Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

Efficacité vaccinale : un enjeu crucial pour une vie plus normale

Plusieurs dizaines de personnes s'amusent en faisant la fêtePlusieurs dizaines de personnes s'amusent en faisant la fête
Samantha Gades - Unsplash
Écrit par Colin Porhel
Publié le 29 avril 2021, mis à jour le 30 avril 2021

Si un adulte sur cinq a désormais reçu les deux doses de vaccin au Royaume-Uni, des zones d’ombre persistent quant à l’immunité réelle garantie par la vaccination. Les docteures Sophie Batut et Mathilde Konczynski, toutes deux médecins au Medicare français de Londres, ont accepté de revenir sur ces interrogations.

 

D’après les données dont nous disposons à ce jour, l’efficacité des différents vaccins oscille entre 62 % et 95 %. À partir de quel taux un vaccin est-il considéré comme bénéfique ?

Chaque maladie dispose de son propre seuil d’efficacité. En ce qui concerne le Covid-19, un consensus international l’a fixé à 50 %. Afin de déterminer si un vaccin est suffisamment efficace pour le distribuer au sein des différents pays, les corps scientifiques comparent, sur une même période et à conditions équivalentes, le nombre d’infections observées sur un échantillon de 30 000 à 60 000 patients vaccinés avec le nombre de cas dans un groupe de même taille, mais n’ayant pas été soumis à la vaccination.

 

Comment les taux d’efficacité des vaccins contre le Covid-19 se situent-ils par rapport à ceux d’autres maladies ?

À titre de comparaison, le vaccin contre la rougeole est efficace entre 97 % et 98 %. Celui de la grippe oscille entre 40 % et 60 %. De son côté, le sérum élaboré par le laboratoire Pfizer possède un taux d’efficacité initial de l’ordre de 95 %.

 

Dans un commentaire d’article publié sur The Lancet, Viola Priesemann, une physicienne allemande, ainsi que Sebastian Contreras, estiment que la vaccination à elle seule ne permettra pas d’éviter de nouvelles vagues de contaminations. Qu’en pensez-vous ?

Effectivement, le risque d’un rebond épidémique dû aux variants qui échapperaient potentiellement aux vaccins demeure bien réel. Néanmoins, nous disposons d’encore trop peu de données fiables sur la limitation de la transmission grâce aux vaccins, malgré des premiers chiffres encourageants.

 

De nombreux variants (brésilien, anglais, sud-africain, californien, breton…) sont apparus depuis le début de la crise, et d’autres risquent encore de se manifester. Est-il envisageable de devoir se faire vacciner plusieurs fois pour pouvoir faire face à tous ces variants ?

Oui, bien sûr. À court terme, nous pourrions prendre exemple sur le modèle de la grippe saisonnière en adaptant les vaccins aux nouveaux variants. Cependant, sur le long terme, le coronavirus semble plus stable et moins propice aux mutations que le virus de la grippe. Par-delà la phase pandémique, l’apparition de nouveaux variants sera sans doute moins fréquente qu’à l’heure actuelle.

 

Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur, a déclaré que l’Europe pourrait atteindre l’immunité collective grâce au vaccin dès le 14 juillet. Au Royaume-Uni, la campagne de vaccination avance encore plus rapidement. Atteindre prochainement ce niveau de protection est-il réaliste ?

Oui, si la vaccination continue de bien progresser partout -ce qui est loin d’être le cas-, et si les gestes barrières restent respectés. Plusieurs obstacles se dressent néanmoins devant la possibilité d’atteindre l’immunité collective, parmi lesquels les problèmes de stocks de vaccins, l’incertitude liée aux variants, à l’immunité post-vaccinale et à la maîtrise potentielle de la transmission grâce aux vaccins. Sans omettre les changements de comportement des populations vaccinées et la disparition des gestes barrières lors du retour à une vie plus normale.

 

Pour le moment, aussi bien le Royaume-Uni que la France ne prévoient pas de calendrier vaccinal pour les mineurs. Comment cette décision peut-elle retarder l’atteinte de l’immunité collective ?

Les enfants, en particulier ceux âgés de moins de 12 ans, sont moins contaminés, moins contaminants et moins malades. Les différentes études n’arrivent pour le moment pas à expliquer clairement ce phénomène. Grâce à cette faible capacité à transmettre le virus, le fait que cette population ne soit pas vaccinée n'aura finalement que peu d’impact sur l’immunité collective.

 

La durée de protection reste une donnée cruciale pour envisager un retour à une vie plus normale. Comment évoluent les recherches sur cette question ?

La durée de protection des vaccins reste incertaine. Nous attendons de disposer de suffisamment de recul et de données intrinsèques à la vaccination pour connaître la réponse à cette question. Les scientifiques développent actuellement des modèles prédictifs pour guider la recherche et les campagnes de santé publique. Pfizer et Moderna ont publié des résultats montrant une protection au-delà de 90% à 6 mois, et ces recherches continuent.

 

Passée la durée de protection procurée par un vaccin, est-ce que la mémoire immunitaire fonctionne toujours, même dans une moindre mesure ?

La protection contre les formes sévères du Covid-19 semble assez importante dans le temps, alors que celle contre l’infection au Covid-19 s’estompe plus rapidement. La durée de protection dépend aussi beaucoup des variants présents dans la population.

 

Adapter les vaccins contre le Covid-19 chaque année, à l’image de ce qui est fait pour le virus de la grippe, vous paraît-il envisageable ?

Oui, il est probable que nous nous devrons d’adapter les vaccins régulièrement en fonction de l’évolution des variants, comme nous le faisons pour la grippe, afin de maintenir une protection suffisante contre les variants en circulation à ce moment-là. Il est d’ailleurs déjà question d’une éventuelle troisième injection à l’automne.