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COP 27 : où en est la Turquie dans ses engagements climatiques ?

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Écrit par Valentine Brisvalter
Publié le 20 novembre 2022

La COP 27, conférence mondiale sur le climat, réunissait à Charm El-Cheikh (Égypte), du 6 au 18 novembre 2022, une centaine de chefs d’état et de gouvernement, dont le président turc Recep Tayyip Erdoğan et Murat Kurum, le ministre turc de l'Environnement, de l'Urbanisme et du Changement climatique.

 

COP 27 Egypte Turquie

 

Suite à la ratification de l’Accord de Paris sur le climat en octobre 2021, la Turquie s’est jointe aux objectifs fixés par le texte, à savoir réduire drastiquement son empreinte carbone jusqu’à atteindre la neutralité d’ici 2050.

Le plan d’action climatique de la Turquie

En 2021, le terme "climat" a été rajouté à l’appellation du ministère en charge de l’environnement et de l’urbanisme, devenant ainsi : "ministère de l'Environnement, de l'Urbanisme et du Changement climatique". Selon les propos de son ministre, Murat Kurum, la Turquie représenterait un pays exemplaire en termes de développement durable et de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050. En effet, une loi dite "loi climat" sera soumise au vote du Parlement turc en janvier ou février 2023 ; cette dernière prévoit les conditions de développement d’une économie durable de la Turquie, et d’une "production verte", incluant l’ensemble de la sphère citoyenne dans le combat contre le réchauffement climatique. Ainsi, le pays cherche à atteindre ces objectifs sans compromettre la croissance économique, et cela sans léser les différents secteurs d’activités (agriculture, industrie, etc.).

M. Kurum s’est également exprimé lors du Forum sur l’environnement organisé par l’agence Anadolu (agence de presse gouvernementale), qui se tenait le 20 octobre dernier à Istanbul. L’objectif de ce forum était de "restructurer le discours des médias sur l’environnement et les crises climatiques", et notamment, de "former un nouveau langage médiatique sur le sujet", selon les propos de l’Agence elle-même. Ce forum se tenait peu de temps avant le début de la COP 27, lors de laquelle la Turquie a dû présenter son plan d’action climatique, appelé aussi "contributions nationales déterminées" (NDC). Le ministre turc y a affirmé que la Turquie réalisait actuellement son plus gros projet de mobilisation pour le climat jamais envisagé jusqu’alors, à savoir le projet "zéro déchet", un projet initié par la première dame Emine Erdoğan en 2017.

Ce plan vise à réduire la pollution produite par le pays en adaptant la gestion des déchets de manière conforme aux principes du développement durable, jusqu’à atteindre un taux de recyclage de 60% d’ici 2030. Selon la première dame, si ce projet a jusqu’à présent permis le tri de 33.8 millions de tonnes de déchets recyclables, il a également été étendu aux déchets marins en 2019. Cette initiative de la Turquie pour l’environnement a été saluée par le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, qui a d’ailleurs signé avec Emine Erdoğan, en septembre 2022, une "déclaration de bonne volonté zéro déchet", afin d’étendre le projet à l’international.  

 

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Antonio Guterres et Emine Erdoğan, lors de la signature de la "déclaration de bonne volonté zéro déchet"

 

C’est ainsi que les épouses des dirigeants des pays membres de l’Organisation des états turciques se sont associées pour soutenir le projet lors du sommet qui s’est tenu le 11 novembre 2022 à Samarcande, en Ouzbékistan.

Des ambitions turques dont la crédibilité est remise en question

Si les ambitions climatiques de la Turquie sont clairement revendiquées, le pays va devoir encore fournir de nombreux efforts pour réaliser sa transition énergétique, et atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.

Un rapport publié en mars 2021 par l'Agence internationale de l'Energie (AIE), relatif à la situation énergétique de la Turquie, indique que 37,2% de l'électricité provenait encore de centrales thermiques au charbon en 2019.

Afin d’atteindre les objectifs fixés par l’Accord de Paris, il faudrait que la Turquie mette en place une politique de décarbonation multi-sectorielle (dans les domaines de l’énergie, du transport, de l’industrie notamment), et délaisse les énergies fossiles, notamment le charbon. C’est ce qu’affirme Ümit Şahin, spécialiste du climat et chercheur au Centre des politiques d’Istanbul de l’Université Sabancı. Se basant sur un de ses rapports intitulé "Feuille de route pour la décarbonisation de la Turquie : neutralité en 2050", le chercheur affirme qu'il faudrait supprimer l’utilisation du charbon dans la production énergétique d’ici 2035, et stopper dès maintenant la construction de nouvelles centrales au charbon. Ainsi, la Turquie devrait au moins tripler l’installation d’usines produisant des énergies renouvelables sur son territoire, miser sur le train comme moyen de transport de ses biens et, à une échelle individuelle, se fixer l’objectif d’une augmentation des ventes de voitures électriques d’au moins 20% d’ici 2030, par exemple. Selon le chercheur, la Turquie dispose déjà des moyens nécessaires à la réalisation de ces objectifs, que ce soit au niveau des expertises, au niveau économique, ou encore technologique, mais c’est aux décideurs politiques d’accorder la priorité aux financements.

Pour Ümit Şahin, la dette climatique des pays "du Nord" envers les pays en voie de développement "du Sud" représente l’enjeu principal de la COP 27. En effet, il rappelle la responsabilité des pays les plus polluants dans le déclenchement d’externalités négatives dont souffrent ces pays, telles que la sécheresse et d’autres catastrophes naturelles, nuisant fortement aux récoltes et ayant pour conséquence un manque crucial de nourriture.

Dans un discours prononcé en séance plénière le mardi 15 novembre lors de la COP 27, le ministre Murat Kurum a annoncé, dans sa déclaration de contribution nationale, l'intention de son pays de revaloriser à la hausse ses objectifs d'ici à 2030, passant de 21% à 41% sa cible de réduction des émissions. Toutefois, un certain nombre d’ONG internationales doutent que ces promesses soient réalistes. 

Güven Sak, directeur de la Fondation pour la recherche sur les politiques économiques de la Turquie (TEVAP), considère que le plan d’action climatique présenté par la Turquie correspondra, d’ici 2030, à une hausse de 32% de son empreinte carbone, du fait qu’aucun engagement n’a été pris concernant l’arrêt de l’utilisation du charbon et la suppression des usines déjà existantes. Ainsi, l'économiste n'a pas hésité à s'exprimer via son compte twitter le 15 novembre, afin de critiquer la vraisemblabilité de l'objectif d'une neutralité carbone d'ici 2050, qui selon lui, s'apparente "à un rêve".

La Turquie a toutefois manifesté son désir d’accueillir la COP 31 sur son sol en 2026.

 

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