Le prince Andrew est, à présent, officiellement ciblé par une plainte pour agression sexuelle sur mineure. Récapitulatif de son lien avec l’affaire Epstein, qui continue de bouleverser les anglo-saxons des deux bords de l’Atlantique.
Tout débute en 1996, lorsque Jeffrey Epstein, le célèbre homme d’affaires américain, est accusé par une actrice d’agression sexuelle. L’enquête menant à d’autres, dans les années 2000, il est révélé que le milliardaire a fréquenté nombre d’escorts dont certaines se sont avérées être très jeunes, s’impliquant donc dans un vaste trafic de mineurs. Il en aurait également contraint une bonne partie à subir les dits rapports sexuels, un nombre estimé à 36 filles toutes peu âgées. Il est retrouvé mort dans sa cellule en 2019, la piste du suicide étant à ce jour encore celle privilégiée.
"Il est plus que temps pour lui de rendre des comptes"
Si l’affaire a ébranlé le monde entier, son retentissement fut tout particulier au Royaume-Uni : Epstein était en effet un ami de longue date du duc d'York, accusé d’avoir participé aux sévices commis à l’encontre de Virginia Giuffre. Celle-ci maintient que ces deux hommes surpuissants, entre autres, l’ont utilisée comme esclave sexuelle alors qu’elle n’était âgée que de 16 ou 17 ans. Si le Prince a été identifié comme son agresseur présumé depuis 2015 selon le témoignage sous serment de la dite victime, ces éléments sont alors retirés du dossier, le juge Mara préconisant qu’ils devront constituer une autre enquête postérieure. Il est désormais rattrapé par cette affaire, puisque Virginia a désormais officiellement pu porter plainte ce lundi 9 août. Le dossier mentionne : « Il y a vingt ans, la fortune, le pouvoir, la position et le réseau du prince lui ont permis d’abuser d’une enfant vulnérable et apeurée, sans protection. Il est plus que temps pour lui de rendre des comptes » .
Le Prince ne s’est formellement éclipsé de la vie publique qu’en 2019, soit quatre ans après les révélations avancées, à la suite d’une interview très controversée donnée à BBC Newsnight. Il y nie toutefois toute affiliation avec la victime, en dépit de photographies qui semblent le contredire. Andrew se défend en fait d’avoir jamais rencontré son accusatrice. Il dit se rappeler très bien de la soirée particulièrement prédominante dans la mémoire de cette dernière, celle du 10 mars 2001, durant laquelle elle l’accuse de l’avoir agressée tandis que lui maintient s’être rendu dans un Pizza Express avec sa fille. Il serait en ce sens impossible qu’il ait vu Virginia ce soir selon ses dires. Et ce malgré la surprise de la journaliste, face à la mémoire d’éléphant que le fils de sa Majesté afficherait : « pourquoi se souvenir d’une soirée [si ordinaire] si précisément ? » Il indique également se tenir volontairement à la disposition de la justice américaine.
Les autorités américaines avaient déjà plusieurs fois exprimé leur consternation envers un prince qui, quand bien même avait-il précisé se rendre disponible, n’aurait absolument pas coopéré avec la justice états-unienne depuis. L’avocat de Virginia Giuffre dit se confronter à un mur de silence en dépit des multiples appels à la contribution du Royaume-Uni et du principal intéressé. Le problème étant que la plaignante a déposé son dossier à New York, puisque le droit anglais pourrait prononcer la prescription, de jure inexistante mais de facto au bon vouloir du juge. Tandis qu’aux Etats-Unis, le viol est imprescriptible depuis l’affaire Bill Cosby. Mais le fait étant qu’il s’agit d’une juridiction à l’étranger, le Prince Andrew pourrait bien continuer de bouder les enquêteurs américains.
Le cas échéant, justice peut-elle encore être faite?
Tous ces éléments semblent compromettre que justice soit faite le cas échéant. D’autant plus que Ghislaine Maxwell, l’entremetteuse d’Epstein, est actuellement détenue mais se rendra à son procès à l’automne et pourrait se voir sommée de témoigner. L’affaire avait déjà secoué les Etats-Unis puisqu’elle les relations d’Epstein incluaient aussi Donald Trump, son secrétaire du travail et ancien juge Alexander Acosta qui avait conclu un deal secret avec Epstein, Bill Clinton, Ehud Barak, Woody Allen ou encore Kevin Spacey. Une petite élite, a minima millionnaire, composée d’hommes tous liés de (très) près ou de loin à des affaires de viols ou de harcèlement sexuel, voire de pédo-criminalité. D’aucuns soulignent une large impunité systémique de ce type de profils de nos jours, non sans rappeler l’affaire Polanski mais aussi certains propos soutenus par le président Donald Trump « On peut faire ce qu’on veut… Il suffit de l’attraper par la [vulve] », ou encore le prince Andrew lui-même, déclarant que s’il avait eu une relation sexuelle avec la jeune Virginia Griuffe c'eût été quelque chose de si « positif, en tant qu’homme » qu’il s’en rappellerait forcément.
Du côté de la France, pour ne citer que, des films comme Léon de Luc Besson continuent d’être adulés par les critiques quand bien même Portman a exprimé tout son mal-être quant à ce tournage, au cours duquel elle n’était âgée que d’une dizaine d’années et s’est vue transformée en véritable Lolita de film d’action, quand bien même Besson est lui-même pointé du doigt pour ses agissements passés. Les débats sur l’âge de consentement ont encore fusé durant le quinquennat Macron, menant des responsables politiques à discuter de la possibilité ou non qu’une fille de 14 ans consente à un rapport sexuel avec un adulte.
Tout un ensemble de faits dont l’activisme féministe actuel s’empare, épinglant fréquemment une « culture pédo-criminelle », laquelle serait transposée dans nombre d’aspects du quotidien, et dont la communauté militante craint qu’elle n’élude ce genre d’affaires. Il ne reste qu’à patienter dans l’attente d’un éventuel rapprochement du prince avec la justice américaine, en vue d’aider à la progression de l’enquête puisqu’il avait précédemment annoncé sa volonté de coopérer.