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Yannick Jadot: « Il faut améliorer la protection sociale des Français de l’étranger »

Yannick jadotYannick jadot
Écrit par Capucine Taconet
Publié le 4 avril 2022, mis à jour le 7 avril 2022

Alors que le premier tour de la présidentielle 2022 approche, nous sommes allés à la rencontre des 12 prétendants à l’Elysée. Changement climatique, justice sociale, coupes budgétaires… Yannick Jadot, candidat de EELV-Les Verts, a répondu à nos questions.

 

Je veux être le président qui sortira nos institutions de la verticalité présidentielle

 

Quel président voulez-vous être pour les Français ?

Le président du climat et de la justice sociale. Le changement climatique, qui menace nos conditions mêmes d’existence, est le défi qui va définir ce siècle. Je veux redonner aux Françaises et aux Français confiance dans notre capacité collective à faire face, à affronter les défis devant nous, y apporter des réponses justes. Je veux également être le président qui sortira nos institutions de la verticalité présidentielle : gouverner au XXIème siècle, c’est associer l’intelligence de toutes et tous à la décision, susciter de l’adhésion par la concertation, élargir toujours les possibilités de participation citoyenne.

 

Notre démocratie est malade

 

Quelles sont les trois priorités de votre projet présidentiel ?

Mon projet vise à faire face aux trois enjeux majeurs auxquels nous devons faire face : la protection de l’environnement et de nos conditions d’existence, la baisse des inégalités et le renouveau démocratique.

La lutte contre le dérèglement climatique et l’effondrement du vivant sont au cœur de mon projet. Elle devra irriguer toutes les politiques publiques : Affaires étrangères, Agriculture, Bercy, tous les ministères devront se mettre en ordre de marche pour organiser la sortie des énergies fossiles.

Je souhaite aussi transformer la société française pour qu’elle soit plus égalitaire. Il est inacceptable qu’aujourd’hui les 5 premières fortunes de France gagnent autant que 40% des plus pauvres. Pour y remédier, je prévois un plan de sortie de la pauvreté, avec un revenu citoyen équivalent à la moitié du revenu médian, soit 918 euros par mois, ouvert dès 18 ans et versé de manière automatique. Je souhaite porter le SMIC à 1500 euros net sur le quinquennat. Nous mettrons en place une fiscalité plus juste : ISF climatique, taxe exceptionnelle sur les profits des énergéticiens...

Enfin, notre démocratie est malade, l’abstention bat des records à chaque élection comme on l'a vu lors des dernières élections municipales, départementales et régionales. Nous devons remettre les citoyens au cœur du fonctionnement de la Vème République, c’est d’ailleurs ce que nous avons fait dans l’élaboration de notre projet. Nous avons associé des citoyens éloignés de la vie publique dans l’élaboration des propositions. Si les Françaises et les Français m’en donnent l’opportunité, je prendrai rapidement un certain nombre de décisions structurantes : la mise en place d’une loi de séparation des lobbies et de l’Etat, la reconnaissance du vote blanc, le droit de vote des résidents non-européens aux élections locales à partir de 5 ans de résidence, le referendum d’initiative citoyenne. Enfin, je souhaite installer, dès le début du quinquennat, une convention citoyenne sur le renouveau démocratique.

 

Sur ce sujet comme sur d’autres, les Françaises et les Français établis hors de France ont comme souvent été particulièrement ignorés

 

Quel regard portez-vous sur la gestion de la crise sanitaire par le gouvernement actuel et notamment sur les mesures prises pour les Français de l’étranger ?

Je veux d’abord dire que le gouvernement a été confronté, comme l’ensemble des gouvernements du monde, à des événements inédits. J’ai refusé, pendant tous ces mois de crise, de faire de la santé publique un enjeu de bataille ou de distinction politiques. Lorsque les décisions prises étaient les bonnes, je l’ai dit sans ambiguïté. Quand elles ne l’étaient pas, je l’ai dit aussi. Il y a eu, il faut bien le dire, beaucoup de confusion, parfois une très nette impréparation face à une pandémie qui, pour être inédite dans ses formes, était tout de même un risque identifié. Surtout, et c’est l’un des points sur lesquels la gestion française de la crise se distingue d’autres pays, il y a eu beaucoup de verticalité. Le Président seul a pris les décisions, entouré d’un conseil de défense sanitaire et sans aucun contrôle parlementaire. Cette manière de faire a miné la confiance dans les décisions mais aussi leur efficacité et leur compréhension par nos compatriotes.

 

Sur ce sujet comme sur d’autres, les Françaises et les Français établis hors de France ont comme souvent été particulièrement ignorés. Certains se sont retrouvés dans des situations ubuesques, avec des certificats de rétablissement non reconnus, des parcours vaccinaux inadaptés, des situations mal ou pas anticipées. C’est là où l’on mesure ce que fait perdre le refus du dialogue et de la concertation : quand tout se passe depuis un seul bureau à Paris, la décision publique ne sait pas prendre en compte la diversité des situations singulières. Les Françaises et les Français établis hors de France en ont particulièrement pâti ces deux dernières années.

