La Thaïlande s’apprête à injecter l’an prochain pas moins de 14 milliards d’euros dans son économie en donnant à chaque citoyen de plus de 16 ans un portefeuille électronique contenant environ 250 €, a affirmé le Premier ministre, Srettha Thavisin.
Le Premier ministre thaïlandais, Srettha Thavisin, a réaffirmé lundi que son gouvernement injecterait 560 milliards de bahts (14,42 milliards d’Euros) dans l'économie en début d'année prochaine avec la distribution d’une allocation via un portefeuille numérique, une mesure phare de son plan de relance économique.
Cette mesure prévoit que chaque citoyen thaïlandais de plus de 16 ans pourra recevoir à partir du 1er février 2024 la somme de 10.000 bahts (259 euros) sous la forme d’un porte-monnaie numérique à utiliser sur une période de six mois dans un rayon de quatre kilomètres autour du domicile.
Srettha Thavisin, magnat de l'immobilier nommé Premier ministre en août, cherche à relancer une économie atone, plombée par la politique sanitaire de ses prédécesseurs durant la pandémie et par le marasme économique mondial qui a suivi. Selon les calculs initiaux de son parti, le Pheu Thai, ce plan annoncé durant la campagne électorale doit permettre d’atteindre un taux de croissance de 5% en 2024.
Pour l’heure, la banque centrale, qui a récemment relevé ses prévisions de croissance pour l’année prochaine, estime que le produit intérieur brut de la Thaïlande devrait progresser de 4,4%, un objectif jugé optimiste au vu des dernières données économiques.
Attention aux effets pervers sur l'économie
Alors que les exportations sont en berne et que la reprise touristique post-Covid déçoit les projections les plus pessimistes, les prévisions de croissance pour 2023 ont pour leur part été revues à la baisse ces dernières semaines, érodant encore davantage la confiance des investisseurs.
Lorsque l’idée de relancer la consommation intérieure avec ce porte-monnaie électronique s’est précisée en août, avec la nomination du nouveau Premier ministre, plusieurs économistes ont émis des craintes vis-à-vis d’éventuels effets pervers tels que le risque d’alimenter l'inflation, d’entraîner une hausse des prix, ou encore de contribuer à déprécier la valeur du baht.
La Banque de Thaïlande a pour sa part conseillé de resserrer l’assiette des bénéficiaires en étant plus sélectif dans la sélection du plan en faveur des plus nécessiteux. Elle a également insisté sur la nécessité pour le gouvernement de démontrer au public que la discipline monétaire et budgétaire était respectée.
Besoin d'une plus grande transparence
Le gouverneur de la banque centrale, Sethaput Suthiwartnarueput, a en effet suggéré en septembre que le gouvernement fasse preuve de transparence en communiquant sur les effets de sa politique sur le moyen terme, avec notamment un suivi du processus de distribution des subsides et de la situation globale de la dette et des déficits, afin de donner au public l'assurance que la discipline budgétaire est intacte.
Un souci de transparence partagé par les milieux d’affaires étrangers présents dans le royaume, à l’image de la Chambre de commerce américaine. Interviewée fin septembre par la chaîne locale ThaiPBS World, sa présidente thaïlandaise, Mook Pibuldham, estimait que le gouvernement demeurait trop ambigu quant à la source de financement et aux règles supposées régir ce plan.
"Ce système de portefeuille électronique doit être entièrement numérique et totalement transparent, malgré les défis potentiels qu’il comporte, notamment pour les personnes âgées. Cette politique a le potentiel d’améliorer le pouvoir d’achat au niveau national, mais elle doit être mise en œuvre en toute transparence", a souligné pour sa part Vibeke Lyssand Leirvag, la présidente de la Joint Foreign Chamber of Commerce, qui représente 9.000 entreprises réparties dans les différentes chambres étrangères de Thaïlande.
Pour Mook Pibuldham, le gouvernement de Srettha Thavisin doit fournir davantage d’explications au public. "Laisser des questions sans réponse risque de provoquer une volatilité des marchés et affecter la performance des actions, ce qui n’est bénéfique ni pour les entreprises ni pour le public", a-t-elle dit.