Mujeres Avenir met en lumière le rôle crucial des femmes dans le monde vitivinicole

De g. à d. : Mónica Guardado Rodríguez, DG de Afi Global Education, Verónica Fernández de Córdova, conseillère et associée de Marqués de Riscal, PDG de Valle Arcipreste, Murielle Trouilh, acheteuse de Grands Crus, Cristina Forner, présidente des Bodegas Marqués de Cáceres, Ana Muga, membre du conseil d’administration de Bodegas Muga, Magdalena Suárez, professeure de droit à l’Université Complutense et Beatriz Medina, Vice-Présidente de Mujeres Avenir.

La conférence, inaugurée par la vice-présidente Beatriz Medina, a réuni un panel d’expertes du secteur vitivinicole, composé de Cristina Forner, présidente des Bodegas Marqués de Cáceres, Ana Muga, membre du conseil d’administration de Bodegas Muga, et Murielle Trouilh, acheteuse de Grands Crus, sous la modération de Magdalena Suárez, professeure de droit à l’Université Complutense. Toutes ont eu une pensée émue pour Isabel Mijares, œnologue et membre historique de l'association, décédée l'an dernier. 

Lors de l'introduction des débats, Magdalena Suárez est revenue sur l'importance de penser des "territoires intelligents", à l'image du concept de "smart cities" développé dans l’ensemble de la société. Elle a évoqué le contexte préoccupant d’exode rural, de vieillissement et de masculinisation des campagnes espagnoles, un phénomène qui tend à affaiblir la présence féminine dans les zones non urbaines. Le monde vitivinicole apparaît, paradoxalement, comme un "îlot" de résistance où les femmes trouvent de plus en plus leur place, portées par une sensibilité, une passion et des compétences de plus en plus reconnues par la profession.

De fait, lors de leurs prises de parole, les intervenantes ont toutes souligné que le rôle des femmes dans le secteur vitivinicole constitue un modèle de réussite. La présence féminine et la consolidation du tissu entrepreneurial sur le territoire sont essentielles au développement social et économique ainsi qu’à la fixation des populations dans les différentes communautés.
 

30 % des propriétés vitivinicoles en Espagne appartiennent à des femmes

Cristina Forner a fait état de l’augmentation de la présence féminine dans le secteur : aujourd’hui, 30 % des propriétés vitivinicoles en Espagne appartiennent à des femmes. Elle a aussi souligné l’importance vitale du secteur pour les territoires : "Les vignobles ont une activité essentielle ; beaucoup de villages auraient disparu sans eux. En effet, dans les zones viticoles, la population a augmenté de 38,5 %, alors qu’elle a diminué de 9,10 % dans celles où il n’y a pas de vignes", a-t-elle rappellé. La présidente des Bodegas Marqués de Cáceres considère la vigne comme un moyen de maintenir la vie dans les villages et d’encourager la durabilité.
 

Pour autant, on l'imagine, les femmes ont dû lutter pour se faire une place dans le secteur. Et pas seulement lors des vendanges, où elles font preuve d'une habilité particulière, mais aussi au niveau des postes de direction et au sein des conseils d'administration. "Quand au début des années 80 j'ai franchi le pas de m'installer à Logroño depuis Paris, le choc culturel a été particulièrement important. Lors des premières réunions du conseil d'administration auxquelles j'ai été amenée à participer au sein des Bodegas Marqués de Cáceres, mon père me disait : 'surtout ne dis rien, contente-toi d'observer'. Avec le temps j'ai compris que c'était la meilleure façon de gagner ma place dans cet univers très masculin", se rappelle-t-elle, illustrant l'état d'esprit d'un secteur qui a largement évolué en 40 ans. 
 

Etudes œnologiques : les femmes plus nombreuses que les hommes

Et de mettre en avant le talent des femmes pour s’intégrer et former des équipes dès le début de leur carrière. Les débuts dans ce secteur sont difficiles pour les elles, a-t-elle reconnu, mais cet "art de vivre" constitue aussi un "choix de vie". Pour sa part, la Française Murielle Trouilh a souligné les avancées visibles en matière de gestion et de direction, avec une présence féminine croissante, notamment dans les études œnologiques où les femmes sont plus nombreuses que les hommes, tant en France qu’en Espagne, ce qui témoigne de leur intérêt pour la formation. Elle a expliqué le système tripartite français, dans lequel les châteaux – avec une forte présence féminine – vendent aux négociants -avec une faible présence féminine-, qui à leur tour vendent au public.

Importance des pratiques durables

Les critères de "durabilité" sont-ils impulsés par une présence plus féminine dans le secteur ?  Murielle Trouilh a en tous cas souligné l’importance des pratiques durables, particulièrement demandées par les jeunes générations, et plus encore par les femmes, qui souhaitent des vins "propres", sans produits polluants. Pour elle, "l’éducation est la clé", même si cela prend du temps et reste complexe. La durabilité concerne aussi le maintien des traditions. Ana Muga a précisé que "notre marque de fabrique est notre propre tonnellerie, depuis 1932". Ces fûts ont reçu de nombreuses distinctions, tout comme son vignoble, récompensé en 2021 par le prix des "gardiens du paysage". Cristina Forner a défendu le maintien des ceps les plus anciens, "moins rentables mais garants de la qualité du vignoble". "Le vin, c’est de la culture […] une fois qu’on connaît l’histoire et la tradition d’un domaine, on en tombe amoureux", a confirmé Ana Muga. L'entrepreneuse a aussi attiré l’attention sur le problème du décès des agriculteurs et du manque de relève générationnelle, appelant les jeunes –et particulièrement les femmes– à considérer ce secteur, en soulignant leur sensibilité, leur passion et leur délicatesse lors des vendanges. 

Verónica Fernández de Córdova, conseillère et associée de Marqués de Riscal, PDG de Valle Arcipreste et membre du conseil consultatif de Mujeres Avenir, a clôturé l’événement en soulignant les progrès réalisés ces dernières années par les femmes dans le secteur vitivinicole.