Adam Jaworowski, c’est un terroir et une enfance entre les vignes de la région champenoise en France et la Pologne, puis très tôt, l’envie de connecter les deux pays sur le plan des opportunités d'affaires. C’est ce projet, nourri depuis ses années collège, qui a guidé ses choix d'études, convaincu que sa double culture, combinée à la maîtrise du polonais, du français et de l'anglais, représenterait un atout majeur pour son avenir professionnel. Pari gagnant, puisqu’en 2017, Adam Jaworowski revient en Pologne, pour un contrat V.I.E, au sein de l’entreprise FM Logistic. Aujourd’hui, représentant et ambassadeur de la Maison de Champagne Carbon en Pologne, il s’est reconnecté, depuis 2018, au terroir qui lui est si cher, en relevant le défi d’introduire et développer une marque française de luxe en Pologne.
Lepetitjournal.com Varsovie, Bénédicte Mezeix-Rytwiński : parlez-nous de votre double culture, où avez-vous grandi ?
Adam Jaworowski : Pour répondre à votre question sur ma double culture, elle est un héritage précieux et profondément ancré dans mon histoire familiale. Ma mère était polonaise, et mon père, quant à lui, était français, né à Reims, au cœur de la Champagne. Cependant, mon père était d'origine polonaise, puisque mes grands-parents avaient émigré en France après la Seconde Guerre mondiale pour travailler, comme beaucoup d'autres à l'époque. Bien qu'ils aient décidé de s'intégrer pleinement à la société française en adoptant la langue, les coutumes et le mode de vie, cette origine polonaise a toujours été présente dans notre famille.
À l'âge adulte, mon père a ressenti le besoin de se reconnecter à ses racines. À partir de 1989, il a voyagé en Pologne, où il a rencontré ma mère. C'est ainsi que je suis né, à la croisée de deux cultures riches et complémentaires.
Mon enfance s'est déroulée entre la France et la Pologne, avec des allers-retours qui ont enrichi ma compréhension des deux pays.
Ah, il vient de là, ce très léger accent qu’on entend parfois en, français ?
Oui, alors c’est étrange, avec mon accent, il revient dès que je pratique le polonais au quotidien à 100%, mais dès que je suis à nouveau en France, il se gomme immédiatement (rires).
En 2004 (juste avant l’adhésion de la Pologne dans l’UE), à l’âge de 13 ans, j'ai fait le choix de continuer ma vie et la scolarité en France, jusqu'à mes 26 ans, moment où j'ai terminé mes études supérieures.
Durant ces belles années, je suis devenu un vrai français, séduit par la langue, la culture, le savoir-vivre et la beauté de la France. Néanmoins, une idée a commencé à germer : celle de connecter la France et la Pologne sur le plan des opportunités d'affaires.
Ce projet a guidé mes choix d'études, que j'ai orientées dans cette direction. Dès le collège, j’ai participé à des actions, tout s’est fait naturellement. Entre mes 13 et 26 ans, bien que vivant en France, je suivais de près l'évolution économique et la dynamique de croissance en Pologne. Convaincu que ma double culture, combinée à ma maîtrise du polonais, du français et de l'anglais, représenterait un atout majeur pour mon avenir professionnel, j'ai décidé de miser entièrement sur ce projet. Avec le recul, ce pari s'est révélé judicieux.
Quel a été le déclic qui vous a poussé à vous installer en Pologne ?
Ce qui m'a poussé à m'installer en Pologne est lié à une opportunité professionnelle. Grâce à une forte croissance économique et à une présence significative d'entreprises internationales, dont une partie à capitaux français, la Pologne constituait un environnement particulièrement attractif pour un jeune diplômé.
Alors que je terminais mon Master 2 en Commerce International, une grande multinationale française du secteur logistique, FM Logistic, qui m’a proposé un poste à responsabilité dans le cadre d’un contrat V.I.E grâce à mon bagage.
Ce poste en Pologne, l’un des marchés mondiaux clés de cette entreprise, représentait une occasion unique de commencer ma carrière dans un pays complètement transformé depuis que je l’ai quitté en 2004.
