Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

Pourquoi est-il si surprenant que les Britanniques fassent la grève ?

Les transports sont à l'arrêt au Royauume Uni à cause de grèves Les transports sont à l'arrêt au Royauume Uni à cause de grèves
Écrit par Capucine Canonne
Publié le 21 novembre 2022, mis à jour le 21 novembre 2022

 

Depuis l’été 2022, le Royaume-Uni est touché par des mouvements sociaux, tantôt du côté des transports, tantôt du côté de la santé ou des services publics. Mais ce phénomène est d’autant plus alarmant que les Britanniques n’ont pas coutume de faire la grève, et ce pour des raisons juridiques et historiques.

 

La législation de grève au Royaume-Uni reste très restrictive

Aujourd’hui, il n’existe pas de droit fondamental de grève au Royaume-Uni. Faire la grève est compliqué : chaque mouvement doit être déclaré à l’avance et faire l’objet d’un vote. Même le niveau sonore des manifestations peut être réglementé. Par ailleurs, selon la loi, seul un syndicat peut lancer une action de grève, ce qui cantonne le champ des possibles aux entreprises privées et services publics où les syndicats sont implantés. 

En septembre 2022, le chancelier de l’Echiquier britannique, Kwasi Kwarteng, annonce même vouloir limiter le droit de grève aux cas où les négociations entre les syndicats et les employeurs ont « véritablement échoué ». Le précédent gouvernement avait déjà prévu une loi permettant le recours aux intérimaires pour remplacer les grévistes. Les organisations syndicales britanniques ont alors annoncé une action en justice. Kwasi Kwarteng a, depuis, été remplacé par Jeremy Hunt. Ce dernier a déclaré dimanche dernier que des "sacrifices" étaient nécessaires dans tous les domaines pour remettre l'économie sur les rails. 

 

les grèves au Royaume Uni s'intensifient

 

 

Un profond sentiment anti syndicaliste depuis les années 80  

Outre les difficultés de faire la grève dans le pays, la vague de mouvements sociaux qui submerge le Royaume-Uni depuis l’été 2022 peut surprendre Pourquoi ? En raison d’un sentiment anti syndicaliste profond de la société. Les Britanniques sont restés longtemps anti-syndicalistes, trop marqués par les événements de l'hiver 1979, et les médias ont maintenu ce ressentiment.

 

les grèves d'hiver au Royaume Uni en 1979
Les grèves  lors de l'hiver 1979  au Royaume Uni 

 

L’adhésion au syndicalisme était en chute libre depuis 30 ans : Plus de 13 millions d’employés britanniques étaient syndiqués, contre 6,7 millions en 2021. Mais ces derniers mois, les adhésions sont en hausse et les arrêts de travail se multiplient dans le secteur public. 

 

 

« Enough is enough », cette fois les Britanniques s’insurgent

Ce qui surprend surtout, c’est le caractère soudain de la vague gréviste. Des spécialistes rappellent l’époque de la crise financière de 2008. Le Royaume-Uni plonge dans la récession, provoquant une baisse des salaires réels dans le secteur privé, mais pas de mouvements sociaux d’ampleur. 

Pourquoi cela arrive-t-il en 2022 ? D’abord parce que, si la stagnation salariale était jusqu’ici une réalité acceptable, la peur d’un décrochage fort de la qualité de la vie (dû au contexte mondial) prend le dessus. Ensuite parce que les syndicats britanniques réussissent à convaincre la population, à l’image de Mick Lynch. Le secrétaire général de la National Union of Rail, Maritime and Transport Workers (RMT), attire sur les réseaux sociaux, répond aux sollicitations avec calme et fermeté et est jugé efficace pour présenter les motivations de son syndicat. 

 

Mick Lynch syndcaliste britannique
Mick Lynch, syndcaliste britannique 

 

Chaque semaine, partout dans le Royaume-Uni, les rues scandent « enough is enough ». Un cap semble franchi.