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Vers une détérioration des relations sino-britanniques ?

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Chuttersnap Aku - Unsplash
Écrit par Benjamin Wettling
Publié le 20 juillet 2020, mis à jour le 21 juillet 2020

Dominic Raab a dénoncé ce dimanche 19 juillet les « atteintes graves et choquantes aux droits de l’homme » perpétrées par la Chine à l’encontre des Ouïghours, minorité ethnique du Xinjiang.

Ce n’est pas la première fois que le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères et du Commonwealth s’en prend publiquement à la République Populaire de Chine. C’était déjà le cas le mois dernier, lorsque Dominic Raab avait accusé la Chine de « violer l’autonomie et les libertés du peuple de Hong- Kong », affichant ouvertement par la même occasion son soutien à la ville de Hong-Kong, allant même jusqu’à offrir aux habitants nés avant l’année de la rétrocession de les accueillir sur le territoire britannique. Une sortie qui avait fortement irrité les autorités chinoises et fragilisé les relations entre Londres et Pékin, déjà tendues depuis la remise en cause de la gestion chinoise de la crise en avril dernier.

C’est donc dans ce contexte troublé que Dominic Raab a accusé la Chine de commettre des « atteintes graves et choquantes aux droits de l’homme ». Le chef de la diplomatie britannique reproche à la Chine d’avoir fait interner jusqu’à un million de musulmans Ouïghours dans des « camps de rééducation ». Il a également parlé de « stérilisations forcées » qui seraient pratiquées au sein de ces « camps de rééducation », avant d’ajouter que cela rappelle « quelque chose que nous n’avons pas vu depuis très longtemps, et cela de la part d’un membre de premier plan de la communauté internationale qui n’a de cesse de vouloir être pris au sérieux. Nous voulons une relation sérieuse avec la Chine, mais nous ne pouvons voir un tel comportement sans le dénoncer ».

L’ambassadeur de Chine au Royaume-Uni, Liu Xiaoming, a tenu à répondre au Premier secrétaire d’Etat : « Il n’y a pas de stérilisations forcées des Ouïghours. Il n’y a pas de camps de rééducation dans le Xinjiang. (…) Ce n’est pas la politique du gouvernement. (…) La Chine considère tous les groupes ethniques de la même manière ». Confronté sur le plateau de la BBC à une vidéo montrant des prisonniers menottés et masqués montant dans un train, l’ambassadeur de Chine a expliqué qu’il s’agissait de « transferts de prisonniers », et a démenti les accusations de nettoyage ethnique dans la province du Xinjiang.

Relations sino-britanniques : De l’âge d’or aux menaces

C’était il y a 5 ans. La visite officielle du président Xi Jinping au Royaume-Uni, accueilli par un David Cameron enjoué, marquait selon les mots même du Premier ministre de l’époque un « âge d’or » des relations diplomatiques entre le Royaume-Uni et la République Populaire de Chine. Faisant table rase du passé, l’amitié sino-britannique faisait fi des rancœurs du passé pour construire ensemble un avenir radieux. Quelques années et quelques gouvernements plus tard, cet « âge d’or » semble plus révolu que jamais, et a laissé la place aux menaces. À l’instar des Etats-Unis d’Amérique, qui ont pris des sanctions à l’encontre de la Chine, le gouvernement britannique envisage lui aussi de prendre des « mesures supplémentaires », à la fois au sujet de Hong-Kong et des Ouïghours. Et comme pour les Etats-Unis, la Chine a promis de répondre de manière « résolue ».

Une nouvelle passe d’arme qui entérine définitivement le changement qui s’opère sur l’échiquier géopolitique mondial, et qui oppose Washington et Londres à Beijing. Il y a quelques jours, le Royaume-Uni faisait le choix fort de bannir l’équipementier chinois Huawei de son réseau 5G, à la demande des Etats-Unis. En effet, la 5 ème génération de réseau mobile est un enjeu majeur pour les deux pays, qui se livrent une véritable « guerre technologique et commerciale » pour le leadership mondial de cette nouvelle technologie. Une guerre pour la 5G entre les Etats-Unis et la Chine, qui prend son ancrage sur le plan des relations internationales aussi bien en termes de sécurité que de puissance. Des enjeux géopolitiques forts, qui ont pour conséquence une véritable polarisation du globe autour de la 5G, entre le bloc américain et le bloc chinois. Si l’Union Européenne reste mesurée à l’image de la France qui tente de mener une politique de conciliation tout en protégeant la sécurité de son réseau, depuis le Brexit le Royaume-Uni semble suivre une autre direction. À cet égard aucun doute que Londres a fait son choix…

Dans ce contexte, dur de ne pas y voir l’influence de la « special relationship » si chère aux Britanniques et aux Américains, privilégiée au détriment des relations diplomatiques entre la Chine et le Royaume-Uni. Un choix fort, qui s’exprime depuis plusieurs semaines déjà, et qui devrait continuer à dicter la politique étrangère britannique dans un futur proche, notamment lors de l’annonce à venir des possibles sanctions prises par le Royaume-Uni à l’encontre de la Chine.

 

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