C’est donc un V.I.E, qui vous a amené en Pologne ?
D’une certaine manière, oui. C’est la société FM Logistic qui en fait est venue à moi, alors que j’étais en visite lors d’une porte ouverte au sein de mon ancien Master 2 : j’ai échangé avec les personnes de l’entreprise, et immédiatement, les responsables m’ont demandé si je parlais polonais. Je leur ai répondu que « oui », ainsi qu’anglais. « Ne bougez plus, on vous prend ! » (rires) C’est cette double culture qui les a intéressés afin de faire le lien entre les fournisseurs et l’entreprise. J’ai été très chanceux.
Enfin vous alliez pouvoir œuvrer pour votre projet de rapprochement des cultures…
Oui, franco-polonais, j'ai nourri dès mon adolescence une passion pour le rapprochement des cultures et des opportunités entre la France et la Pologne. Cet intérêt a guidé mes choix personnels et professionnels, m'orientant naturellement vers le milieu des affaires, un domaine qui offre d'immenses possibilités pour renforcer les liens entre ces deux pays.
Après un cursus en école de commerce, où j’ai obtenu un Master 2 Commerce International, j’ai commencé ma carrière comme beaucoup d’autres personnes avec un Volontariat International en Entreprise (V.I.E) chez FM Logistic, au sein de sa filiale en Pologne. Cette expérience m’a offert l’opportunité d’avoir des responsabilités, de collaborer avec des équipes multiculturelles, puis de faire de belles rencontres.
J'ai notamment tissé des liens précieux avec des acteurs clés des relations franco-polonaises, notamment au sein d’organisations telles que la CCI France Pologne, l’Ambassade de France, l’UFE Pologne ou encore j’ai eu de la chance d’être invité à rejoindre des groupes d’entreprenariat francophone.
J’ai également participé à de nombreux événements de networking, où j’ai pu échanger avec des femmes et des hommes d'affaires polonais et renforcer ma compréhension des dynamiques du marché local.
Quels souvenirs gardez-vous de ce V.I.E ? Est-ce une expérience que vous recommanderiez ?
Je garde un excellent souvenir de mon expérience en V.I.E.
Je pense que c’est l’une des meilleures façons de commencer sa carrière lorsqu’on aspire à travailler avec une dimension internationale. Ce dispositif offre un cadre structuré et sécurisé, permettant de préserver les conditions de travail françaises tout en s’immergeant dans un contexte professionnel à l’étranger.
De plus, le V.I.E a un aspect unique : celui d'être une mission économique au service de l'entreprise et, dans un sens plus large, des relations entre les pays.
Personnellement, j'ai ressenti une véritable fierté de pouvoir contribuer au renforcement des relations d'affaires entre la France et la Pologne, mais aussi avec d’autres pays où l’entreprise avait des filiales. Cela a donné un sens particulier à mon travail et m'a permis d'évoluer rapidement sur le plan professionnel et personnel.
Je recommande donc vivement l’expérience V.I.E à tous les jeunes diplômés désireux de s’investir dans une carrière internationale et d’explorer de nouvelles cultures tout en bénéficiant d’un cadre bien organisé.
V.I.E : un volontariat international en entreprise en Pologne, et pourquoi pas vous ?
Aujourd’hui, vous êtes représentant et ambassadeur de la Maison de Champagne Carbon en Pologne, vous avez réussi à lier votre terroir à la Pologne ?
À l’issue de ma mission V.I.E en octobre 2018, j’ai eu l’opportunité de relever un défi aussi unique qu’inspirant : introduire et développer une marque française de luxe en Pologne. Ce virage s’est opéré de manière naturelle, suite à une conversation déterminante avec Alexandre Mea, PDG de Champagne Carbon. Nous avons rapidement identifié des intérêts communs, notamment notre passion pour le savoir-faire champenois et l’ambition de valoriser cet héritage unique.
Qu’est-ce qui vous a séduit dans cette entreprise ?
