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Violences au Royaume-Uni : comment expliquer cette escalade ?

Vous n’êtes sûrement pas passé à côté, le Royaume-Uni est actuellement en état de crise. Cela faisait depuis 2011 que le pays n’avait pas connu une période aussi chaotique. Entre émeutes, violences et montée des groupes extrémistes, lepetitjournal.com et Tim Bale, chercheur et expert en politique britannique, vous résument et détaillent pourquoi le pays est actuellement en état d’alerte.

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Écrit par Ewan Petris
Publié le 11 août 2024, mis à jour le 13 août 2024

"Je vous garantis que vous regretterez d'avoir participé à ces désordres.”  Voici le ton donné par Keir Starmer, nouveau Premier ministre britannique depuis les 4 derniers jours. Cela fait dix ans, que le Royaume-Uni n’avait pas connu de telles émeutes, et ce, sur tout le territoire.


 

Le point d’ancrage des émeutes outre-Manche

Les évènements ont été déclenchés par le meurtre brutal de trois jeunes filles à Southport, dans le Nord de l'Angleterre. Depuis cette attaque d’une violence inattendue et inouïe, des émeutes ont rapidement commencé à se propager dans plusieurs villes d'Angleterre et en Irlande du Nord. Et alors que ces manifestations font des dégâts humains et matériels conséquents, le nouveau chef de l’ordre britannique déclarait à ce moment-là : "Je ferais tout ce qu'il faut pour traduire les voyous en justice aussi vite que possible".

La journée du 29 juillet est un point de bascule dans la politique britannique. Les trois enfants - Bebe King (6 ans), Elsie Dot Stancombe (7 ans) et Alice da Silva Aguiar (9 ans) - poignardés à mort lors d'un événement de danse à Southport, sont entrés dans le cœur des Britanniques. À partir de ce moment-là, de nombreuses rumeurs ont circulé sur les réseaux sociaux, notamment par des groupes d'extrême droite et anti-migration. Pourtant, les forces de l’ordre confirment que le suspect appréhendé de 17 ans, n’est ni musulman, ni demandeur d’asile.

 

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Des mosquées brûlées et des fourgons de police incendiés

Les journées et les soirées suivantes sont rythmées entre veillées en hommage aux victimes,  et grosses émeutes violentes. Une mosquée locale (Southport) a été ciblée, un fourgon de police incendié, et 27 policiers ont été blessés. Selon Tim Bale, politologue et expert en politique britannique : “ces émeutes sont ce qui arrive quand des opportunistes d'extrême droite exploitent une tragédie en jouant sur un terreau d'islamophobie existante et de craintes plus larges concernant l'immigration, le tout exacerbé par un excès d'alcool , de drogue. Tout ceci, alimenté par des rumeurs en ligne provenant des groupes d'extrême droite.”

 

Les violences ont été exacerbées par les médias britanniques, qui ont aussi donné la parole aux partisans du groupe d'extrême droite, comme l’English Defence League (EDL). Keir Starmer, de son côté, appuyait sur son travail de prévention : "Si vous ciblez des gens à cause de la couleur de leur peau ou de leur religion, c'est de l'extrême droite". Après Southport, des manifestations violentes ont lieu à Londres, Hartlepool et Manchester, visant des mosquées et des hôtels accueillant des demandeurs d'asile. 

 

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Keir Starmer, nouveau Premier ministre britannique


 

“Ce n’est pas un hasard si ces évènements surviennent maintenant”

Les émeutes se sont propagées à travers des petites villes d’Angleterre et d’Irlande du Nord, comme Plymouth, Sunderland et Belfast. Les foules ont attaqué des mosquées, incendié des voitures et des bâtiments, et pillé des commerces. Rapidement, le cap des 150 arrestations est dépassé. À Belfast, une enquête a été ouverte après une agression qualifiée de crime haineux raciste. Tim Bale note que : “ce n'est probablement pas un hasard si ces événements surviennent après que la droite a perdu les élections face à un centre-gauche perçu comme moins dur sur l'immigration.”

Au 6 août, plus de 400 arrestations ont été effectuées. Le Premier ministre, Sir Keir, promet de sévères poursuites, à quiconque enfreindrait les règles. Il annonce la création d'une force spéciale d'officiers pour gérer “ces troubles” et collaborera avec certains groupes sur les réseaux sociaux pour contrer la désinformation. Une bonne réaction pour notre expert : “Keir Starmer a réagi en revenant à la stratégie utilisée avec le gouvernement Tory lors des émeutes de Londres en 2011 – c'est-à-dire rétablir l'ordre en rendant évident que ceux qui participent à la violence seront rapidement arrêtés, inculpés et emprisonnés. Cela semblait fonctionner à l'époque et cela semble fonctionner maintenant."

 

Montrer de la solidarité envers les victimes 

Malgré les violences, plusieurs communautés se sont unies pour nettoyer les dégâts et montrer leur solidarité avec les victimes. À Southport, les résidents se sont mobilisés pour restaurer leur ville, tandis que des leaders religieux ont appelé à la paix et à l'unité, déclarant : “ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous divise”, au micro de la BBC. 

Depuis jeudi, la tendance s’est apaisée. Pour beaucoup, cette crise fera avancer le pays et même si le Royaume-Uni a des problèmes avec l'immigration et l'intégration, Tim Bale, est plutôt confiant pour la suite : “La population outre-Manche est relativement moins polarisée que dans certains autres pays en Europe et au-delà. Cela pourrait être mieux, mais cela pourrait être bien pire !”

 

 

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