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LES ERRANTES, CHRONIQUES UKRAINIENNES – Le nouveau roman de Lyane Guillaume, expatriée depuis 35 ans

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Écrit par Lepetitjournal.com International
Publié le 28 juillet 2014, mis à jour le 25 juillet 2014

Lyane Guillaume s'est inspirée de chaque pays où elle a séjourné pour écrire ses romans. Lepetitjournal.com l'a rencontrée à l'occasion de la sortie de son dernier ouvrage, Les errantes, chroniques ukrainiennes

Lepetitjournal.com : Les errantes, chroniques ukrainiennes est sorti aux éditions du Rocher en mai. Comment vous est venue l'idée de ce roman? Que raconte-t-il ?

Lyane Guillaume : Ce roman est inspiré par un séjour de quatre ans en Ukraine que j'ai effectué entre 2000 et 2004 alors que mon mari était en poste à l'ambassade de France à Kiev. Nous parlons russe et nous avons parcouru ce pays de telle façon que nous le connaissons très bien.

Le roman commence en 2004 au début de la Révolution orange. À cette époque, des jeunes Ukrainiens commençaient à protester contre des élections truquées et manifestaient leur souhait de se rapprocher de l'Europe. L'héroïne et sa fille s'apprêtent à quitter Kiev pour la France. Pendant tout le trajet de taxi qui les conduit vers l'aéroport, elles vont être retardées, notamment par les manifestations. En même temps au cours de ce trajet, il y a des souvenirs qui viennent à l'esprit de la mère Marina : la façon dont elle a vécu l'époque soviétique, la perestroïka, l'indépendance de l'Ukraine, la catastrophe de Tchernobyl?

Vous plongez les lecteurs dans des événements qui ont marqué l'Ukraine. La fiction est presque un prétexte.

Je fais tout pour que la partie documentaire ne soit pas pesante. Il faut rester dans la spontanéité. Ce roman ne parle pas seulement de 50 ans de l'histoire de l'Ukraine, c'est aussi l'histoire d'une relation entre une mère et sa fille. La mère Marina a dû se battre pour gagner sa vie, elle a horreur du gaspillage. Sa fille est tout le contraire, elle est née en 86 et appartient à une génération consumériste. Elle n'a pas la profondeur de sa mère.

Dans votre livre, on perçoit déjà les prémices des événements actuels. Pourtant vous l'avez écrit bien avant.

Quand vous écrivez un roman, il arrive des choses étonnantes, comme si vous anticipiez ce qui va arriver. Quand, j'ai écrit Les errantes en 2011, je ne pensais pas à ce qui allait se passer. Lorsque j'en ai parlé à mon éditeur, il m'a dit : "Mais l'Ukraine n'est ce pas un peu loin des préoccupations des Français ?" Peu de temps après l'Ukraine faisait l'actualité.

Je suis assez contente de l'avoir écrit avant les événements de 2014 car il y a une fraîcheur et une spontanéité qui rendent ce roman plus véridique. Je n'étais pas obligée de prendre systématiquement partie pour mes amis pro-ukrainiens, qui étaient tous sur la place Maïdan. J'aurais sans doute été plus sévère avec la Russie.

Lyane Guillaume a vécu quatre ans en Ukraine. Photo B.Buisson

Dans vos romans, vous mélangez la fiction et la réalité du pays dans lequel vous avez vécu. Comment vous documentez-vous ?

J'ai beaucoup lu sur l'Ukraine, parlé avec les gens, interviewé des Ukrainiennes. Tout ce que je raconte sur les femmes ukrainiennes est vérifié. Je suis allée à Tchernobyl. Entre les lectures, les conversations, les interviews et la vie quotidienne là-bas, j'ai accumulé suffisamment d'informations pour faire un roman qui soit un roman documentaire, presque un témoignage. Les héroïnes sont inspirées de diverses personnes que j'ai rencontrées.

Vous avez vécu en Afghanistan, en Inde, en Russie, en Ukraine, et maintenant vous vivez en Ouzbékistan. Racontez-nous votre parcours. Sont-ce vos voyages qui vous ont permis d'écrire vos six romans ?

Cela m'a effectivement permis d'écrire des romans, ce que j'avais toujours voulu faire. Au départ, j'ai suivi mon mari, archéologue, à l'étranger. J'étais jeune professeur de lettres, je me suis mise en congé et je suis partie. Mon mari a ensuite rejoint le ministère des Affaires étrangères et sa carrière a influencé mon propre destin.

Trois mois après notre arrivée en Afghanistan, en 1979, l'Armée rouge envahissait le pays. D'où mon premier roman, Les riches heures de Kaboul. D'un deuxième séjour en Afghanistan (2000-2004), j'ai tiré Laveuse de chiens, l'histoire d'une jeune styliste afghane qui vivait en France et qui revient, par amour pour son pays natal, monter un atelier de couture avec des femmes afghanes. On appelle "laveurs de chiens" les Afghans qui ont quitté leur pays pendant les troubles et qui reviennent une fois la situation apaisée.

Sur l'Inde, j'ai écrit Fière et intouchable qui raconte l'histoire d'une famille d'intouchables à travers quatre générations de femmes et Jahanara sur la fille de l'empereur qui a construit le Taj Mahal. J'ai vécu ensuite en Russie où j'ai écrit La Tour Ivanov.

Comment avez-vous fait pour vous adapter dans chaque pays ?

S'adapter à un pays cela passe par la langue. En Inde, je parlais anglais ; en Afghanistan, j'ai appris le persan ; en Russie, j'ai appris le russe. Cela passe aussi par les gens, les connaissances, les amis. Et puis j'ai eu de nombreuses activités, de la danse classique indienne, du yoga. J'ai écrit pour le théâtre. En Russie, je présentais une émission francophone sur la radio Voix de la Russie et j'ai écrit pas mal d'articles. À chaque fois que j'ai été dans un pays, j'ai endossé un "avatar" différent, j'ai été journaliste, professeur, danseuse. Cette capacité d'adaptation fait que je me suis plu dans chaque pays.

Vous avez arrêté votre carrière d'enseignante pour suivre votre mari, et vous l'avez toujours suivi depuis. Qu'auriez-vous envie de dire aux femmes qui vivent mal cette situation ?

Cela peut être vécu comme une expérience positive et enrichissante à condition d'être ouvert et d'avoir l'envie de comprendre le pays. Il faut sortir de chez soi et des cercles d'expatriés. Aller à la rencontre des gens du pays, avoir des activités qui vous permettent de vous faire des amis. Etre une femme d'expatrié est peut-être moins bien vécu aujourd'hui qu'autrefois. Pour ma part, je n'en ai jamais souffert. J'ai su au contraire en tirer profit pour développer des activités créatrices et artistiques.

Propos recueillis par Bénédicte Buisson (www.lepetitjournal.com) Mardi 29 juillet 2014

Les errantes, chroniques ukrainiennes, aux éditions du Rocher, 19,90 ? 

Dates des futures présentations-dédicaces :
- Salon du livre, Le Mans, 4 et 5 octobre 2014
- Salon du livre, Blois, 10, 11, 12 octobre 2014
- Salon du livre, Brive, 7, 8, 9 novembre 2014

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Publié le 28 juillet 2014, mis à jour le 25 juillet 2014