
Plus que l’image des Roumains en France, je parlerais de la perception des Français envers les Roumains qui a toujours été paradoxale. D’un côté, vous avez plein de gens qui connaissent et admirent les intellectuels et les artistes roumains ayant fait carrière en France comme Brancusi ou Ionescu. De l’autre, vous avez les images des Rroms dans des bidonvilles insalubres ou en train de faire la manche dans les rues de Paris. Le peuple roumain est tout cela à la fois et, à mon avis, c’est aux représentants du peuple roumain établis ici et ailleurs de faire de la pédagogie concernant toutes les facettes de notre société.
 
 
Votre intégration a-t-elle été facile?
 
Oui, j’ai un parcours assez typique de la catégorie “fuite des cerveaux”. Le fait d’avoir appris la langue française depuis l’âge de 8 ans a été clairement un atout dans mon intégration dans la société française. Je ne parlerai pas de choc de cultures entre la France et la Roumanie, parce qu’il n’existe pas. En revanche, je parlerai plutôt d’une compatibilité d’états d’esprit et de compétences entre les peuples français et roumains qui ont trouvé en moi un bon élève.
 
 
Par quels moyens concrets comptez-vous (re)valoriser la culture roumaine?

Au Centre culturel franco-roumain de Nantes nous envisageons la promotion de la culture roumaine sous tous ses aspects: littéraire, cinématographique, scientifique, artistique, musical et digital. Nous allons nous inspirer de ce que la ville de Nantes promeut aussi en termes de culture, à savoir l’innovation, l’interdisciplinarité, les industries culturelles et créatives. Les ponts à créer sont multiples: entre des associations, entre des étudiants, entre des professeurs, entre des start-ups. Notre vision est donc très large, et je pense que la société roumaine d’aujourd'hui a beaucoup de choses à offrir, notamment sur l’aspect “promotion d’une culture ancestrale et traditionnelle” comme l’initiative de La blouse roumaine.

 
Quel regard portez-vous rétrospectivement sur votre pays d'origine?
 
Il n’y a pas que les Français qui ont un regard paradoxal sur la Roumanie : les Roumains aussi ! Tantôt fiers, tantôt désenchantés, je ne cacherai pas que je suis comme mes compatriotes. Lors des manifestations contre la corruption en 2018, je me sentais très fière d’être Roumaine. Ce n’était pas le cas quand j’achetais mon pain dans une boulangerie à Paris… C’est uniquement après avoir travaillé pour l’Association Une Famille Un Toit 44 qui oeuvre pour l’insertion des Rroms sur le territoire nantais que j’ai compris que le service public français offrait plus d’opportunités à cette catégorie de citoyens roumains que l’Etat roumain lui-même. Le problème est structurel, ça remonte à une histoire bien trop ancienne pour la raconter ici...
 
 
Le monde vient d'être frappé par une crise sanitaire sans précédent. Etes-vous optimiste quant au secteur culturel justement qui en a beaucoup souffert?
 
Je suis convaincue que le secteur culturel retrouvera sa force de frappe d’avant et se réinventera pour proposer des modèles alternatifs et innovants. En plus, notre principal événement étant programmé pour le mois de juin 2021 (ndlr. "Le festival de la culture roumaine à Nantes”), Anais et moi avons de forts espoirs que les choses reviendront “à la normale”, pourquoi pas avec plus de frugalité, de sobriété. Nous trouverons une vraie source d’inspiration dans le peuple roumain qui sait faire beaucoup de choses avec peu de moyens.
 
 
 
 
Pour soutenir le Centre culturel franco-roumain à Nantes, vous pouvez désormais adhérer à distance https://www.facebook.com/106665677768955/posts/121472806288242/?d=n
 
 
grégory rateau
Publié le 20 juillet 2020, mis à jour le 20 juillet 2020

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