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VRAI/FAUX – Les horaires de travail espagnols sont-ils les pires d’Europe?

une personne qui bâilleune personne qui bâille
Sammy Williams
Écrit par Perrine Laffon
Publié le 14 février 2022, mis à jour le 21 décembre 2023

En Europe, les Espagnols diffèrent particulièrement des autres pays pour l'une de leurs coutumes quotidiennes : leurs horaires de travail. En effet, le rythme à l'espagnole est décalé par rapport aux autres pays voisins. Le sujet de l'adaptation des horaires, mainte fois débattu dans la société comme sur les bancs du Congrès des députés, divise toujours les avis. Lepetitjournal.com se penche sur le planning espagnol et démêlé le vrai du faux.

 

En Espagne, la loi stipule que la durée du travail ne doit pas dépasser les 40 heures hebdomadaires et les 9 heures quotidiennes. Bien que chaque secteur d'activité et chaque poste peut couvrir des horaires totalement différents, on peut dire qu'une journée de travail avec des horaires "classiques" s'organise donc de la façon suivante : début de la journée de travail à 8h ou 9h, pause petit-déjeuner/casse-croute à 10h30 ou 11h, pause-repas de 14h à 16h et fin du travail à 19h ou 20h. Des horaires considérés comme contre-productifs et inadaptés à la réalité du travail par bon nombre de personnes. Ont-ils raison ?

Les Espagnols travaillent plus que les autres

FAUX. Selon l'OCDE, l'Espagne se situe dans la moyenne européenne en ce qui concerne le nombre d'heures de travail : 1.686 heures par travailleur et par an au cours de l'année 2019. Un volume horaire comparable à ceux du Canada (1.670 heures), de l'Italie (1.718) ou du Portugal (1.719). Loin devant l'Allemagne, les Pays-Bas et la France, où l'on travaille respectivement 1.386, 1.434 et 1.505 heures par an en moyenne.

Les pauses repas sont plus longues en Espagne

VRAI. Alors que les pauses-déjeuner ne durent pas plus de 30 minutes à partir de midi en France, en Allemagne ou en Suède, on estime en moyenne à une heure et demi voire deux heures, de 14h à 16h, la durée de la pause consacrée au repas en Espagne. Cette pause est représentative du style de vie espagnol, avec un véritable temps de repos au milieu de la journée de travail. Mais ce type de pauses-déjeuner a tendance à rallonger les journées de travail ainsi que l'heure du retour à la maison des travailleurs ibériques. De plus en plus de voix s'élèvent au sein de la société pour la réduire et ainsi gommer le décalage horaire existant avec les autres pays européens.

Les horaires de travail espagnols favorisent la productivité

FAUX. Si les Espagnols travaillent plus que dans la grande majorité des pays de l'Union Européenne, ils font en revanche partie des moins productifs. En effet, d'après la dernière analyse de l'agence statistique de l'Union Européenne Eurostat, la productivité horaire des Espagnols s'établit à 21,80 euros par travailleur, loin derrière la Belgique ou le Danemark avec respectivement 40,50 et 44,70 euros. La productivité horaire espagnole est plus faible que celle de plusieurs pays européens dans lesquels la durée légale du travail est inférieure à celle en vigueur en Espagne. Un paradoxe qui pourrait s'expliquer d'une part par le phénomène de "présentisme" (ou l'impression de travailler plus si l'on reste sur son lieu de travail plus longtemps), et d'autre part à cause de ces horaires espagnols et de leur pause déjeuner trop longue, qui partagent la journée en deux et rend moins productif.

Ces horaires sont dus à la traditionnelle sieste en début d'après-midi

ARCHI FAUX. Tout d'abord, très peu de gens qui travaillent font une sieste au quotidien (sauf en été, éventuellement). La réalité se trouve dans l'histoire contemporaine du pays : après la Guerre Civile, l'Espagne est dirigée par le General Franco. Durant la Seconde Guerre Mondiale, ce dernier décide de se calquer sur l'heure allemande, supérieure d'une heure au méridien de Greenwich, le fuseau horaire utilisé par la grande majorité des pays de la zone. À cela s'ajoutent les conditions de vies, misérables pour une grande partie de la population, et l'interdiction de travailler pour les femmes, qui poussent les hommes à cumuler plusieurs emplois. La pause de 14 à 16h est donc à l'époque synonyme de repos vital entre le travail de jour et le travail de nuit et cette habitude s'est peu à peu installée dans la population, jusqu'à devenir la norme à l'heure actuelle.

Ces horaires ont un mauvais impact sur la santé

VRAI. Ce décalage horaire se répercute également dans l'heure du coucher : les horaires de travail étant décalés, les Espagnols sortent plus tard, réalisent leurs activités sportives ou sociales plus tard, et se couchent souvent après minuit en semaine. Les Espagnols dorment une heure et demi de moins, en moyenne, que leurs voisins européens. Et la fatigue accumulée par le métabolisme humain à cause de ces heures tardives nuit à la fois à la santé et à l'efficacité pendant la journée de travail.

L'Espagne est prête à adapter ses horaires

FAUX. Plusieurs partis politiques ont relancé plusieurs fois le sujet pour tenter de modifier les horaires de travail espagnols pour les calquer sur ceux des autres pays européens, afin de faciliter les échanges, la productivité et le commerce extérieur. Mais à fin 2021, la débat sur quels horaires conviendrait le mieux à l'Espagne a finalement été encore reporté, cette fois à cause de la pandémie de coronavirus qui a accaparé toutes les prises de décisions. 

La population espagnole est en faveur d'un changement d'horaire

VRAI et FAUX. Selon une enquête réalisée par la Commission européenne en 2018, 84% des 4,6 millions habitants interrogés aimeraient avoir un horaire unique, qui éviterait de changer d'heure deux fois par an à l'automne et au printemps. Le soutien s'élèverait à 93% pour les Espagnol : mais s'ils sont d'accord pour adopter un horaire fixe tout l'année, ils ne sont pas d'accord en revanche sur l'horaire à adopter : une grande majorité de la population souhaiterait conserver uniquement l'horaire d'été. Or, l'application de cet horaire durant les douze mois de l'année éloignerait encore davantage la journée de travail espagnole de celle de ses voisins européens.