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Nicolas Parrot « L’Indonésie dispose d’un capital naturel substantiel »

Nicolas Parrot est installé depuis trois ans et demi à Jakarta, il est Directeur de territoire du Groupe BNP Paribas en Indonésie. Fort d’une expérience de plus de 25 ans dans le secteur bancaire en Asie, il nous parle des enjeux et axes de développement pour l’archipel indonésien.

Nicolas Parrot BNP Parisbas IndonesieNicolas Parrot BNP Parisbas Indonesie
Écrit par Valérie Pivon
Publié le 25 juin 2023, mis à jour le 20 juillet 2023

Vous êtes fidèle à l’Asie depuis 26 ans, pouvez-vous nous expliquer votre lien avec cette région?

Dans le cadre de ma formation d’ingénieur, j’ai effectué un stage à Singapour en 1995, c’est ce qui a déclenché un premier intérêt pour l’Asie. Puis, à la fin de mes études, en 1997, j’ai réalisé mon VIE (volontariat international en entreprise) chez BNP Paribas à Tokyo et depuis je n’ai pas quitté l’Asie ni le Groupe. J’ai été en poste à Tokyo, puis Singapour, puis de retour à Tokyo et à nouveau à Singapour, et maintenant Jakarta. Comme vous pouvez le constater, je suis très fidèle à l’Asie et à l’entreprise pour laquelle je travaille.

Le début de ma carrière s’est déroulé dans les financements maritimes et aériens. Au début des années 2000, en particulier avec l’entrée de la Chine dans l’OMC en 2002 et les premières dérèglementations en ASEAN, les flux maritimes et aériens ont connu une croissance exponentielle. La libération des droits aériens et le développement des compagnies low-cost ont accéléré l’augmentation du trafic. J’ai travaillé sur les flux de marchandises et les investissements liés à ce domaine, et plus précisément sur le financement des achats de bateaux ou d’avions. Ce fut une expérience particulièrement intéressante.

Je suis aujourd’hui en poste à Jakarta depuis trois ans et demi en tant que Directeur de territoire au sein BNP Paribas. Je fais également partie des Conseillers du Commerce Extérieur et de la Chambre de Commerce et d’Industrie France Indonésie.

Depuis quand BNP Paribas est présente en Indonésie et dans la région ?

La première présence de BNP Paribas dans la région remonte à 1860 avec une première installation en Inde, suivie en 1881 par l’Australie et la Nouvelle-Zélande pour financer le commerce de la laine.

Le groupe BNP Paribas est aujourd’hui présent dans 12 pays de la zone Asie-Pacifique. L’implantation en Indonésie est plus récente, et date de 1970. Nous étions présents à Singapour depuis 1968 et la création de notre bureau de représentation en Indonésie s’est faite naturellement.

Notre première licence bancaire en 1989 a été obtenue dans le cadre d’une joint-venture avec le groupe Lippo. Nous sommes devenus seul actionnaire en 2000.

BNP Paribas est aujourd’hui présente en Indonésie à travers ses activités dédiées à la clientèle d’entreprise, que ce soit les services de banque commerciale, de banque d’affaire ou de gestion d’actifs. Nous employons 180 personnes.

Vous êtes une banque d’entreprises, qui sont vos clients ?

Nous avons deux catégories de clients : la clientèle locale et la clientèle internationale.

En ce qui concerne la clientèle internationale, nous l’accompagnons dans son développement depuis leur pays d’origine. Nous leur offrons un service intégré depuis leur siège en France, en Europe ou aux États-Unis, en liaison avec un banquier de notre groupe présent en Indonésie. Nous pouvons ainsi répondre à leurs demandes, questions de manière globale, étant présents dans 65 pays. Première banque de l’Union européenne, BNP Paribas dispose également d’un dispositif international permettant d’offrir une large gamme de services au plus proche des besoins de nos clients.

En ce qui concerne les clients indonésiens, nous accompagnons aussi bien les entreprises d’État que les clients privés, notamment les grands groupes.

Quels sont les secteurs d’activités que vous financez principalement ?

L’Indonésie présente de nombreuses opportunités d’investissements. Les entreprises que nous finançons sont celles principalement présentes dans les secteurs des ressources naturelles et les industries liées comme l’agriculture et sa transformation et celles qui ont trait à la consommation : alimentation, détaillants et distribution, transports, etc. Nous accompagnons ces industries dans leur transition. Cela fait partie des attentes de la société et notamment des nouvelles générations.

