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Le vote par « anticipation » : une proposition qui ne passe pas

Vote anticipé présidentiellesVote anticipé présidentielles
Écrit par Adèle Hourdin
Publié le 18 février 2021, mis à jour le 19 février 2021

Rejeté en masse par le Sénat, un amendement déposé par le gouvernement devait autoriser le vote par « anticipation » pour la présidentielle de 2022. Une mesure qui aurait pu être appliquée aux Français de l’Etranger.

S’il était venu à passer, c’aurait été une première en France. Le 16 février, le gouvernement a déposé au Sénat un amendement pour mettre en place le vote par « anticipation » pour les présidentielles 2022. Certains bureaux de votes seraient ainsi équipés de machines à voter permettant aux électeurs de voter à une « date fixée par décret, durant la semaine précédant le scrutin ». Ces votes par anticipation pourraient être mis en place à l’étranger « selon des modalités similaires à ce qui est prévu pour le vote des Français inscrits sur les listes électorales consulaires ». L’amendement a été rejeté par une large majorité au Sénat.

« L'objectif, est de faire baisser l’abstention », avait expliqué sur France 2 Christophe Castaner, président du groupe LREM à l’Assemblée Nationale mais aussi à « anticiper » sur la crise sanitaire qui pourrait se prolonger jusqu’en 2022.

Ce mode de scrutin n’a pour l’instant jamais été mis en place en France. Le timing de dépôt de l’amendement pose question puisqu’une proposition similaire pour les élections régionales et départementales vient d’être écartée par l’exécutif et qu’un moratoire sur l’utilisation des machines à voter est en vigueur.

Certains pays pratiquent déjà le vote par anticipation, notamment les Etats-Unis ou le Portugal dont l’élection présidentielle vient de se dérouler selon ce mode de scrutin.

 

« Choquant sur le fond et la forme »

« C’est choquant sur le fond et la forme » pour Valérie Boyer, sénatrice Les Républicains des Bouches du Rhône. Elle dénonce une mesure déposée en « catimini » sous la forme d’un simple amendement au détour d’une loi portant sur les modalités de l’élection du président de la République,  par un président « sans cesse en train de modifier les règles du jeu ». Stéphane Le Rudulier, rapporteur de la commission des lois, a lui dénoncé une « initiative du Gouvernement a de quoi nourrir tous les fantasmes de manipulation électorale."

« Le vote par anticipation pour les présidentielles pose des questions de constitutionnalité » estime Jacky Deromedi, sénatrice des Français établis hors de France, appartenant au groupe Les Républicains, particulièrement opposée à cette mesure. Elle estime que cette mesure présente « un risque de rupture d'égalité des électeurs devant la loi, les citoyens ne disposant pas des mêmes informations au moment de voter ». La campagne présidentielle prenant fin 24 h avant le début du scrutin, tous les votants n’auraient pas été exposés à la même information et le choix de vote ne pourrait pas être modifié.

Même son de cloche à gauche. « Si une partie des Français vote huit jours avant, vous imaginez les fuites sur le sens du vote de nature à porter atteinte à la sincérité du scrutin? C’est lunaire, surréaliste et pas souhaitable » a déclaré le député communiste Sébastien Jumel. Pour Bastien Lachaud, député France Insoumise de la Seine-Saint-Denis, les machines à voter ne peuvent pas représenter un vote fiable.

 

 

« Le gouvernement ouvre le débat »

« C’est une main tendue du gouvernement au Sénat pour parler de tout ça » a expliqué Christophe Castaner sur le plateau de France 2. « Le gouvernement ouvre le débat et n’imposera rien, c’est le Parlement, le Sénat qui votera et qui décidera ».

Dans un sondage sur Twitter, le député de la 1ère Circonscription des Français de l’Etranger appartenant à la majorité présidentielle, Roland Lescure, a posé la question « Le vote par anticipation permettra de moderniser notre démocratie, de faire reculer l’abstention et de rassurer des électeurs inquiets des conditions sanitaires. Et vous ? Vous êtes pour ou contre ? ». Sondage auquel 72,2% des répondants ont déclaré être défavorables à cette mesure.

Le député Matthieu Orphelin, anciennement LREM, s'est pour sa part déclaré favorable au vote par anticipation mais ne souhaite pas qu’il soit réalisé sur des machines à voter mais « dans de vrais isoloirs et urnes ». A ce jour en France, seules 66 communes sont équipées de ces machines tandis que les autres ne peuvent en acquérir du fait du moratoire.