Florence Gravellier, championne paralympique : l’adversité est source d’opportunités

Des béquilles au tennis professionnel

Si vous tapez Florence Gravellier sur Wikipédia, vous trouverez une pleine page énumérant ses performances de championne internationale de tennis-fauteuil. Mais Florence aime à rappeler que, comme 95% des handicapés, elle n’a pas d’histoire sensationnelle à raconter. Atteinte de dysplasie congénitale, malformation de naissance des hanches, elle fréquente les hôpitaux dès le plus jeune âge pour de multiples et lourdes opérations, mais mène une enfance presque normale, jouant même au foot avec sa sœur. Soudain à l’adolescence, ses jambes ne la portent plus. Elle se retrouve en béquilles, la douleur permanente en plus et le sport en moins. Son énergie débordante la pousse à chercher un handisport à pratiquer. Elle fait alors un choix déterminant : « Dans ma ville, j’avais le choix entre tennis et tir à la carabine, j’ai choisi l’option la moins dangereuse ! »

Elle s’assied donc dans un fauteuil (contre l’avis des médecins) et brille rapidement par ses performances et sa volonté de fer. Bac en poche, ses études à Sciences Po seront compliquées par une dégradation de son état et une nouvelle opération, mais Florence ne lâche rien. En 1999, elle démarre la compétition internationale comme remplaçante, et son premier tournoi « pro » à New York est une révélation. C’est décidé, Florence se lance dans le sport de haut niveau !

Si on ne choisit pas ce qui nous arrive, on choisit toujours la manière dont on réagit.

 

L’adversité, un terrain d’apprentissage

Ayant renoncé au métier de reporter de guerre (!), Florence combine missions en intérim pour Adecco, son futur sponsor, et entrainements. En handisport, même de haut niveau, les moyens sont limités et on doit sans cesse franchir des obstacles tels que les escaliers des centres d’entrainement. Mais il y a une grande solidarité, un vrai cocon, même avec ses adversaires.  « J’ai appris à me servir d’un fauteuil roulant grâce au tennis-fauteuil, j’ai fait deux fois le tour du monde en moins de 10 ans et j’ai rencontré des personnes extraordinaires » , confie Florence. « Les sportifs paralympiques ont ce supplément d’âme, cette ressource de performance en plus et sont meilleurs en gestion de l’échec. »

 

 

Certes, il y a des sacrifices, comme celui de partir s’entrainer trois ans au Canada, loin des siens, avant les JO de Pékin, car là-bas, les infrastructures sont pensées pour les handicapés, le coaching est excellent, la vie moins chère et l’environnement international.  « Je ne serais pas celle que je suis sans mon handicap, je n’aurais jamais eu de médaille olympique sans cela ! », concède-t-elle.

 

Marche. Sur les chemins de la vie. C’est le titre du livre que Florence a publié en 2021.
« […] ce livre vous entraîne sur les chemins de ma vie, à la rencontre de mon Syndrome de l’Imposteur, à la recherche du droit de vivre pleinement, au-delà du handicap, des différences et du sentiment d’illégitimité. »

 

Les JOP Paris 2024, réalité et espoirs

Sur le sujet des Jeux Paralympiques, on entend beaucoup parler de prise de conscience, accessibilité, inclusion, sans réel progrès pour le moment… « En se limitant au budget et à la technique, on ne changera rien aux mentalités », déplore Florence. En effet, nous avons beaucoup à apprendre la gestion anglo-saxonne de la diversité et inclusion. Et elle ajoute : « Les Jeux Olympiques et Paralympiques de Londres 2012 furent organisés de façon globale et non séparée ; le sportif paralympique était symbolisé par une mascotte de super-héros, tout est dit ! Mais il n’est pas trop tard, assure-t-elle, il va se passer beaucoup de belles choses pendant les Jeux. » Car l’enjeu réside bel et bien dans l’héritage que nous en garderons.

 

 

Sensibiliser à la différence, visible et invisible

Florence Alix-Gravellier consacre à présent sa carrière à conseiller et coacher, entreprises, organisations et individus, en donnant notamment de nombreuses conférences. « Ma mission est de convaincre que la diversité est un formidable moteur de créativité et donc un levier de performance, humaine et financière » martèle-t-elle.

Elle aime aussi souligner que face à l’adversité, on a le droit de subir - on n’est pas toujours des « super-résilients » - pour pouvoir ensuite se relever.

 

La vie se contredit tant, on fait ce que l’on peut avec la vie
Antoine de Saint-Exupéry

 

 

Pour l’avenir, Florence fait confiance aux jeunes générations. « La société nous challenge de manière colossale mais vous avez les clefs pour être les meilleurs au monde ! », leur lance-t-elle. Et de conclure en citant son groupe musical préféré :

The darkness always turns into light / La pénombre fait toujours place à la lumière
Coldplay

 

Le défi londonien 

Après une dernière grosse opération en 2019 et désireuse d’apporter autre chose à ses deux filles, Florence, accompagnée de son mari Pierre, met cap sur Londres début 2021. Réalisant son rêve de reconversion professionnelle, Pierre ouvre en juillet 2022 la boulangerie Pierre Alix, en plein cœur du quartier de Muswell Hill. Le lieu est disruptif, largement ouvert sur les fours, et les clients se pressent avec curiosité pour voir comment on y fabrique le bon pain bio au levain naturel et autres viennoiseries.

Adresse : 222, Muswell Hill Broadway, London, N10 3SH. Ouvert tous les jours.

 

Son livre Marche. Sur les chemins de la vie (éditions Librinova) est disponible sur son site et en e-book.