Édition internationale

Opérations de fusion, scission et transformation transfrontalières en droit italien

Publié au journal officiel italien, le nouveau décret législatif du 19 juin dernier, vient apporter de nouvelles règles pour faciliter la mobilité des sociétés au sein de l’Union Européenne.

deux personnes se serrent la main au travaildeux personnes se serrent la main au travail
Photo de Radission US sur Unsplash
Écrit par CastaldiPartners
Publié le 7 juillet 2025, mis à jour le 29 juillet 2025

Le Décret Législatif n. 88/2025 du 19 juin 2025 a été publié à la Gazzetta Ufficiale (journal officiel italien), le 23 juin 2025.  Ce texte complète et corrige le Décret Législatif n.19/2023 du 2 mars 2023, qui avait transposé la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 concernant les transformations, fusions et scissions transfrontalières.

 

 

Un double objectif pour les transformations, fusions et scissions transfrontalières

Par l’adoption d’une directive visant à harmoniser les règles applicables aux transformations, fusions et scissions transfrontalières, l’Union européenne a souhaité poursuivre un double objectif : d’une part, faciliter la mobilité des entreprises au sein du marché intérieur ; et d’autre part garantir la protection des parties prenantes, notamment les salariés, les créanciers et les associés ou actionnaires minoritaires.

Le récent Décret Législatif n. 88/2025 du 19 juin 2025, qui entre en vigueur le 8 juillet 2025, vise à corriger certaines imprécisions apportées par le premier Décret Législatif du 2 mars 2023 transposant les directives européennes, mais aussi à élargir le champ d’application de ces opérations extraordinaires à d’autres formes juridiques, et à simplifier les procédures, tout en renforçant la sécurité juridique des parties prenantes à ces opérations.

 

 

La fusion transfrontalière : modalités, obligation d’information et droit d’opposition

La fusion de plusieurs sociétés peut s’opérer soit par la constitution d'une nouvelle société, soit par l'incorporation d'une ou plusieurs sociétés. La fusion revêt un caractère transfrontalier lorsque l'opération implique au moins une société de droit italien et une société relevant du droit d'un État membre de l'Union européenne.

La fusion transfrontalière est soumise à certaines formalités légales. Un projet de fusion précisant les caractéristiques essentielles de l’opération envisagée doit être établi par l’organe de gestion de chacune des sociétés concernées, puis déposé pour publication au registre italien des sociétés (Registro delle Imprese), en fonction du siège social de chaque société.

Par ailleurs, dans un souci de protection des intérêts des parties prenantes à l’opération, le projet de fusion est accompagné d’une information destinée aux associés ou actionnaires, aux créanciers, ainsi qu’aux représentants des salariés, les informant de leur droit de formuler des observations sur le projet de fusion. Les créanciers disposent également d’un délai de 90 jours à compter de la date de dépôt du projet au registre italien des sociétés pour former opposition, s’ils estiment que la fusion envisagée est de nature à compromettre le recouvrement de leurs créances.

L’organe de gestion de chacune des sociétés participant à la fusion est en outre tenu d’établir un rapport à l’attention des associés ou actionnaires et des salariés, dans les conditions prévues par la loi. Le rapport destiné aux associés ou actionnaires expose les modalités juridiques de l’opération, et rappelle les droits qui leur sont reconnus dans le cadre d’une fusion transfrontalière, tel que le droit de retrait dont ils peuvent se prévaloir s’ils n’approuvent pas la fusion. Le rapport adressé aux salariés expose, quant à lui, l'impact juridique et économique de la fusion sur les relations de travail et les mesures envisagées pour préserver l'emploi.

D’autres formalités incombent aux sociétés prenant part à une fusion transfrontalière. Parmi celles-ci figurent notamment l’approbation de l’opération par l’assemblée des associés ou actionnaires de chacune des sociétés concernées, ainsi que la demande adressée à un notaire en vue de l’émission d’une attestation préalable. Cette attestation a pour objet de certifier que l’ensemble des actes et formalités prescrits par la législation italienne en vue de la réalisation de la fusion ont été régulièrement accomplis.

La réalisation de la fusion transfrontalière doit, en dernier lieu, être constatée par acte authentique établi par un notaire italien, lorsque la société issue de l’opération relève du droit italien.

