Aujourd'hui notre rédaction voulait vous raconter l'histoire d'un trésor au cœur de toutes les passions et d'une formidable trahison entre deux nations.
L'origine du trésor
Connu aussi sous le nom plus populaire de "La poule d'or et les poussins", le trésor de Pietroasele est un trésor archéologique découvert en 1837 dans une ancienne tombe dans le village de Pietroasele, dans le comté de Buzău. Jusqu’à la découverte de la tombe de Toutankhamon, « La poule d’or et les poussins » était le plus important trésor de l’antiquité, circulant parmi les plus célèbres musées en Europe durant le XXe siècle. Il a fasciné le monde entier, depuis des savants jusqu’à de fameux collectionneurs d’art en passant par de gens simples qui étaient séduit par sa beauté et par le mystère qui l’entourait.
Le trésor aurait été découvert par deux paysans du village de Pietroasele, Ion Lemnaru et son beau-père, Stan Avram, alors que les deux hommes étaient occupés à tailler du calcaire dans une carrière destinée à la construction d'un pont. Frappés par leur découverte, les deux hommes cachèrent leur trouvaille dans les greniers de leur maison et plusieurs mois après ils décidèrent de le vendre à Anastase Verusi, celui qui les avait embauchés pour extraire la pierre. Verusi sauta bien évidement sur l’occasion et le leur acheta pour la modique somme de deux bœufs.
L’ironie de l’histoire fut que les deux paysans qui avaient découvert le trésor par hasard furent jugés et jetés en prison où ils moururent avant la fin du procès alors que Verusi, lui, fut finalement acquitté.
La justice n'est décidément pas de ce monde...
Son contenu
Initialement composé de 22 pièces, aujourd’hui il n'en reste plus que 12 d’un poids total de 19kg et exposées dans la Salle des Trésors du Musée national d'histoire de Roumanie à Bucarest. 5 pièces sont entièrement en or : un grand plateau, un pichet à vin, une patère (plateau sacrificiel) avec un décor en relief et une statuette au centre, un collier avec une inscription gravée en caractères runiques et un collier sans inscription. Les autres pièces sont ornées de pierres précieuses : un collier à charnière, quatre fibules, sortes de broches utilisées pour fixer les vêtements, qui comptent parmi les exemples les plus somptueux de l’antiquité tardive et deux récipients avec des poignées en forme de panthères.
Ses origines
L'historien et archéologue roumain Alexandru Odobescu développera une véritable passion pour le trésor et publiera une monographie en français, Le Trésor de Pétrossa, apparu entre 1889-1900. C’est lui qui organisa aussi l’exposition du trésor en France pour l’Exposition universelle de Paris en 1867. Le trésor a été exposé durant plusieurs autres événements importants dont l’Exposition Universelle de Vienne en 1873 ou encore lors de l’exposition du Musée South-Kensington en 1868 et plus tard en 1900 lors de l’Exposition universelle de Paris.
Tous les regards étaient alors braqués sur ces merveilles qu’une multitude de chercheurs ont essayé d’étudier pour en déterminer l’origine mais aussi la traduction du texte runique ou encore les différentes catégories stylistiques des pièces.
Ainsi, les trois colliers ont de analogies avec des objets découverts à l’époque de l’ère du bronze, la patère a des caractères stylistiques greco-romains, alors que les quatre fibules dateraient du IVe siècle et permettrait d’attribuer le trésor aux Goths, un peuple germanique dont les deux branches, les Ostrogoths et les Wisigoths, engagées à maintes reprises dans des guerres contre et avec Rome pendant la période des grandes invasions de la fin de l'Antiquité, constituèrent au Ve siècle en Europe occidentale (actuelles Croatie, Italie, France du sud, puis est et sud de l'Espagne) leurs propres royaumes, qui s'effondrèrent respectivement en 553 et 711.
Ces derniers auraient cohabité avec une population sédentaire descendant des Daces et, ensemble, ils auraient produit les différents objets qui composent ce trésor.
Un trésor très convoité
Le trésor attisait toutes les convoitises. Ainsi le 20 Novembre 1875 tout Bucarest découvrait avec surprise que le trésor avait été volé du Musée des Antiquités de Bucarest qui se trouvait à l’époque dans le Palais de l’Université. Le coupable était un certain Dumitru Pantazescu-Popescu qui avait réussi à subtiliser le trésor en s’introduisant dans la bibliothèque du Sénat qui se trouvait juste au-dessous de la pièce où était exposé le trésor. Le plan était de découper le plancher et de descendre avec une corde jusqu’au trésor pour le récupérer, ce qu’il réussit à faire parfaitement comme dans un vrai film d'espionnage. Finalement l’auteur du crime fut arrêté et jugé mais les différentes pièces étaient à nouveau détériorées, notamment le collier avec une inscription gravée en caractères runiques dont la moitié était perdue.
Ça ne sera pas la seule fois que le trésor subissait des mésaventures : en 1884 un incendie eut lieu au Musée des Antiquités, et pour le sauver quelqu’un l’aurait jeté par la fenêtre.
Le roi Carol I décida ainsi de restaurer intégralement le trésor à Berlin, grâce aux connaissances du maitre bijoutier Paul Telge.
L’histoire d'une trahison
Durant la première guerre mondiale, vers la fin de 1916, Bucarest était menacée par les Empires centraux. Ainsi, les autorités ont prit la décision d’évacuer le gouvernement, la Banque Nationale, et la famille royale en Moldavie, emportant avec eux le Trésor de la Roumanie. Pour plus de sécurité, ils décidèrent d’évacuer le trésor à Moscou au nom d’une alliance d'amitié, la Roumanie faisant partie de l'entente formée par la France, le Royaume-Uni et la Russie. Le transfert était garanti par le tsar de la Russie, cousin de la Reine Marie.
Du 12 au 14 décembre 1916, dans la gare de Iasi, 1738 caisses furent donc chargées dans 17 wagons de train en partance pour la Russie. On y trouvait des lingots d’or et des monnaies, les bijoux de la Reine Marie, la bague de Vasile Lupu, l’archive de l’état, des manuscrits précieux, mais aussi des tableaux de valeur signés Nicolae Grigorescu, Theodor Aman et Ştefan Luchian….
Tout s'est passé sans encombre et l'état roumain pouvait enfin respirer mais voilà qu'à la fin de la guerre, les choses ne se sont pas exactement passées comme il l'aurait souhaité, l’état roumain n’ayant pas prévu le changement de régime en Russie et la prise de pouvoir par les bolchéviques.
Du jour au lendemain, les relations diplomatiques entre les deux pays furent coupées et la Russie a tout bonnement refusé de restituer le trésor national aux Roumains en prétextant par le biais d'un document officiel « que le trésor roumain était confisqué à l’oligarchie roumaine pour être à un moment donné restitué au peuple ouvrier ».
Les négociations
Après des négociations sans fin, il faudra attendre une dizaine d’années, en 1956 plus précisément, pour que 10 des 22 pièces du trésor de Pietroasele furent enfin restituées à la Roumanie par l'URSS quand Hrusciov communiqua à Gheorghe Gheorghiu-Dej la décision du Parti Communiste de l’Union Soviétique de le restituer à la République Populaire Roumaine mais le reste de l'or (y compris les 93,4 tonnes d'or de la banque nationale) sont toujours en Russie.