Ce qui m’a immédiatement séduit chez Champagne Carbon, c’est son caractère familial et son enracinement à Champillon, dans la vallée de la Marne, près d’Épernay. Cette maison, au-delà de son ancrage historique, se distingue par une vision novatrice et un rayonnement international. Son positionnement audacieux est illustré par des partenariats emblématiques, tels que le champagne officiel des podiums de Formule 1 ou encore son association avec Bugatti, une autre icône de l’excellence française.
Mon rôle en tant que représentant et ambassadeur de la marque en Pologne a été de concevoir et de mettre en œuvre une stratégie adaptée aux spécificités de ce marché en plein essor. La Pologne, avec des consommateurs de plus en plus tournés vers les vins haut de gamme, offrait un terreau idéal pour positionner une marque aussi prestigieuse. C’est un privilège d’avoir pu accompagner cette maison dans son expansion tout en contribuant à faire découvrir et apprécier le savoir-faire champenois à un public nouveau.
En tant que Champenois, je suis profondément attaché à ma région, à la richesse de son terroir et à l’excellence de ses traditions viticoles. Mon père, né à Reims et ayant grandi dans un petit village viticole à proximité, m’a transmis une petite parcelle de vignoble, renforçant mon lien avec cet univers unique et emblématique.
Cette transmission familiale m’a non seulement permis de mieux comprendre les spécificités et le savoir-faire de la Champagne, mais elle a également nourri ma passion pour ce patrimoine exceptionnel. J’ai toujours ressenti une immense fierté à l’idée de faire découvrir cette richesse à un public plus large et de partager l’histoire, l’artisanat et la culture qui font la renommée de la Champagne dans le monde entier.
Aujourd’hui, je suis heureux de pouvoir participer, à ma manière, à la promotion du savoir-faire champenois en Pologne, tout en contribuant au rapprochement de deux cultures qui me sont chères. C’est une responsabilité et un privilège que je prends à cœur.
Alcool en Pologne : ce qui est autorisé, ce qui est interdit
Quels sont les changements opérés par Alexandre Méa, héritier de la famille Devavry, au sein de la Maison de Champagne Carbon, par exemple ?
La Maison de Champagne Carbon incarne un mélange audacieux de tradition et de modernité, qui reflète l’esprit du 21e siècle. Fondée à Champillon, un village classé « Premier Cru » situé au cœur de la Vallée de la Marne, Champagne Carbon trouve ses racines dans une histoire familiale riche et unique. Alexandre Méa, héritier de la cinquième génération de vignerons de la famille Devavry, a souhaité réinventer l’héritage familial en y insufflant une vision audacieuse, où l’innovation d’excellence dialogue harmonieusement avec le respect du terroir champenois.
Ce qui m’a marqué dans cette Maison, c’est son âme profondément avant-gardiste. Carbon ne suit pas les codes traditionnels, elle les réinvente.
Chaque bouteille est une œuvre d’art, recouverte de fibre de carbone, un matériau symbolique de l’excellence et de l’innovation. Ce processus, réalisé entièrement à la main dans leur atelier, témoigne du savoir-faire artisanal exceptionnel de la Maison.
Le marché du luxe en Pologne se porte plutôt très bien par rapport à ses voisins européens, puisqu'il a explosé dans les domaines de la joaillerie, dont les montres, de l’automobile et des alcools…
Le savoir-faire singulier de Carbon a su attirer l’attention d’autres maisons d’excellences, séduites par l’artisanat de prestige et par les valeurs de la marque.
C’est donc tout naturellement que Bugatti, marque française renommée et fleuron de l’industrie automobile de luxe, est devenue le partenaire officiel de Carbon en novembre 2018.
Les deux marques familiales partageant des valeurs similaires telles que la recherche constante d’excellence et d’innovation alliant tradition, modernité et savoir-faire ont uni leur force pour la création d’une cuvée exceptionnelle, un assemblage unique célébrant l’anniversaire des 110 ans de Bugatti, en 2019.
J'ai ressenti une grande fierté en mai 2023 lorsque la Pologne a rejoint le cercle prestigieux des pays accueillant une représentation officielle de Bugatti, inaugurée à Katowice.
Cet événement marquant souligne le dynamisme et l'ouverture de la Pologne aux marques de plus haut niveau d’excellence mondial.