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Bouziane Ahmed Khodja : "Makeda est l’espérance d’une vie meilleure pour les femmes"

Makeda est un roman qui s’attaque à un sujet difficile : la violence des pratiques ancestrales perpétrées sur les femmes dans les sociétés africaines. À travers le parcours d’une jeune migrante, l’écrivain et journaliste Bouziane Ahmed Khodja nous fait le récit d’une vie marquée par un traumatisme, l’excision, pratiquée sur la jeune Makeda à l’âge de huit ans. Après cet événement déclencheur d’une terrible souffrance, le lecteur suit les hésitations, les peurs, mais aussi les espoirs de la jeune femme.

bouziane ahmed khodjabouziane ahmed khodja
Écrit par Juliette Burnel
Publié le 25 mai 2024, mis à jour le 28 mai 2024

J’ai voulu écrire Makeda en hommage à toutes les 'Makeda' du monde.

 

Expliquez-nous le contexte de parution de votre roman Makeda.

Depuis mon arrivée en Espagne en 2008, j’avais vraiment envie d’écrire. Makeda est mon premier roman en espagnol. C’était un vrai défi. Je voulais voir quel niveau d’expression j’étais capable d’atteindre. Une fois mon livre terminé, et avec l’appui de mon éditrice, j’ai réécrit Makeda en français. Mon roman a également été traduit en italien. 

couverture du roman Makeda

 

Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire sur ce thème si douloureux et difficile de l’excision ?

J’ai un grand respect pour les femmes. J’ai voulu écrire Makeda en hommage à toutes les “Makeda” du monde. La femme, dès sa naissance, est condamnée pour le seul fait d’être une femme. C’est une marque identitaire discriminatoire. La discrimination ne vient pas en cours de route, elle est là depuis le commencement. J’ai voulu écrire un roman au féminin. Je suis allé chercher au plus profond de moi-même toute la féminité que j’ai héritée de ma mère, de ma femme et de ma fille. J’ai rassemblé toutes ces sensibilités pour essayer d’écrire mon roman au féminin. 

En quoi la pratique de l'excision consiste-t-elle ?

L’excision du clitoris est une pratique tribale et traditionnelle dans certaines zones d’Afrique noire – notamment en Afrique centrale et en Afrique de l’ouest – mais aussi dans quelques pays arabes comme l’Egypte. C'est une mutilation génitale féminine qui consiste à priver la femme des attributs que la nature lui a donnés pour jouir de sa sexualité. Attention toutefois, l’excision n’est pas une pratique religieuse. L’Islam, par exemple, ne dit rien sur la mutilation génitale. 

Je décris l’excision dès le premier paragraphe de mon roman. Il est donc très violent, mais aussi poétique et sensible. J’ai voulu dépeindre la colère et la détresse de la nature autour de l’acte perpétré sur Makeda. Mais Makeda n’est pas seulement la mutilation génitale féminine. C’est aussi le mariage forcé, le terrorisme, l’exil et tous les risques qu’elle traverse durant son immigration illégale… Enfin, Makeda, c’est l’espérance d’une vie meilleure !

la couverture violette du livre de bouziane ahmed khodja

 

Le prénom « Makeda » a-t-il un rapport avec la fameuse reine de Saba ?

Tout à fait. C’est cette référence mythologique. Je voulais un nom hautement symbolique. 

 

Les mots ont le pouvoir de dénoncer. Ils permettent de semer maintenant pour récolter demain.

 

Le personnage principal de votre livre est-il inspiré d’une personne réelle ?

Non, le personnage est le fruit de mon imagination. Je voulais une histoire vierge. Makeda est une jeune fille qui, sur le passage du Paris-Dakar, a trouvé une revue de Paris Match. Elle y découvre la photo d’une mannequin. Pendant des années, elle place cette photo sous son oreiller. Un jour, elle décide de partir en Europe pour réaliser son rêve : devenir mannequin à son tour. 

Bouziane Ahmed Khodja à la rencontre littéraire ce jeudi 23 mai au MUVIM.
Bouziane Ahmed Khodja à la rencontre littéraire de ce jeudi 23 mai au MUVIM.

Pensez-vous que la littérature est un levier efficace pour dénoncer la violence ?

Absolument. Tous les écrivains qui peuvent dénoncer ce genre de pratiques doivent le faire. Si un jour, quelqu’un prend sa plume pour écrire, alors nous ne devons plus nous déresponsabiliser. L’écriture peut permettre à un lecteur d’avoir une prise de conscience et, peut-être, de la transmettre à ses enfants. Les mots ont le pouvoir de dénoncer, ils permettent de semer maintenant pour récolter demain.

 

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