Dans une petite salle de Hackney, un samedi matin, des enfants chantent Frère Jacques avec un accent presque parfait. À Ealing, une autre classe apprend les conjugaisons… grâce à la nature. Petites par la taille, grandes par leur créativité, ces Petites Écoles FLAM incarnent la vitalité du français au cœur du paysage éducatif britannique. Souvent portées par des parents bénévoles, elles ne sont pas des écoles françaises à proprement parler, mais des structures associatives où le français se transmet avec passion.


FLAM signifie Français Langue Maternelle. Nées de l’initiative de familles francophones souhaitant maintenir un lien linguistique avec leur culture d’origine, ces structures permettent aux enfants scolarisés dans le système britannique d’apprendre, de lire et d’écrire le français hors du cadre familial.
En 2001, le ministère français des Affaires étrangères a officialisé ce mouvement en lançant le dispositif FLAM, aujourd’hui soutenu par l’AEFE (Agence pour l’Enseignement Français à l’Étranger). Ces écoles, dites supplementary schools, accueillent les enfants le samedi ou après l’école, de 1 à 3 heures par semaine. Au programme : ateliers ludiques, activités culturelles, lecture, expression écrite et, surtout, plaisir de parler français. Au Royaume-Uni, les 56 Petites Écoles FLAM sont fédérées par Le Parapluie FLAM, une association nationale créée en 2013 à l’initiative d’Yves Letournel, alors attaché de coopération éducative à l’ambassade de France.
Le Parapluie FLAM : relier, soutenir, inspirer
“Le Parapluie FLAM, c’est avant tout une histoire humaine”, confie Sophie Gavrois-Karnavos, présidente du réseau depuis 2022 et co-directrice de la Petite École Farandole à Birmingham. “Les Petites Écoles FLAM sont des lieux de partage, souvent hébergés dans des salles paroissiales, des écoles britanniques ou des maisons de quartier. Notre rôle est de les soutenir, de les former et de les relier entre elles.”
Le Parapluie FLAM ne dispense pas lui-même de cours, mais offre un accompagnement essentiel : formations d’enseignants, mutualisation des ressources, outils pédagogiques, concours culturels (comme MotsenFLAM) et journées d’échanges. “Nous avons célébré nos dix ans à l’Institut français avec un concours poétique. Les enfants ont lu leurs textes devant un public ému : un moment de fierté collective,” se souvient Sophie.

Ealing : apprendre en pleine nature
À Ealing, dans l’ouest de Londres, Chantal Clairicia dirige une Petite École de 350 enfants âgés de 3 à 17 ans. “Nous venons d’ouvrir une classe de la forêt et une classe flexible inspirée de la pédagogie autonome. Les enfants apprennent en marchant, en observant, en manipulant. Nous avons littéralement enlevé les tables et les murs pour laisser place à une autre façon d’apprendre et les enfants adorent !”
Mais la réussite ne va pas sans vigilance : “Notre école se veut inclusive, alors nous devons jongler entre l’accessibilité des tarifs, la rémunération des enseignants et la hausse des loyers. C’est un vrai défi.” Son mot-clé ? La collaboration. “Entre familles, enseignants et écoles du réseau, tout se construit ensemble.”

Hackney : l’école où l’on apprend en chantant
À Hackney, Kavita, co-directrice des Crocodiles, anime une Petite École à taille humaine où le français se vit dans la joie : “En maternelle, nous chantons, jouons, rions. L’idée est de donner confiance à l’enfant.” Puis viennent la lecture, la grammaire, et la préparation aux examens, toujours avec une touche d’art : “Les élèves écrivent des chansons, créent des bandes dessinées, montent des pièces de théâtre. La culture, c’est notre fil rouge.”
Autour d’un Tuck Shop, après l’école, les parents se retrouvent, échangent en français, partagent des crêpes… “On recrée un petit coin de France au cœur de Londres.”

Southend : la réalité des petites structures
À Southend-on-Sea, Hélène dirige Les Petites Voiles avec une dizaine de familles.
“Chaque famille compte, et la perte d’une seule peut mettre en péril l’année. Mais nous tenons bon grâce à l’enthousiasme et au plaisir d’apprendre ensemble. Nous priorisons l’expression orale, les chansons, les jeux.” Malgré des moyens limités, ces structures incarnent la persévérance : “Sans le soutien du Parapluie FLAM et de l’AEFE, beaucoup auraient disparu,” confie Kavita.
Une francophonie bien ancrée dans le paysage britannique
Des grandes structures londoniennes aux Petites Écoles régionales, toutes partagent les mêmes défis : financement, recrutement, équilibre entre bénévolat et professionnalisation. Louer une salle à Londres peut coûter jusqu’à 450 £ la demi-journée, un vrai casse-tête pour ces associations.
Mais au-delà des difficultés, c’est la passion de transmettre qui unit les équipes FLAM. “Nous avons la passion, mais il faut aussi des moyens,” résume Chantal. De Londres à Glasgow, de Jersey à Manchester, ces Petites Écoles tissent des liens entre familles, enseignants et institutions. Certaines collaborent avec les Alliances françaises locales, d’autres organisent leurs propres projets culturels. Toutes participent à une francophonie vivante, inclusive et tournée vers l’avenir…
Le réseau FLAM, en quelques chiffres
56 Petites Écoles FLAM à travers le Royaume-Uni
5.400 enfants francophones accueillis chaque semaine
1 à 3 heures de cours hebdomadaires
Des dizaines d’événements, formations et projets culturels chaque année
Une aventure éducative collective
Les Petites Écoles FLAM sont bien plus qu’un réseau éducatif puisqu’elles tissent un lien vivant entre générations et cultures. Et comme le rappelle Sophie : “Le Parapluie FLAM s’inscrit dans un mouvement international, aux côtés de FLAM Monde et FLAM USA. Ensemble, nous faisons rayonner le français bien au-delà des frontières.”
Si vous souhaitez rejoindre une Petite École, en créer une ou simplement les soutenir, rendez-vous sur parapluieflam.org.
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