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Couvre-feu dans le monde : vraie solution ou cache misère ?

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Écrit par Némo Empis
Publié le 15 octobre 2020, mis à jour le 19 octobre 2020

Annoncé par Emmanuel Macron, le couvre-feu est en vigueur depuis samedi 17 octobre à Paris et dans huit autres métropoles de l’Hexagone. Mais cette solution est-elle vraiment efficace ? A-t-elle déjà fait ses preuves à l’étranger ? Tour d’horizon des différents couvre-feux à travers le monde.

Alors que l’ombre d’une deuxième vague se dresse sur la France, Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d’un couvre-feu applicable à partir de samedi 17 octobre à minuit. En plus de l’Ile-de-France, huit autres métropoles (Grenoble, Lille, Lyon, Aix-Marseille, Rouen, Saint-Étienne et Toulouse) devront se plier aux principales mesures dévoilées par le chef de l’État. Sans dérogation, il sera impossible de circuler dans ces villes de 21h à 6h du matin, sous peine d’une amende de 135 euros.

Un couvre-feu déjà expérimenté en France

Si la ville de Nice avait été l’une des premières à instaurer un couvre-feu après le confinement, c’est tout un département français - la Guyane - qui y est confronté depuis le mois de mai voire le mois de mars dans certaines villes comme Cayenne. Pour le Président de la République, le territoire ultramarin doit servir d’exemple pour la France métropolitaine. Sur le bilan comptable, le nombre de cas et de morts liés à la Covid-19 est nettement en baisse. Reste à connaître l’impact du couvre-feu sur cette diminution. Bien qu’il semble difficile à déterminer précisément, une étude basée sur les chiffres de l’Institut Pasteur démontre que le couvre-feu guyanais a permis de réduire de 36% le taux de transmission du virus. Une mesure qui aurait donc porté ses fruits outre-Atlantique.

Une mesure efficace ?

À l’instar de la Guyane, certaines régions du monde comme l’état du Victoria en Australie avaient opté pour un couvre-feu pour lutter contre la propagation du virus. Après quasiment deux mois de restriction, le Premier ministre de l’état - dont la capitale est Melbourne - a décidé de lever la mesure une fois que le nombre de cas était passé en dessous des 50 par jour et cela pendant deux semaines. Ce couvre-feu faisait d'ailleurs partie intégrante de tout un arsenal de mesures mises en place comme la limite de déplacement à cinq kilomètres autour du domicile, les magasins fermés, ou encore l'interdiction de contacts avec familles et amis. Néanmoins la métropole de Melbourne demeure totalement confinée depuis le mois d'août. Concernant l'efficacité d'une mesure comme le couvre-feu, là encore il est difficile de l'estimer, toujours est-il que la situation semble s'améliorer dans cette zone du globe.

Faire face à la recrudescence

Fin juin, la Tunisie avait quasiment enrayé l’épidémie de Coronavirus. Dès lors, le pays avait rouvert ses frontières et la plupart des mesures de préventions étaient levées pour l’été. Un manque de vigilance qui a finalement coûté cher au pays du président Kais Saied, qui a vu les chiffres de contamination repartir de plus belle. Au 12 octobre, on dénombrait 512 morts de la maladie contre une cinquantaine seulement, fin juin. Pour contrer cette recrudescence, le gouvernement tunisien a entrepris la mise en place d’un couvre-feu dans certaines régions. Depuis début octobre, c’est environ 10% de la population qui est soumis à ces nouvelles règles : interdiction de sortir de 21h à 5h du matin la semaine, de 19h à 5h du matin le week-end.

Chez nos voisins belges, deux provinces, celle du Brabant wallon et du Luxembourg ont également fait le choix de recourir à des couvre-feux avec des horaires plus souples, les habitants doivent rester chez eux de 1h à 6h du matin.

La première étape vers un reconfinement ?

Le mot était sur toutes les lèvres mercredi avant l’interview télévisée d’Emmanuel Macron : reconfinement ou pas ? Le chef de l’État a vite balayé la rumeur pour confirmer celle du couvre-feu selon les régions. Si la France devrait échapper à un deuxième épisode de confinement, certains n’ont pas pu l’éviter. Israel, un des premiers pays à avoir déclaré un couvre-feu dans une quarantaine de villes avait fini par reconfiner l’ensemble de la population, début septembre. On n’est donc pas à l’abri de nouvelles mesures dans les prochaines semaines, le système du couvre-feu pouvant également être adapté selon l’évolution de la situation sanitaire du pays.

Le contre pied de l’Allemagne, du Royaume-Uni et de l’Espagne

Le cap du couvre-feu n’a pas été franchi dans toute l’Europe, en Allemagne par exemple, on a décidé de mesures alternatives. Dans les grandes villes que sont Berlin, Cologne ou Francfort, pas d’obligation d’être chez soi à une certaine heure, en revanche les magasins, bars et restaurants sont contraints de fermer leurs portes à partir de 23h, une heure plus tôt à Francfort même. Un véritable coup dur économique pour les commerçants allemands, déjà fortement impactés par la crise. Au Royaume-Uni, même son de cloche : pas de couvre-feu mais des pubs fermés sur tout le territoire. Enfin en Espagne, Madrid et Barcelone ont également obligé leurs commerçants à fermer boutique pour une durée minimum de 15 jours.

Une population privée de liberté ?

Considéré comme liberticide, ce système de couvre-feu est contesté par la Ligue des droits de l’homme (LDH). Elle estime notamment que l’urgence sanitaire n’autorise pas tout. Pour empêcher de mettre en place ces couvre-feux, la LDH dépose régulièrement des requêtes en justice, elle avait échoué dans son combat face au maire de Nice, Christian Estrosi ayant publié un arrêté empêchant les déplacements des habitants de sa ville de 20h à 5h du matin après le confinement. Pour autant, la LDH n’est pas perdante à tous les coups, elle avait réussi à contrer le maire de Sanary-sur-Mer dans son envie d’interdire les gens de se déplacer au-delà de dix mètres de leur domicile.

Une dimension politique ?

Plus que des mesures sanitaires proposées pour endiguer la propagation du Coronavirus, certains voient en ce couvre-feu une manière de contrôler les populations. Une situation dénoncée aux États-Unis par exemple après les émeutes qui avaient suivi le meurtre de George Floyd par un policier. Nombre de citoyens américains avaient alors accusé les autorités d’avoir utilisé le prétexte de la Covid-19 pour installer un couvre-feu et ainsi calmer les manifestations du mouvement Black Lives Matter.