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Olivier Morel : “Les CCE sont des ambassadeurs, avec un petit a”

Olivier Morel, président des Conseillers du Commerce Extérieur du Royaume-Uni est revenu, le temps d’une interview, sur le rôle des Conseillers du Commerce Extérieur et leur mission de soutien aux pouvoirs publics et aux entrepreneurs français au Royaume-Uni. Un soutien essentiel de Français bénévoles et entrepreneurs pour la communauté française.

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Olivier Morel, président des Conseillers du Commerce Extérieur du Royaume-Uni
Écrit par Ewan Petris
Publié le 11 octobre 2023, mis à jour le 3 mars 2024

Comment sont nés les Conseillers du Commerce Extérieur?

Les Conseillers du Commerce Extérieur est un organisme émanant du gouvernement français qui a 125 ans cette année. Il a été créé à la fin du XIXe siècle à l'initiative des pouvoirs publics, notamment au sein des ambassades françaises à l'étranger. À cette époque, les ambassades étaient principalement peuplées de militaires et diplomates qui n'avaient pas une connaissance détaillée de l'activité économique. Par conséquent, il était nécessaire de disposer d'un corps d'hommes d'affaires, principalement des entrepreneurs français en poste à l'étranger, pour recueillir des informations sur les secteurs dans lesquels ils étaient actifs (nous sommes maintenant beaucoup plus paritaires, avec un conseil d’administration à majorité féminine).
 

 

Comment l’organisme est-il structuré ? 

Nous sommes un groupe de 4300 membres dans le monde, dans 150 pays. Nous sommes des bénévoles, nommés pour un mandat de trois ans par décret du Premier ministre, sur proposition de l’Ambassadeur et du Président du comité local. Le Royaume-Uni compte une grosse soixantaine de membres. Chaque comité à l'étranger est géré au quotidien par un bureau : président, secrétaire général, trésorier et des volontaires.
 

 

Quel est le rôle principal des CCE et comment contribuent-ils au dynamisme de la communauté d’affaires au Royaume-Uni ?

Nous avons quatre missions

Nous informons les pouvoirs publics sur les enjeux du commerce international.  Nous faisons remonter les signaux faibles et les tendances sectorielles au Royaume-Uni. Depuis 25 ans on fait ce qu'on appelle du benchmarking ; en surveillant ce qui se passe au niveau des politiques publiques britanniques ; en faisant remonter, en bien ou en mal, les expériences des entreprises sur place. Nous sommes sollicités par le gouvernement, les syndicats, les parlementaires et d'autres parties prenantes intéressées par le pays. 

Ensuite, nous accompagnons les PME (Petites et Moyennes Entreprises) . Nous leur apportons un soutien en les mettant en relation avec des conseillers spécialisés dans leur domaine. Le but est de favoriser l'échange d'informations, leur apporter des critiques constructives, pour accélérer la mise en place de leurs projets. 

Nous avons aussi le rôle de formateurs. Bien que le rôle des VIE (Volontariat International en Entreprise) ait été essentiel dans ce domaine, il est devenu plus difficile au Royaume-Uni depuis le Brexit – complexité et cherté des visas. Néanmoins, les Conseillers du Commerce Extérieur continuent de contribuer à l'éducation en collaborant avec des instituts d’éducation, des écoles de commerce, et en sensibilisant les étudiants français aux métiers internationaux.

Enfin, nous faisons la Promotion de l'Attractivité de la France, l’idée est d’être des ambassadeurs avec un “petit a”, pour encourager l'investissement étranger en France. Nous faisons des sondages réguliers auprès de nos membres sur la perception de l’image de la France, outil utile aux pouvoirs publics. Nous voulons faire passer des messages positifs, en collaboration étroite avec des acteurs comme Business France et Atout France.



 

Concrètement, expliquez-nous comment les entrepreneurs français au Royaume-Uni bénéficient du soutien et des conseils des CCE ?

Les entrepreneurs français au Royaume-Uni peuvent facilement bénéficier de notre soutien. Ils peuvent entrer en contact avec nous via notre réseau de Conseillers du commerce extérieur en France. Ensuite, notre référent "parrainage" les guide pour trouver la personne appropriée en fonction de leur secteur et de leurs besoins. Je tiens à préciser que notre intervention est informelle et bénévole, et axée sur le terrain. Parfois cela peut simplement prendre la forme d’une réunion autour d’un café, de discussions autour du projet et d’ouverture de nos réseaux. Nous cherchons en particulier à éviter des erreurs coûteuses dans leurs premiers pas au Royaume-Uni. 

Cette relation peut ensuite se poursuivre en fonction des besoins des entrepreneurs. Ce faisant, les conseillers du commerce extérieur travaillent en partenariat avec l'Ambassade, la Chambre de Commerce française, Business France et Atout France. 



 

En tant que président des CCE au Royaume-Uni, comment évaluez-vous la dynamique actuelle des entrepreneurs français évoluant ici, en particulier à la lumière des récents événements (Brexit, Covid…) ?

Il semble y avoir moins de nouveaux projets ou de PME françaises qui s'implantent au Royaume-Uni par rapport aux deux dernières décennies. En revanche, il y a toujours des projets d'acquisition impliquant des groupes français qui acquièrent des entreprises britanniques. Actuellement, il y a sans doute un certain attentisme et une préoccupation concernant l’incertitude politique, ce qui rend la lecture de la situation économique plus compliquée.

Ceci étant dit, le Royaume-Uni reste une grande économie de la taille de la France, mais nous traversons une période agitée, notamment en raison des élections à venir, d’ici à janvier 2025. Malgré tout, j'ai eu un client au téléphone ce matin qui m'a confirmé son installation à Londres, un beau projet.


 

Quels sont les principaux défis auxquels vous et votre organisme êtes confrontés et comment les surmonter ?

Nous avons la chance d'avoir un comité très dynamique avec des membres très compétents. Le défi est surtout de pouvoir continuer à utiliser nos talents parce qu'on a 60 membres, très occupés, qui ont des agendas fournis et qui agissent bénévolement, pour passer quelques heures à aider les entreprises et les pouvoirs publics. On espère continuer à utiliser ces talents de manière intelligente

Nous nous autosaisissons aussi de certains sujets. propre initiative. Début 2021, au moment où la campagne de vaccination contre le Covid au Royaume-Uni était très en avance; nous avions fait un rapport de ce qui avait été bien exécuté ici, sur le mode ‘comment apprendre des britanniques’. Il a été très bien reçu par nos relais à l’Ambassade et à Paris. Donc je pense que le défi reste de continuer à rester pertinent dans notre rôle, tout en n’ayant qu’un temps limité à y consacrer. Aider les entrepreneurs français, aider son pays, cela reste passionnant ! 


 

Comment voyez-vous l'avenir de la collaboration entre la France et le Royaume-Uni ?


J’ai traité ce sujet sur mon dernier article de blog leschroniquesdubrexit.org. La période qui s'est terminée avec l'arrivée de Rishi Sunak au poste de Premier ministre a été la pire que j'ai connue depuis plus de trois décennies. La relation n'a jamais été aussi grave que pendant le Brexit, culminant avec l'affaire du contrat des sous-marins australiens. Aujourd’hui, nous sommes revenus à la normale avec le sommet franco-britannique en mars dernier (le premier depuis 5 ans), ou encore la visite d’Etat du roi Charles III. Nous sommes de retour sur les bons rails avec une relation beaucoup plus apaisée. Il faut continuer à y travailler. Je pense que le monde des affaires peut apporter sa pierre à l’édifice. L'expérience montre que lorsque l’on fait des affaires, les choses vont bien.

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