Édition internationale

Éléonore Caroit, ministre des Français de l’étranger : “la proximité, c’est mon ADN”

Tout juste nommée ministre déléguée chargée de la Francophonie, des Partenariats internationaux et des Français de l’étranger, Éléonore Caroit veut incarner une diplomatie d’action et de proximité. Climat, francophonie, réforme de l’AEFE et représentation lors d’évènements internationaux figurent déjà à son agenda. “Ces premiers jours sont à l’image de mon portefeuille : très varié et très interdépendant. (...) C’est un poste de combat pour l’influence de la France.”

Eléonore Caroit - @Capucine Canonne Eléonore Caroit - @Capucine Canonne
Eléonore Caroit - @Capucine Canonne
Écrit par Capucine Canonne
Publié le 26 octobre 2025, mis à jour le 27 octobre 2025

 

 

Vous êtes nommée Ministre déléguée auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargée de la Francophonie, des Partenariats internationaux et des Français de l’étranger depuis le 12 octobre 2025. Que dire de vos premiers pas dans cette fonction ? 

Je suis tout de suite entrée dans le vif du sujet car l’actualité n’attend pas ! Dès le 13 octobre, au lendemain de ma nomination, j’ai été ravie de retrouver tous les élus membres de l’Assemblée des Français de l’étranger réunis à Paris pour leur session d’automne. Je les connais bien pour avoir participé à leurs travaux au sein de cette Assemblée avant d’être élue députée des Français établis hors de France en 2022. Pour mon premier déplacement officiel en tant que Ministre déléguée, je me suis rendue à Washington pour prendre part aux Assemblées annuelles d’automne de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international et conduire la délégation française à la réunion du G7 Développement présidée par le Canada.

 

43ème session AFE : “notre responsabilité, défendre nos compatriotes à l’étranger”

 

Dernières étapes de mes premiers moments : Genève, autre capitale diplomatique internationale, où s’est tenue le 20 octobre le 16ème Sommet de la CNUCED, la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, et cette semaine la Conférence sur les diplomaties féministes où j’ai pu parler notamment réforme du financement de nos politiques féministes internationales ou encore protection des adolescentes.

 

La France reçoit la 4ème Conférence ministérielle des diplomaties féministes

 

Ces huit premiers jours sont à l’image de mon portefeuille : à la fois très varié et très interdépendant, avec des sujets qui se nourrissent mutuellement. C’est évident entre Francophonie et Français de l’étranger, où il y a des convergences fortes. Mais ça l’est aussi évidemment entre la Francophonie et les Partenariats internationaux, où les enjeux de biens publics mondiaux et de développement vont tenir une place essentielle. C’est un poste de projection de nos valeurs et notre vision humaniste du monde, un poste de combat pour l’influence de la France.

 

 

Photo de famille lors de la 43ème session de l'AFE - 13 octobre 2025 - @Capucine Canonne
Photo de famille lors de la 43ème session de l'AFE - 13 octobre 2025 - @Capucine Canonne

 

 

Quels sont les évènements qui vous animeront particulièrement ces prochains mois ? 

Dès la semaine prochaine - 29 et 30 octobre 2025 -  nous accueillons de nombreux dirigeants pour le Forum de Paris sur la paix, avec au cœur des échanges les enjeux de protection de l’Etat de droit, de maîtrise de l’IA, de défense du multilatéralisme. A court terme, l’enjeu c’est aussi bien sûr la protection de notre planète et de notre biodiversité avec la COP 30 qui se tiendra au Brésil à Belém début novembre, sous présidence brésilienne. 10 ans après l’Accord de Paris sur le climat, ce sera l’occasion de faire un bilan d’une décennie d’action sur le climat et de porter un agenda climatique ambitieux malgré l’effritement du multilatéralisme.

