« En règle générale, mon instinct est de séparer le sport de la diplomatie et de la politique, mais il vient un point où ça n’est plus possible. » a déclaré Dominic Raab, le Secrétaire d’État des Affaires Étrangères et du Commonwealth.
Hier, 39 pays, dont le Royaume-Uni, ont demandé à la Chine dans une déclaration commune de « respecter les droits humains » des Ouïghours, minorité musulmane et turcophone du Xinjiang, à l’extrême Ouest du pays. Dans le cadre de l’Assemblée Générale des Nations-Unies spécialisée dans les droits humains, ces 39 pays souhaitent que la République Populaire de Chine donne un accès « immédiat et sans entrave au Xinjiang » à des observateurs indépendants.
Depuis plusieurs années, la Chine est accusée de ce que Dominic Raab désigne comme des “violations odieuses des droits de l’homme” dans la région. Celles-ci, vont de l’internement de masse - jusqu’à un million de personnes - à la stérilisation forcée des femmes en passant par la torture et la surveillance constante, jusque dans les foyers. Si les violations des droits de l’homme ont lieu en Chine sur l’ensemble du territoire, celles commises au Xinjiang sont d’une ampleur inédite, à la fois par le nombre de personnes concernées et par le déploiement de techniques de surveillance de masse.
C’est donc dans le cadre d’une réunion du comité des Affaires Étrangères, que le Secrétaire d’État a répondu à une question de la député conservatrice Alicia Kearns concernant la possibilité d’un boycott des Jeux Olympiques d’hiver qui se tiendront en 2022 à Pékin.
Given the appalling human rights abuses against the #Uyghur people (a genocide), I very much welcome the Foreign Secretary’s recognition of importance of not ruling out a boycott of the Olympics in Beijing in 2022 in response to my question today at the Foreign Affairs Committee. https://t.co/as8Sf7mtm3
— Alicia Kearns MP for Rutland and Melton (@aliciakearns) October 6, 2020
S’il réfute, « en tant qu’ancien avocat spécialisé dans les crimes de guerre » le terme de génocide, il appelle la communauté internationale à « examiner très attentivement les mesures » à entreprendre et reconnaît ne pas mettre de côté l’hypothèse du boycott. Concernant la présence ou non du Prince William, très souvent envoyé à ce genre d’événements comme représentant du pays, il a répondu que celle-ci « sera un corollaire du processus plus large d’évaluation des preuves ».
A quelle décision faut-il s’attendre ?
La décision d’un boycott n’est donc encore pas prise, et même loin d’être prise - rappelons d’ailleurs que la British Olympic Association n’est pas soumise à l’autorité du gouvernement et qu’elle n’a jamais boycotté une édition des JO - mais la porte est désormais ouverte.
Dominic Raab fait reposer cette décision sur les conclusions de la potentielle enquête des observateurs indépendants. Bien que l’attention portée par la communauté internationale sur ce sujet continue de grandir, elle a peu de chance d’aboutir. Un groupe de 55 pays a en effet répondu à la demande d’enquête en l’accusant d’être une tentative d’ingérence dans les affaires intérieures chinoises.
Par ce geste, ces 55 pays se trouvent complices des actions de la Chine. Mais cela ne doit pas nous faire oublier la mollesse avec laquelle les pays occidentaux ont, ou n’ont pas, dénoncé la persécution des Ouïghours. De plus, un boycott des Jeux Olympiques par le Royaume-Uni serait un signe fort, mais il révèle aussi le fait que l’Occident se rend compte bien tard que ses rivaux systémiques ont depuis longtemps fait le choix de ne pas « séparer le sport de la diplomatie et de la politique ».
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