La justice britannique a refusé hier la demande d’extradition de Julian Assange émise par les États-Unis. Mais des recours sont encore possibles et la décision ne garantie pas encore à Assange d’être sorti d’affaire.
C’est une décision historique qu’a rendue hier lundi 4 janvier la juge Vanessa Baraister à Londres. Le fondateur de Wikileaks, Julian Assange, emprisonné au Royaume-Uni depuis deux ans après avoir été en exil sept années entre les murs de l’ambassade d'Equateur risque toujours jusqu’à 175 ans de prison de l’autre côté de l’Atlantique. Il est accusé d’espionnage et de piratage informatique pour avoir publié entre 2010 et 2011 des centaines de milliers de documents confidentiels à l’égard de certaines opérations militaires américaines ainsi que sur leurs services diplomatiques.
Pas de remise en cause des accusation américaines
C’est donc une première victoire pour le camp Assange mais celle-ci reste quelque peu amer. En effet, aucun des arguments avancés par les États-Unis pour réclamer l’extradition d’Assange n’a été contesté. Vanessa Baraister a d’ailleurs commencé l’audience par réfuter un par un l’ensemble des arguments de la défense, laissant craindre une issue défavorable au camp Assange. Selon elle, Julian Assange est allé « au-delà » de la simple activité journalistique. Il aurait notamment mis en danger certains individus travaillant pour le comptes des Etats-Unis au Moyen-Orient en n’expurgeant pas leurs noms des documents publiés, accusation totalement rejetée par la défense. Elle considère également que dans l’hypothèse d’un procès aux États-Unis, les droits fondamentaux de Julian Assange seraient garantis.
C’est donc uniquement sur des bases sanitaires que la juge motive sa décision. L’ONG Freedom of the Press Foundation considère d’ailleurs que l’affaire n’a pas été jugée « sur le fondement même des libertés de la presse ».
Julian Assange souffre en effet de grandes fragilités psychologiques, notamment une dépression sévère et des tendances suicidaires. Un état psychologique lié à la décennie d’enfermement qu’il a subie. Un transfert vers une prison de haute sécurité aux États-Unis, dans laquelle des mesures spéciales restreindraient encore davantage les contacts avec ses proches, ce qui serait donc préjudiciable à son état de santé. Sa compagne et avocate a comparé pareille décision au fait de « l’enterrer vivant ». La juge a donc considéré qu’il serait en capacité de contourner les mesures de surveillance pour se donner la mort. Un bien triste tableau au final qui a constitué l’unique socle de cette décision de justice. S’il faut se réjouir de cette première victoire, difficile de se satisfaire du fait que, si Assange avait été en bonne santé, il aurait été extradé. Son équipe d’avocats se dit néanmoins « extrêmement satisfaite ».
Les États-Unis font appel, le Mexique propose l’asile
La partie américaine a tout de suite fait savoir qu’elle allait faire appel. Marc Raimondi, porte-parole du ministère américain de la justice a déclaré : « même si nous sommes extrêmement déçus par la décision finale de la cour, nous sommes satisfaits car il a été donné raison aux États-Unis sur tous les points de droit soulevés. Nous allons continuer de réclamer l’extradition de M. Assange aux États-Unis ». La bataille judiciaire s’annonce donc encore longue et féroce et il paraît bien difficile de déterminer si l’arrivée de Joe Biden à la présidence dans le courant du mois de janvier changera quelque chose. Au moment de la publication des dossiers par Wikileaks, celui qui était alors le vice-président de Barack Obama avait désigné Julian Assange comme un « terroriste high tech ».
De l’autre côté de la frontière, l'ambiance est plus accueillante pour l’australien. Le Président mexicain Andrés Manuel Lopez Obrador a fait savoir hier que son pays était prêt à accorder l’asile politique à Assange. Il s’est également prononcé pour l’abandon des poursuites. Les répercussions diplomatiques de ces annonces seront intéressantes à observer dans les prochains jours.
Les avocats de Julian Assange ont déposé une demande de libération sous caution qui doit être examinée demain mercredi 6 janvier. Il reste, en attendant, emprisonné dans le centre pénitencier de Belmarsh dans l’Est de Londres.
Pour ne rien rater de l’actu londonienne, abonnez-vous à notre newsletter en deux clics !