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Télétravailler en voyageant : est-ce vraiment si formidable d’être un digital nomad ?

Lena est journaliste sans bureau et sans frontières et travaille sur des projets de traduction. Ces trois dernières années, elle a eu la chance de télétravailler en se déplaçant entre plusieurs pays tels que l’Espagne, l’Italie ou encore le Chili. A la première personne, elle nous raconte ses galères et les leçons qu’elle tire de ce mode de vie atypique…

Photo de Digital NomadsPhoto de Digital Nomads
Écrit par Lena Tschauder
Publié le 25 mai 2025, mis à jour le 28 mai 2025

Et si je décidais de m’immerger dans la culture turinoise ? Qu’y a-t-il à découvrir de la scène artistique à Barcelone ? Ma motivation pour les voyages a toujours été cette irrésistible envie de savoir à quoi ressemble le quotidien d’une vie vécue autre part, mêlée à la quête d’une ville où tout semble parfait et où tout a du sens. Je me suis donc lancée dans cette aventure quelque peu tumultueuse, dans ce mode de vie que je peinais parfois moi-même à décrire aux autres.

 

 

J’étais ainsi devenue une « digital nomad » (nomade digital en français), donc quelqu’un qui travaille en ligne et qui exploite cette liberté pour voyager et ainsi changer régulièrement de destination. De manière un peu paradoxale, j’ai toujours détesté me définir en tant que tel. En y songeant, j’avais l’image de quelqu’un qui passe sa vie à siroter des cocktails au bord d’une piscine, en tapotant quelque chose sur son clavier d’ordinateur. Bien que ce ne soit pas mon cas et malgré mon rejet pour ce titre, je dois l’avouer, j’ai bel et bien été une digital nomad.

 

Le saviez-vous ?

  • Il y a environ 35 millions de digital nomads dans le monde
  • La plupart d’entre eux ont entre 30 et 39 ans et viennent majoritairement des États-Unis mais aussi d’autres pays comme le Royaume-Uni, la Russie, le Canada, l’Allemagne et la France.
  • Bali en Indonésie, Chiang Mai en Thaïlande et Lisbonne au Portugal figurent parmi les destinations les plus populaires pour les digital nomads

 

 

Dans mes conversations avec les autres, je faisais face à différentes réactions : certains ne comprenaient pas mon incapacité à poser mes valises, d’autres m’enviaient. « Travailler et voyager en même temps, la chance ! » Quand je pensais à mes multiples péripéties, j’étais parfois un peu surprise de ce genre de retours très positifs. Oui, c’est un privilège choisi, et j’en suis consciente. Aurais-je envie de retenter l’expérience dans un futur proche ? Je ne sais pas. Après deux ans de nomadisme, je vous partage le revers de la médaille…

 

 

Photo d'un digital nomad

 

 

1. Quand on voyage seul, on finit par se sentir un peu… seul

Voyager seul, c’est goûter à une certaine indépendance, et paradoxalement, se rendre compte de notre besoin des autres. Oui, on fait de nouvelles rencontres, peut-être même avec d'autres voyageurs comme nous. Toutefois, chaque nouveau séjour demande un temps d’adaptation, de l’énergie pour prendre ses marques et se faire de nouveaux amis, et avant cela, devoir affronter sa propre solitude. Et lorsqu’on se sent enfin à l’aise et plus entouré, rôde déjà la proximité d’un nouveau départ. Vient le moment des au revoir avec la gorge serrée, avant d’être à nouveau l’étranger dans notre prochaine destination.

 

 

2. La construction difficile, voire impossible, d’un chez-soi

Cela pourrait sembler logique au premier abord, car oui, l’objectif principal de voyager est d’abord la découverte de nouveaux paysages ou cultures, pas de se bâtir un refuge. Néanmoins, cela peut devenir rapidement pesant de ne jamais vraiment parvenir à construire son petit cocon. Vous n’êtes ni touriste, ni expatrié, mais un « entre-deux », une personne de passage. Le temps dont vous disposez est alors suffisant pour visiter la ville, mais pas pour la comprendre et découvrir son âme. Vous ne pouvez vous engager dans aucune activité sur le long terme et ne donnez donc pas assez de chances aux locaux de bien vous connaître dans un environnement dans lequel il vous sera difficile de laisser une trace durable.

 

 

Photo d'une digital nomad

 

 

3. Être digital nomad est souvent difficile et coûteux

Faire et défaire sa valise, c’est fatigant. Avoir l’embarras du choix est un privilège qui peut être ressenti comme un poids. Faut-il opter pour une destination alléchante, mais coûteuse ou, au contraire, s’aventurer dans un pays lointain et moins cher ? Le besoin de partir est-il réel et réfléchi ou vient-il d’une impulsion incontrôlée ?

Préparer les prochains trajets, hébergements, lieux de travail, affaires à emporter, démarches administratives… Aux préoccupations du quotidien se mêle une charge mentale assez conséquente lorsqu’on change régulièrement de destination. Et puis parfois, un séjour plus ou moins long chez nos parents peut être nécessaire pour soulager notre agenda ainsi que notre porte-monnaie.

 

 

Photo d'une digital nomad

 

 

4. Vous ne ferez pas forcément plaisir aux locaux

Certains endroits sont très prisés par les touristes, les expatriés et les digital nomads. Quoi de mieux que de passer quelques semaines voire quelques mois à la plage, et de bronzer au soleil pendant que nos amis en France grelottent de froid ?

Et lorsque notre salaire est élevé par rapport au coût de la vie sur place, on est tenté de se faire plaisir, et ça fait du bien. Malheureusement et souvent, la communauté locale en souffre. Le boom des hébergements temporaires et chers mène fréquemment à une crise du logement, le tourisme de masse devient étouffant et la plupart du temps, il n’y a pas de réel échange entre voyageurs et locaux, chacun restant dans sa bulle.

 

 

Si, malgré ces contraintes, vous partagez mon envie de découvrir d'autres horizons et nourrir votre curiosité, voici quelques recommandations pour des séjours plus éthiques, économiques et intéressants :

  • Pensez à des alternatives aux offres, voire arnaques spéciales « digital nomad », par exemple en choisissant des sous-locations plutôt que des hébergements temporaires hors de prix.
  • Séjourner au moins 6 mois dans une ville, ce qui est plus écologique et une manière de vous immerger réellement dans son atmosphère, sans avoir la contrainte d’un engagement à long terme si ce lieu ne vous correspond pas.
  • Participez à des activités ou du bénévolat sur place et avec les locaux pour sortir de votre bulle « voyageur », tout en améliorant vos chances de rencontrer des personnes qui partagent les mêmes passions que vous.
  • Laissez votre nouvel environnement vous inspirer et vous enrichir culturellement en apprenant la langue et les coutumes du pays que vous découvrez.

 

Vous ai-je donc persuadé ou dissuadé de goûter à la liberté de mêler voyage et travail ? Si vous avez la chance de travailler en ligne, je vous recommande tout de même de tenter l’aventure au moins une fois. Il faut l’avouer, ce privilège peut vous garantir des séjours réellement inoubliables, à condition qu’il soit utilisé à bon escient.

 

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