Dans le cadre de la mise à jour de notre politique sectorielle « Production d’électricité à partir du charbon » en 2019, nous nous sommes engagés à ne plus financer de projet de centrales électriques à base de charbon et depuis début 2023 nous sommes dans une nouvelle étape de réduction de nos financements aux secteurs du pétrole et du gaz. En mai 2023, BNP Paribas, qui n’a pas financé de nouveaux projets pétroliers depuis 2016, s’est engagé à ne plus accorder de financements dédiés au développement de nouveaux champs pétroliers ou gaziers, quelles que soient les modalités de financement. A fin décembre 2022, les énergies bas-carbone représentaient déjà près de 60% de nos financements dédiés à la production d’énergie et atteindront 80% à horizon 2030.

Nos équipes sont pleinement mobilisées pour accompagner le pays dans sa transition énergétique et le développement des énergies renouvelables. Récemment, nous avons arrangé une obligation verte pour Pertamina Geothermal Energy, qui possède toutes les centrales géothermiques de l’État. Cette émission obligataire a reçu un accueil très favorable des investisseurs internationaux.

Le gouvernement indonésien souhaite par ailleurs développer des filières de traitement des matières premières comme pour le nickel, que ce soit l’exploitation, le traitement, la fabrication de batterie, la construction de véhicules électriques ou encore la gestion des déchets. Nous accompagnerons ce mouvement.

On parle d’économie bleue et verte, pouvez-vous nous en dire plus ?

L’économie bleue se développe, elle a d’ailleurs été un relai d’activité pour les travailleurs de l’industrie touristique pendant la période du Covid-19. Des activités telles que la culture d’algues à Bali et îles de la sonde, des écloseries de langoustes à Lombok, qui étaient alors naissantes, se sont développées.

La pêche est un secteur d’activité important pour l’archipel. La flotte de pêche en est encore au niveau artisanal, sa transition va pouvoir se faire rapidement.

En ce qui concerne l’économie verte, le secteur des plantations est immense et très divers, avec une forte dimension sociale du fait de l’importance des fermiers indépendants. Le développement des bio-fuel, en particulier dans le secteur de l’aviation, fait de l’Indonésie un acteur majeur de ce secteur. Le gouvernement vient de lancer un marché du carbone qui va permettre de valoriser la reforestation. Le gouvernement a renforcé le contrôle des plantations et de leurs limites. Des ONG, dont certaines achètent leurs propres images satellites, ont contribué à l’assainissement du secteur.

Au total, du fait de sa géographie, l’Indonésie bénéficie d’un capital naturel substantiel : les forêts, terrains, mer et minerais, sont abondants. Le gouvernement souhaite le valoriser et le protéger. La prise en compte des enjeux environnementaux ne cesse de se développer. A ce titre, l’Indonésie a pris d’importants engagements lors des dernières C.O.P et du G20 à Bali.

Quels sont selon vous les enjeux principaux de l’économie indonésienne ?

L’Indonésie se définit comme un pays avec une classe moyenne importante. L’économie indonésienne est encore assez peu ouverte aux échanges internationaux  : le ratio, import+export/PIB, est l’un des plus bas d’Asie. Le pétrole est importé pour couvrir la moitié de la consommation locale, les exportations demeurent à des niveaux assez faibles comparés à la taille du pays. Cela protège le pays des chocs extérieurs, comme ce fut le cas durant la pandémie, mais la théorie économique standard voudrait que pour se développer, le pays va devoir se spécialiser ou se tourner vers des industries exportatrices. Quelles seront ces industries ? Le secteur du nickel en fera certainement partie, mais à mesure que l’Indonésie s’industrialise, elle devra également plus ouvrir son marché domestique.

Des négociations entre l’UE et Indonésie sur un partenariat commercial sont en cours depuis plusieurs années, nous espérons qu’il aboutira très prochainement. Lors de la tenue du G20 à Bali, le principe d’une signature de ce partenariat d'ici à la fin de 2023 a été acté.

Si vous aviez un conseil à donner à une entreprise qui souhaite s’installer en Indonésie ?

Je donnerais deux principaux conseils :

- Bien comprendre l’environnement légal et de régulation lié au secteur d’activité dans lequel vous souhaitez opérer. Certains secteurs sont en effet protégés et restreints.

 - S’appuyer sur un solide partenaire local, qui pourra vous accompagner dans les sujets de réglementation, légaux, de douane, etc.

 

 

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