La Pologne a souvent été dominée par la Russie, au point de disparaître de la carte d’Europe entre 1795 et 1918 et de connaître une autre forme de domination entre 1945 et 1988. Mais, au XVIIe siècle, la Pologne a parfois eu le dessus, jusqu’à voir son héritier au trône élu tsar de Russie.
La première tentative d’ingérence des Polonais
C’est le « temps des troubles » en Russie depuis le décès du tsar Fiodor Ier en 1598, mort sans laisser d’héritier. Ses successeurs sont contestés et des usurpateurs tentent de se faire passer pour son fils, Dmitri, censé être mort. Et certains vont y arriver.
Le voisin de la Russie, la République des deux nations, union du grand-duché de Lituanie et de la Pologne, y voit l’occasion potentielle de faire tomber son grand rival. L’armée polonaise soutient l’entreprise du Faux Dmitri Ier en 1604 et en 1605. Celui-ci succède donc au tsar Boris Godounov décédé. Mais l’usurpateur est assassiné à peine un an plus tard par la noblesse russe, insatisfaite.
Une deuxième tentative
Le roi Sigismond Vasa III - celui que vous voyez sur une colonne à l'entrée de la vieille ville de Varsovie - décide en 1609 de lancer une offensive militaire en Russie quand le tsar Vassili Chouiski conclut une alliance militaire avec les Suédois, car en prise avec un second imposteur, le faux Dmitri II.
En 1610, Sigismond III prend Moscou. Il ramène Basile Chouiski, tsar de Russie à Varsovie. Celui-ci lui fait acte d’allégeance en présence de la noblesse et du Sénat. Cet épisode porte dans la mémoire polonaise le nom de « Hołd Szujskich » ou « Hołd ruski », « l’hommage de Chouiski » en français. La même année, le fils de Sigismond III, Władisław, est élu tsar de Russie.
Le début de la fin
Sigismond III refuse d’envoyer son fils à Moscou, qui ne montera donc jamais sur le trône de Russie. Il tente de gouverner lui-même, ce qui n’est pas sans déplaire aux Russes. En réponse, les Polonais sont chassés en 1611 de Moscou.
En 1613, un autre tsar est élu, Michel Feodorovitch Romanov, le premier tsar de la dynastie des Romanov. C’est la fin du « temps des troubles ». En 1618, la guerre russo-polonaise prend fin par le traité de Déoulino duquel découle un agrandissement territorial de la Pologne (les voïvodies de Smolensk et de Tchernihiv). En 1634, Władisław abandonne ses revendications sur le trône de Russie.
Ainsi, les Polonais ont su profiter d’un moment de troubles en Russie pour s’imposer, même si cela n’a pas duré. Pour autant, le « Hołd Szujskich » reste un épisode inédit de l’histoire polonaise et dont la fierté perdure jusqu’à aujourd’hui.