Le placement dans les œuvres d’art attire de plus en plus tant les investisseurs individuels que les entreprises. Pour autant, le marché présente des complexités et des risques impliquant de nombreuses questions fiscales et juridiques. Aussi, avant d’acheter une œuvre d’art en Italie, pays qui jouit d’une règlementation très nationaliste en la matière, il convient de se conformer à plusieurs vérifications préalables.
Le placement dans les œuvres d’art attire de plus en plus d’investisseurs individuels fortunés dans un contexte de taux d’intérêts déprimés et d’incertitude des marchés boursiers, mais aussi les entreprises qui entendent renforcer leur identité de marque, par la structuration de collections d’entreprise.
Le marché de l’art, qui au cours de ces dernières années a accru sa rentabilité, est aujourd’hui fortement globalisé et présente des complexités et des risques liés aux spécificités de son objet, des parties prenantes du secteur (artistes, collectionneurs privés, marchands d’art, maisons de ventes aux enchères et commissaires-priseurs, galeries, fondations, experts) et de la règlementation qui le régit.
L’Italie, un pays source
L’Italie fait partie des « pays sources », caractérisés par la présence d’une offre de biens artistiques supérieure à la demande et par l’existence d’une règlementation très nationaliste, historiquement vouée à préserver le patrimoine culturel du pays.
De nombreuses questions juridiques et fiscales se posent dans le secteur de l’art. Parmi elles, la reconnaissance des œuvres d’art et le rôle des fondations, la vérification de l’authenticité, les questions de droit d’auteur, les exportations et les importations, les prêts et les questions liées au transport et aux assurances, ou encore la transmission des collections.
Les problématiques les plus fréquentes dans les transactions du marché de l’art intéressent notamment la circulation internationale des œuvres ainsi que la fiscalité applicable à leur transfert.
La circulation internationale des œuvres d’art
Le code italien des biens culturels (D.Lgs. n° 42/2004), en fonction de l’intérêt culturel de l’œuvre et de sa valeur, prévoit soit l’interdiction pure et simple de l’exportation, soit un régime d’autorisation, soit un principe de liberté de circulation lorsque les œuvres ont eu valeur modique.
Ainsi, afin de préserver l’intégrité du patrimoine culturel de la nation, les biens qualifiés comme culturels font l’objet d’une interdiction absolue d’exportation permanente. On fait référence aux :
- biens meubles appartenant à l’État (et autres entités publiques), aux personnes morales privées sans but lucratif, présentant un (simple) intérêt artistique, historique, archéologique ou ethno-anthropologique, ayant été réalisés par un auteur mort et dont la réalisation date de plus de 70 ans ;
- biens meubles objet de propriété privée réalisés par un auteur mort et dont la réalisation date de plus de 70 ans dès lors que ces œuvres ont été reconnues comme présentant un intérêt culturel particulier (en jargon, « signifiés ») ainsi que les œuvres datant d’entre 50 et 70 ans, en cas d’intérêt exceptionnel pour l’intégrité du patrimoine culturel de la nation.
Un régime d’autorisation préalable est en revanche prévu pour la sortie définitive du territoire des œuvres présentant un intérêt culturel « simple », c’est à dire ni particulier, ni exceptionnel, d’un auteur mort et dont la réalisation date de plus de 70 ans d’une valeur supérieure à 13.500 euros.
Le transfert des œuvres hors UE nécessitera donc l’émission d’un certificat de libre circulation ainsi que d’une licence d’exportation.
Enfin, une simple auto-certification est suffisante pour l’exportation permanente d’œuvres d’auteurs morts, dont la réalisation date de plus de 70 ans et dont la valeur est inférieure à 13.500 euros. Il en est de même pour les œuvres d’auteurs vivants, dont la réalisation ne date pas de plus que 70 ans.
La violation des règles relatives à la circulation internationale des œuvres d’art est soumise à une sanction administrative pécuniaire allant de 77,50 à 465,00 euros, à l’emprisonnement de 1 à 4 ans et à une amende de 258,00 à 5.165,00 euros.
Achat d’œuvre en art en Italie
En cas d’achat d’une œuvre d’art en Italie, il est donc important de procéder à des vérifications préliminaires au vu desdites restrictions à la circulation, notamment en ce qui concerne les œuvres assujetties à la déclaration d’intérêt culturel, qui sont également soumises à des restrictions supplémentaires (droit de préemption de l’Etat en cas de vente ; obligation de communication des éventuels déplacements de l’œuvre ; autorisation préalable pour la restauration).
Imposition des transferts d’œuvres d’art
Le produit de la vente d’une œuvre d’art est imposable :
- au titre du revenu d’entreprise (art. 55 TUIR) pour les marchands d’art (investisseurs habituels et professionnels);
- au titre des revenus divers (art. 67, al. 1, lettre i), TUIR) en cas de spéculateur occasionnel.
Si le collectionneur privé n’est soumis à aucune imposition, un régime spécifique est toutefois prévu en matière de succession et donation.
Les opérations de transfert par succession ou donation de biens reconnus comme présentant un intérêt culturel sont exonérées d’impôts.
Pour les autres œuvres sans intérêt culturel reconnus, des franchises et des droits s’appliquent toutefois, selon un barème variable et en fonction du degré de parenté.
Concernant la TVA, les ventes d’œuvres d’art sur le territoire italien par des opérateurs professionnels sont soumises à un taux de 10% pour les ventes effectuées directement par l’auteur de l’œuvre (ses héritiers ou légataires) et à un taux de 22 % en cas de ventes par d’autres personnes.
Le commerce des œuvres d’art bénéficie par ailleurs d’un taux de TVA réduit de 10% sur les importations. De quoi favoriser les achats à l’étranger au détriment du marché italien.
Le marché de l’art italien présente donc des particularités juridiques et fiscales sujettes à approfondissement avec l’assistance de consultants spécialisés afin de bien planifier les opérations d’investissement et appréhender dans toutes leurs implications les opportunités du marché.
En collaboration avec Nicola Lattanzi, Avocat au Barreau de Milan – Pirola Pennuto Zei & Associati