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Coupe du monde Rugby à 13 : quid de l'Australie et des Kiwi ? Analyse de Mathias Pala

Une photo de Mathias Pala, ballons de rugby dans ses brasUne photo de Mathias Pala, ballons de rugby dans ses bras
Mathias Pala
Écrit par Luther Beaumont
Publié le 4 août 2021

Membre du staff performance de l’équipe de France , Mathias Pala nous fait état du niveau de préparation physique nécessaire dans le monde du rugby à XIII. Nous traitons ici d’une pratique qui requiert parmi les efforts sportifs les plus accrus. Mais avec la coupe du monde en Angleterre qui entend se dérouler à partir du 23 octobre prochain, Mathias et ses congénères de la planète rugby XIII affrontent un calendrier compliqué : une problématique amplifiée par l’élément perturbateur que représente le Covid-19. Approchant de la fin de saison de NRL, un championnat plus exigeant, plus prestigieux, plus intense, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ne devraient pas être de la partie…

 

Co-écriture: Luther Beaumont et Marie Benhalassa-Bury.

 

La NRL est-elle plus puissante que la fédération internationale de rugby à 13 ?

Oui, largement, et ce en termes de puissance économique mais aussi de droits télévisuels… Tout joueur de rugby à 13 rêve de jouer en NRL. Elle attire d’ailleurs beaucoup de joueurs anglais.

En Australie, La NRL est omniprésente dans le paysage sportif, tous les matchs sans exception sont retransmis. L’intensité des matchs est en réalité bien plus élevée que certains matchs internationaux. Ainsi, les franchises australiennes et néo-zélandaises sortent tout juste de leur saison de NRL au moment de la coupe du monde, et craignent donc une potentielle surcharge de leurs joueurs. Qui plus est, l’apport financier pour ces fédérations est dérisoire en comparaison avec ce championnat local. Par conséquent, ils n’envoient pas forcément leurs joueurs les plus prestigieux…! L’exploit de parvenir à faire participer les meilleurs joueurs du monde avait été accompli lors des deux dernières éditions en 2013 et en 2017, mais il est capital de bien insister sur le caractère exceptionnel que cela avait pu constituer. L’objectif des franchises NRL étant avant toute chose de ne surtout pas les surmener avant le commencement de la prochaine saison. D’autant plus que le challenge constitué par la coupe du monde entre deux de ces saisons est faramineux. Le rugby à XIII est extrêmement exigeant : là où 15 joueurs évoluent sur le terrain, ici c’est 2 de moins par équipe qui tenteront de s’accaparer le même espace. On plaque plus, on court plus… Encore moins le droit à l’erreur en termes de préparation physique !
 

Avec l’annonce du retrait probable de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie de la coupe du monde, beaucoup épinglent le Covid-19. Au niveau physique, comment la pandémie se fait ressentir?

Le virus jouera un rôle quoiqu’il arrive. Surtout en Australie où les frontières sont fermées et les règles en vigueur demeurent très strictes. Ainsi, les joueurs doivent subir une quatorzaine obligatoire à leur retour en Australie… Au départ, l’écart calendaire entre la fin de la saison de NRL et le début de la Coupe du Monde est déjà très faible, imaginez-vous l’impact de deux semaines de repos contraintes supplémentaires ! Certains joueurs prennent du poids, d’autres en perdent, il leur est impossible de s’exercer correctement dans une chambre d’hôtel.

Mais je considère le Covid-19 comme, d’une part, un facteur amplificateur des complexités d’organisation de la Coupe du Monde liées au calendrier et au prestige exacerbé de la NRL, d’autre part comme un indicateur qui les révèle plus encore. Entre les équipes, et tout le staff qui les accompagne, les délégations regroupent plusieurs centaines de personnes qui se déplacent pour l’événement, toutes impactées par ces restrictions sanitaires. Sans omettre une nouvelle fois, que la valeur du trophée en jeu n’est vraiment pas la même pour tous !

En effet, la scène internationale ne fait pas la même impression sur les joueurs professionnels de notre sport. Le fait d’avoir seulement deux championnats professionnels dans notre sport, en Australie et en Angleterre, fait que le niveau des matchs internationaux n’est pas encore suffisamment homogène chez toutes les nations. Si l’Australie via son championnat (NRL) pousse toutes les nations du pacifique vers le haut, l’Angleterre et son championnat (Super league) ne peut pas en dire autant en Europe pour le moment. Beaucoup de joueurs prennent donc leurs carrières en club beaucoup plus au sérieux que les matchs internationaux et n’hésitent pas pour certains à refuser des sélections internationales (en prétextant des blessures) pour privilégier le repos nécessaire, l’intensité des compétitions et assurer leurs futurs contrats juteux sur du long terme. On ne peut pas les blâmer pour autant, car dans notre sport une blessure est si vite arrivée, et rares sont les joueurs qui ont une après-carrière déjà garantie. Les sommes amassées pendant leur carrière ne suffisent généralement pas (sauf exception) à couler des jours heureux pour le restant de leur vie. Ce sont des choix souvent difficiles pour chacun, car jouer pour sa nation, au final, est quelque chose de mémorable pour quiconque.

La pandémie vient donc amplifier ce phénomène, à tel point que les deux grandes équipes océaniennes ont promu un report de la coupe, et devraient en fin de compte ne pas s’y présenter. Leur partenariat avec la NRL demeure la priorité absolue. Car qui plus est, ce ne sont pas les mêmes sommes d’argent qui circulent que, par exemple, dans le cadre d’une coupe du monde de football. Celle de rugby à XIII ne bénéficie pas de la même crédibilité.
 

Mais comment expliquer un tel écart entre joueurs de NRL et joueurs européens ?

En Australie, on compte à peu près 500 000 licenciés. En France, selon les années, on oscillera plutôt entre les 10 000 et 15 000 adeptes enregistrés. Le calcul est simple : là où chez nous, il faudra se démener pour trouver un joueur professionnel, au niveau excellent, à la bonne endurance et au tempérament correct, l’Australie et la Nouvelle-Zélande auront l’embarras du choix. Sont en cause la médiatisation moins importante de ce sport en Europe, et des flux financiers à l’œuvre plus faibles aussi. Encore une fois, ce phénomène témoigne de complexités ancrées dans le monde du Rugby à XIII, que la pandémie ne fait qu’accentuer sans en être responsable pour autant, la Coupe du Monde ne permettant déjà pas une valorisation assez importante des joueurs les plus réputés.
 

Pensez-vous qu’elle sera reportée ?

Je ne pense pas que ça soit possible. La coupe du monde de football a déjà lieu l’an prochain, précédée par les Jeux Olympiques d’hiver. En termes de droits audiovisuels et de calendrier, un report en 2022 paraît assez compliqué.
 

Sans la Nouvelle-Zélande et l’Australie, cette Coupe du Monde ne représenterait-elle pas une très belle aubaine pour les autres joueurs ?

Mais sans eux, ce n’est pas une vraie Coupe du Monde ! J’apprécie toujours un challenge quel qu’il soit, mais peut-on réellement parler de victoire sans affronter les meilleurs de la scène internationale ? Si leur absence se confirmait, la France devrait quand même se présenter puisqu’elle a déjà validée son accord. Les enjeux ne seront néanmoins pas les mêmes. On en apprendra sûrement plus au cours des jours à venir.

 

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