On n'a jamais autant entendu parler d'un sommet de l'OTAN. Et pour cause. La réunion qui aura lieu à Madrid a soudainement pris une dimension historique, que le gouvernement espagnol est bien décidé à exploiter.
Il reste encore un mois et demi avant le prochain sommet de l'Alliance Atlantique, et les journaux ne parlent pourtant que de ça. Les chefs d'État et de gouvernement de l'OTAN se réuniront à Madrid les 29 et 30 juin prochain. Le pays n'est pas un hasard, il s'agissait de célébrer par la même occasion le 40e anniversaire du début du processus d'adhésion de l'Espagne à l'OTAN.
Faible contribution de l'Espagne...
Lorsque l'OTAN a choisi l'Espagne, c'était aussi pour remercier le pays pour sa contribution à la sécurité collective. "L'Espagne est un allié précieux", avait déclaré à l'époque le Secrétaire général Jens Stoltenberg. Pourtant, l'Espagne n'a dépensé que 1,03 % du PIB pour la défense en 2021. Il s'agit du pays qui dépense le moins dans toute l'Alliance après le Luxembourg, bien loin de la promesse d'atteindre 2% d'ici 2024.
C'est d'ailleurs pour cette raison, que le président Pedro Sánchez a affirmé qu'il fera tout pour atteindre l'objectif des 2% d'ici 2024. Or, depuis son arrivée au pouvoir, l'Espagne est à peine passée de 0,93% du PIB à 1,03%.
... mais forte présence dans les missions internationales
Certes, l'Espagne ne dépense pas encore ce qu'elle devrait, mais sa contribution à l'OTAN est notable. Le pays est par exemple présent dans les missions les plus importantes, de la Lettonie à la Turquie en passant par la Méditerranée, pour la formation de troupes en Irak et en Afghanistan et le renforcement immédiat du contingent allié par des navires après l'invasion de l'Ukraine.
Ce sommet de l'OTAN, initialement prévu pour 2020 est une chance pour l'Espagne, car aujourd'hui, pour des raisons évidentes, il est encore plus pertinent et a soudainement pris une dimension historique. La guerre en Ukraine a en effet modifié l'échiquier, les perspectives et les priorités.
La Finlande et la Suède, candidats à l'adhésion
En effet, après des décennies de neutralité militaire supposée - voire imposée -, la Finlande et la Suède ont officiellement annoncé leur intention de rejoindre l'OTAN. Les premiers ministres suédois et finlandais, Magdalena Andersson et Sanna Marin, seront donc présents en tant que candidats à l'adhésion. C'est donc une première pour ce sommet de l'OTAN qui portera à jamais le nom de Madrid.
Zelenski pourrait également être présent
Et si les plans du gouvernement espagnol se concrétisent, Pedro Sánchez recevra également l'Ukrainien Volódimir Zelenski à Madrid. Le président ukrainien viendrait en tant qu'invité des 30 pays alliés, si les "conditions de sécurité" rendent possible sa présence, ce qui n'est pas gagné... En effet, tout dépendra de l'évolution de la guerre, sans parler des risques de la logistique de l'aller et du retour.
Zelenski s'était déjà exprimé en visioconférence, lors de la dernière réunion extraordinaire de l'Alliance à Bruxelles le 24 mars, un mois tout juste après le début de l'invasion russe, et avait demandé un soutien militaire accru. Cela fait des années, après l'effondrement de l'URSS et l'indépendance de l'Ukraine en 1991, que les différents gouvernements de Kiev avaient exprimé leur désir de rejoindre l'Alliance atlantique.
Mais la division au sein de l'UE-27 est grande et il est clair que "l'adhésion à l'OTAN n'est pas sur la table", souligne des sources gouvernementales. Cependant, la présence de Zelenski à ce sommet de l'OTAN à Madrid serait "un symbole d'engagement" et de défense des "valeurs communes de démocratie, de liberté et de droits de l'homme". Ce serait aussi une excellente nouvelle pour l'image de l'Espagne et de son président Pedro Sanchez.
Sommet de l'OTAN: signature du "concept stratégique"
Avec deux ans de retard en raison de la pandémie, le sommet de l'OTAN qui se tiendra à Madrid fin juin 2022 approuvera un document essentiel pour les 30 - et bientôt 32 - États membres, le "concept stratégique". Il s'agit du catalogue qui permettra d'évaluer le nouvel environnement géopolitique et de sécurité de l'Alliance et de définir l'orientation générale de l'OTAN jusqu'en 2030.
Les cinq défis de l'OTAN jusqu'en 2030
Les cinq défis à développer dans le concept stratégique 2022 de l'OTAN sont, premièrement, une résurgence de la "rivalité systémique entre grandes puissances"; deuxièmement, l'intensification des phénomènes de "guerre hybride", tels que la désinformation ou l'utilisation de données volées par l'espionnage numérique; troisièmement, la croissance de la "guerre par procuration", c'est-à-dire par des tiers ou des intermédiaires; quatrièmement, la "propagation transfrontalière du terrorisme djihadiste international"; et cinquièmement, l'évolution des "technologies perturbatrices et émergentes", qui augmentent la vitesse de prise de décision, comme l'informatique quantique. Tout un programme.