 

Nous devons continuer d’augmenter le nombre de locuteurs de français dans le monde, qui compte plus de 321 millions de personnes

 

Parmi mes autres points de mobilisation figurera la francophonie avec une réunion ministérielle qui se tiendra au Rwanda mi-novembre 2025. Nous devons continuer d’augmenter le nombre de locuteurs de français dans le monde, qui compte plus de 321 millions de personnes ! Un an après le Sommet de la Francophonie de Villers-Cotterêt en octobre 2024, la France est toujours présidente en exercice de l’Organisation internationale de la Francophonie. Elle le restera jusqu’à l’automne 2026, où elle passera le relais au Cambodge où se déroulera le prochain Sommet.

En 2026, la France présidera aussi le G7 dont le Sommet au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement se tiendra en juin 2026 à Evian. La réunion du G7 Développement que je serai chargée de présider au printemps 2026 sera l’un des temps forts de la présidence française du G7 : ce sera l’occasion d’y faire avancer nos priorités, en particulier sur le cadre de financement du développement.

La préparation du prochain Sommet Afrique – France en mai 2026 constituera un autre temps fort de l’année à venir : pour la première fois, il se tiendra dans un pays anglophone, à Nairobi, au Kenya. Ce sera l’occasion pour la France de marquer que son partenariat avec l’Afrique a vocation à couvrir, sans exclusive, tous les pays du continent africain. Le Sommet « Africa Forward » que nous co-organisons avec le Kenya permettra d’avancer ensemble dans la réforme de la gouvernance mondiale que nous promouvons.

 

 

La situation de l’AEFE, c’est une priorité de premier ordre en tant que Ministre déléguée chargée des Français de l’étranger

 

 

Eléonore Caroit en amont de la conférence ministérielle de politiques féministes - 22 octobre 2025
Eléonore Caroit en amont de la conférence ministérielle de politiques féministes - 22 octobre 2025 

 

 

 

Concernant une réforme de l’AEFE, vous évoquiez en septembre que “L’équilibre est compliqué à trouver”. Selon vous, une réforme concernant l’AEFE est-elle nécessaire ? 

La situation de l’AEFE, c’est une priorité de premier ordre en tant que Ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.  L’AEFE, c’est ma deuxième maison : j’ai fait toute ma scolarité à l’étranger dans un lycée français, j’y ai inscrit mes enfants. J’ai une histoire personnelle avec l’AEFE qui fait que je suis convaincue de l’importance de cet opérateur : c’est à la fois notre plus bel outil d’influence pour tous les élèves étrangers qui font leur scolarité dans ce réseau et un relais indispensable pour permettre à tous les élèves français de rester connectés au système français.

 

 

Il faut réformer, mais pas n’importe comment : en prenant le temps de la consultation, en y associant les parents d’élèves, les organisations syndicales, les parlementaires

 

Ce réseau, c’est une force. Mais on doit l’entretenir, ne pas rester figés sur nos acquis. Ce qui valait en 1990, à la création de l’Agence, n’est plus nécessairement vrai aujourd’hui. Et si on veut préparer l’AEFE aux défis qui l’attendent pour les vingt prochaines années, on doit regarder devant nous, pas dans le rétroviseur. Aujourd’hui l’AEFE est face à une situation complexe.

On a devant nous un défi de long terme structurel. Pour mettre en capacité l’AEFE de repenser son modèle économique compte tenu de la situation budgétaire de notre pays, de l’évolution de notre réseau, de ses forces ou de ses fragilités en fonction des géographies.  Il faut réformer, mais pas n’importe comment : en prenant le temps de la consultation, en y associant les parents d’élèves, les organisations syndicales, les parlementaires et en visant une forme d’équilibre où chacun est mis à contribution. 

 

 

Elénore Caroit nommée au Gouvernement Lecornu

 

 

Dans le contexte financier actuel, à l’heure où le Projet de loi de finances 2026 est débattu, quels sont les postes budgétaires à absolument prioriser concernant les Français de l’étranger ? 

