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Bio, végétarien : fronde à l’Assemblée sur le menu des cantines

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© CreativeCommons
Écrit par Justine Hugues
Publié le 29 mai 2018, mis à jour le 3 décembre 2020

50% de produits bio ou intégrant la préservation environnementale dans la restauration collective d’ici à 2022 : les députés ont voté, samedi 26 mai, cet objectif du projet de la loi agriculture et alimentation, sur fond d’échanges musclés.  L’article 11, répondant selon le ministre de l’agriculture Stéphane Travert, à un « engagement présidentiel ambitieux » a été adopté à main levée, après de longs débats entamés la veille. 

 

Trop ambitieux pour la droite, qui a proposé sans succès de reporter son application à 2025, l’article a également été critiqué pour le renchérissement (68 centimes supplémentaires par repas) qu’il induit.  Argument fallacieux, confiait ce matin Yannick Jadot au micro de France Inter.  «  La France touche tous les ans 9 milliards d’euros d’aide publique, dont 80% vont vers les 20% des exploitants agricoles les plus riches. Il suffirait que 50% de cette aide à l’agriculture structurent les circuits courts vers la restauration collective (les conversions, l’installation, les réseaux de collecte) pour que, comme cela se passe à Mouans-Sarthoux ou ailleurs, la restauration collective bio ne coûte pas plus cher que la restauration classique ». Le député européen écologiste rappelle que l’objectif de 20% de bio dans les cantines scolaires avait déjà été fixé à l’échéance 2012, et qu’aujourd’hui « on est à 4% ». 

 

 

« Pas besoin de loi pour mettre du quinoa »

 

La proposition d’introduire une part de menus végétariens dans les cantines a alimenté d’autres échanges houleux. Ses partisans, tels Matthieu Orphelin (LREM) ou Pierre-Yves Bournazel (UAI), ont plaidé qu’il fallait progresser, avec un « mouvement de société très fort ». Le rapporteur Jean-Baptiste Moreau (LREM) a pour autant jugé cette contrainte « pas opportune », arguant que la consommation de viande était « une nécessité pour la croissance ».  Dénonçant des amendements « inspirés d'une idéologie qui relève du diktat », Vincent Descoeur (LR) s'est insurgé qu'on « rabaisse la viande au niveau de produit dangereux ». « Je ne comprends pas qu'on cherche à imposer un style de vie à l'ensemble de nos concitoyens! », a renchéri Grégory Besson-Moreau (LREM).

L’opportunité d’inscrire dans la loi les menus végétariens a également été réfutée par Marc Fesneau, chef de file du MoDem, qui assure, dans sa commune, n’avoir pas eu « besoin de loi pour mettre du quinoa ». « Il y des initiatives locales mais pas de généralisation à l’ensemble du territoire », explique Roland Lescure, député des Français de l'étranger que nous avons interrogé. « Par exemple à Bègles (Gironde) où la cuisine centrale sert un repas végétarien par semaine », poursuit-il.  

 

Les petits pois sont-ils plus verts ailleurs ?

 

Roland Lescure affirme qu’au Canada, où « il y a des menus végétariens partout », ce n’est « pas dans la loi ». « Un sondage, mené par l’Université de Dalhousie, montre que les personnes âgées de moins de 35 ans sont trois fois plus susceptibles de se considérer végétariens ou végétaliens que les personnes de 49 ans ou plus », cite-t-il en exemple. « Implicitement, cela incite l’industrie agro-alimentaire à s’adapter et donc à proposer une option végétarienne ».     

Nos voisins européens semblent également, à ce sujet, avoir un train d’avance, puisque l’introduction du bio dans la restauration collective a commencé dans les années 90, chez un grand nombre d’entre eux. Tandis qu’en Italie, 1.250 cantines bio étaient dénombrées en 2015, en Suède, 23% en moyenne de produits bio étaient utilisés dans toutes les municipalités du pays. En 2014, les repas servis dans les écoles berlinoises contenaient, en moyenne, près de 40 % d'ingrédients bio, d’après le rapport 2016 « le bio dans l’Union Européenne » des  « carnets de l’Agence bio ».  

Dans l’attente de pouvoir évaluer si ce nouvel objectif français sera atteint, contrairement aux vaines résolutions prises lors du Grenelle de l’environnement, les « pains au chocolat » continueront d’avoir la part belle à la sortie des écoles de l’Hexagone. L’amendement « chocolatine », qui avait fait le buzz en voulant relancer le duel avec l’appellation concurrente, a en effet été rejeté par l’Hémicycle.

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Justine Hugues
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