 

 

La scission transfrontalière : un formalisme proche de celui de la fusion

La scission est l’opération par laquelle une société transfère l’ensemble de son patrimoine à plusieurs sociétés, existantes ou nouvellement constituées, ou une partie de son patrimoine, dans ce cas même à une seule société, ainsi que les actions ou parts sociales correspondantes à ses associés ou actionnaires. Les règles relatives aux scissions transfrontalières s’appliquent aux sociétés italiennes participant à la scission avec une ou plusieurs sociétés d’un autre Etat membre.

Les règles applicables aux scissions transfrontalières présentent de nombreuses similitudes avec celles précédemment exposées pour les fusions transfrontalières, telle que l’élaboration d’un projet de scission dans lequel sont exposées toutes les informations et modalités requises par la loi, relatives à cette opération. À l’instar de la procédure applicable en matière de fusion, le projet de scission doit être déposé au registre italien des sociétés compétent à des fins de publicité.

Les parties prenantes à la scission bénéficient des mêmes droits que ceux reconnus dans le cadre d’une fusion transfrontalière. Les associés ou actionnaires, les salariés et les créanciers peuvent ainsi formuler des observations sur le projet de scission, dans les délais prévus par la loi. Les créanciers, en particulier, disposent également d’un délai de 90 jours pour former opposition, s’ils estiment que l’opération porte atteinte à leurs intérêts.

Par ailleurs, les organes de gestion doivent établir deux rapports distincts : l’un à destination des associés ou actionnaires, l’autre à l’attention des salariés. Ces documents reprennent des informations similaires à celles exigées dans le cadre d’une fusion transfrontalière, notamment les conséquences juridiques et économiques de l’opération ainsi que les informations spécifiques à l’attention des salariés.

La scission transfrontalière est par ailleurs soumise aux mêmes formalités que celles relatives à la fusion, telles que l’obtention d’une attestation préalable certifiant le bon accomplissement des actes et formalités préalables à la réalisation de la scission, ou encore la constatation par acte authentique de l’opération au moment de sa réalisation.

 

 

La transformation transfrontalière ou le transfert du siège d’un Etat à l’autre

La transformation transfrontalière est l’opération par laquelle une société transfère son siège social vers un autre État membre de l’Union européenne, en adoptant une forme juridique prévue par la législation de cet État, sans dissolution ni mise en liquidation, et tout en conservant sa personnalité juridique.

Tout comme les fusions et scissions transfrontalières, la transformation s’accompagne de formalités spécifiques prévues par la législation italienne. Elle suppose notamment l’élaboration, par l’organe de gestion, d’un projet de transformation exposant les principales caractéristiques de l’opération envisagée. Ce projet doit être publié au registre italien des sociétés à des fins de publicité. La transformation doit ensuite être approuvée par une décision des associés ou des actionnaires.

L’organe de gestion est également tenu de rédiger un rapport à destination des associés ou actionnaires, ainsi qu’un rapport distinct destiné aux salariés, présentant les justifications de l’opération, ses conséquences juridiques, économiques et sociales.

Enfin, le dépôt du projet au registre italien des sociétés ouvre un délai de 90 jours pendant lequel les créanciers peuvent former opposition, comme pour les fusions et scissions transfrontalières, et comme pour les opérations de fusion et de scission, le notaire doit délivrer une attestation préalable certifiant le bon accomplissement des actes et formalités, et constater la transformation par acte authentique.

 

 

Les nouveautés introduites par le Décret Législatif n. 88/2025 du 19 juin 2025

Outre des clarifications d’interprétation, l'une des principales nouveautés introduites par le Décret Législatif n. 88/2025 du 19 juin 2025 réside dans l’élargissement du champ d'application de la réglementation relative aux opérations de transformation, fusion et scission transfrontalières. Désormais, ces règles s’appliquent également aux sociétés de personnes et aux entités qui ne sont pas constituées sous la forme de sociétés, et ce indépendamment de la présence de sociétés de capitaux parmi les parties concernées, ainsi qu’aux opérations impliquant des sociétés établies en dehors de l’Union européenne.

De nouvelles dispositions renforcent par ailleurs le contrôle de la légalité des opérations donnant naissance à des sociétés de droit italien, notamment par l’élargissement du rôle attribué au notaire.

Afin de simplifier les formalités au cours des opérations, une procédure permettant l’intégration de documents et l’ajout d’informations manquantes nécessaires à l’inscription au registre italien des sociétés a également été introduite.

Ces nouvelles règles s’appliquent aux opérations transfrontalières et internationales dont le projet de fusion, de scission, ou de transformation, n’a pas encore été publié au registre italien des sociétés au 8 juillet 2025.

Quentin Boury

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