 

Les coupes budgétaires dans les services consulaires ou le scolaire dégradent la qualité de nos services publics

 

Quels sont, selon vous, les principaux défis rencontrés par les Français de l’étranger ?

Le premier défi, c’est celui des services publics. L’accès aux droits sociaux et civiques à travers des services consulaires bien dotés et efficaces, l’accès à l’éducation à travers un système de bourses plus juste et un réseau bien financé, l’accès à la culture, tout cela dépend de l’engagement de l’Etat.

La politique menée par les gouvernements successifs est hélas inverse. Les coupes budgétaires dans les services consulaires ou le scolaire dégradent la qualité de nos services publics, maltraite à la fois les agents consulaires, les enseignants et celles et ceux de nos compatriotes qui sont les plus vulnérables.

Le deuxième défi, c’est évidemment le social. Il nous faut améliorer la protection sociale de nos compatriotes à l’étranger, qu’il s’agisse des bourses, des aides sociales, de la retraite ou de la santé. Le suivi et la prise en charge des foyers de femmes seules ou des couples LGTBI dans des pays où leurs droits ne sont pas reconnus doivent devenir une priorité.

Le troisième, c’est bien entendu la crise climatique. Les Françaises et les Français de l’étranger la voient peut-être mieux que leurs compatriotes de métropole. Je pense aux méga feux en Australie, aux vagues de chaleur qui accablent les Etats-Unis, aux catastrophes naturelles qui se déchaînent plus régulièrement en Asie.

Ils et elles sont les témoins quotidiens des conséquences de la crise aux quatre coins du globe. C’est un message politique extrêmement fort que je souhaite porter au niveau national.

 

Les Françaises et les Français établis hors de France sont citoyens de la République, et méritent en tant que tels la considération de leurs droits

 

Quelles sont les mesures que vous aimeriez mettre en place en faveur des Français de l’étranger ?

Réinvestir dans les services publics, je l’ai dit. Les Françaises et les Français établis hors de France sont citoyens de la République, et méritent en tant que tels la considération de leurs droits. Voilà plusieurs quinquennats que le budget qui leur est alloué diminue. On ne peut pas disposer de services publics performants à l’étranger si nous continuons de sous-doter nos représentations consulaires.

Investir dans l’éducation et dans le système des bourses ensuite. L’augmentation des frais de scolarité, corollaire du désinvestissement de l’Etat dans le réseau de l’AEFE est intenable et pousse en dehors du réseau des familles qui sont dans l’incapacité de faire face.

Mieux financer les associations également. Beaucoup d’aides n’ont pas été distribuées pendant la crise faute de moyens humains pour traiter les demandes. Les critères pour soumettre des projets STAFE sont si restrictifs que les enveloppes ne sont pas consommées. Ce ne sont pourtant ni les bonnes volontés ni les projets qui manquent !

Il faut enfin réformer le système de protection sociale, en particulier les retraites et la Caisse des français à l’étranger, et mettre en place de nouvelles ressources pour soutenir les personnes vulnérables. Le mode de calcul des droits à la retraite, notamment, doit changer. Personne ne doit voir ses droits diminués pour avoir travaillé hors de France.

 

Nous porterons, avec nos partenaires européens en particulier, une diplomatie écologiste à la hauteur des enjeux

 

Comment voyez-vous le rôle de la France et son rayonnement sur la scène internationale ?

Compte-tenu du contexte actuel, la politique extérieure de la France ne peut avoir de sens et de poids que si elle s’inscrit dans une politique européenne renforcée et un multilatéralisme solide. Nous porterons, avec nos partenaires européens en particulier, une diplomatie écologiste à la hauteur des enjeux. Le réseau diplomatique, héritage de notre histoire, est l’un des plus développés au monde. C’est un point d’appui qu’il nous faut mettre au service d’objectifs de paix.

 

Les Français de l'étranger ont beaucoup inspiré nos positions sur un certain nombre de sujets,

 

Quelle est, selon vous, la place des Français de l’étranger dans la société française ?

Les Françaises et les Français établis hors de France sont des ambassadeurs de notre pays, partout dans le monde. Mais aussi une source formidable de richesses et de partage, les garants d’une société française qui ne cesse de s’ouvrir au monde.

Chez les écologistes, ils et elles ont beaucoup inspiré nos positions sur un certain nombre de sujets, parce qu’ils et elles peuvent se faire le porte-voix des bonnes pratiques à l’étranger, de la réalité sur le terrain dans certaines zones du monde. C’est une richesse et un atout considérable.