Le contexte budgétaire est certes très contraint ; le service public consulaire pour les Français de l’étranger doit toutefois continuer à se moderniser et à se transformer pour rechercher toujours plus d’efficience pour améliorer la qualité du service rendu aux Français.

Ma priorité ira donc à la poursuite des grands projets de modernisation comme le service France Consulaire, le Registre électronique d’état civil, le vote par internet, l’expérimentation du renouvellement des passeports sans comparution étendue à deux nouveaux pays (Espagne, Australie) ou le déploiement de l’identité numérique pour les Français de l’étranger. Faciliter la vie de nos compatriotes établis hors de France, c’est aussi prendre en compte leur protection sociale, alors que les Assises de la protection sociale des Français de l’étranger ont fait entendre une forte attente dans ce domaine. En 2026, les crédits consacrés à l’aide à la scolarité des élèves en situation de handicap seront augmentés pour tenir compte des besoins qui nous sont remontés.

 

 

Je vais reprendre tous les éléments utiles pour identifier les sujets les plus trans-partisans, et ceux qui requièrent un véhicule législatif pour avancer.

 

 

Laurent Saint-Martin avait mis sur la table début 2025 un projet de loi concernant directement les Français de l’étranger, annonçant une échéance au second semestre 2025. Allez-vous poursuivre ce projet très attendu ? 

Beaucoup d’échanges ont déjà eu lieu ces derniers mois avec les parlementaires, avec les élus consulaires autour de ce projet de loi : je ne partirai donc pas d’une copie blanche. Je vais reprendre tous les éléments utiles pour identifier les sujets les plus trans-partisans, et ceux qui requièrent un véhicule législatif pour avancer. Je pense notamment à la dématérialisation de la propagande électorale et à la suppression du vote par correspondance qui sont deux mesures de simplification.

 

 

J’irai à la rencontre de nos compatriotes établis hors de France lors de chacun de mes déplacements pour mieux comprendre leurs attentes, leurs préoccupations

 

 

 

Comment comptez-vous établir une relation de proximité avec les communautés françaises à l’étranger ? 

La proximité avec les communautés françaises de l’étranger, c’est mon ADN. C’est mon ADN de Française de l’étranger comme ça l’a été en tant que députée, où je me suis beaucoup déplacée tout au long de mon mandat. J’irai à la rencontre de nos compatriotes établis hors de France lors de chacun de mes déplacements pour mieux comprendre leurs attentes, leurs préoccupations sur le terrain. Il y a des sujets communs à tous les Français, partout dans le monde. Mais d’une région à l’autre, il peut y avoir aussi des situations parfois très différentes.

Nous réfléchissons aussi à des formats d’échanges en visioconférence pour échanger avec le maximum d’entre nos compatriotes : je suis à leur écoute et à leur disposition. Et depuis Paris, je compte bien m’appuyer sur les médias spécialisés et sur les réseaux sociaux pour entretenir un contact direct avec tous les Français de l’étranger. 

 

 

Nos compatriotes établis hors de France ont besoin de médias spécialisés comme le vôtre qui leur renvoient une image fidèle de ce qu’ils sont 

 

Eléonore Caroit et Jean Noël Barrot à la clôture de la conférence de diplomatie féministe - 23 octobre 2025 - source X
Eléonore Caroit et Jean Noël Barrot à la clôture de la conférence de diplomatie féministe - 23 octobre 2025 - source X 

 

 

Avez-vous un mot particulier pour les lecteurs du « lepetitjournal.com » ?

Je suis une lectrice assidue de votre média : continuez à produire du contenu qui intéresse les Français de l’étranger ! Au-delà de l’information généraliste qui leur est accessible par ailleurs, nos compatriotes établis hors de France ont besoin de médias spécialisés comme le vôtre qui leur renvoient une image fidèle de ce qu’ils sont : des Françaises et des Français qui ont osé l’expatriation, citoyens du monde, fidèles à la France et à ses valeurs et donc les meilleurs ambassadeurs pour notre pays !

 

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