La série documentaire « Dessiner pour résister », diffusée sur Arte à l’occasion de la journée internationale des droits de la femme, plonge au cœur du quotidien de six dessinatrices confrontées à l'oppression politique et patriarcale dans leur pays respectif.
La série documentaire « Dessiner pour résister », diffusée sur Arte à partir du 6 mars 2024, suit le quotidien et les parcours de six dessinatrices confrontées à l’oppression politique et patriarcale dans leurs pays. De la Syrie à la Russie, en passant par l’Inde, le Mexique et l’Égypte, cette série originale, écrite par Vincent Coen et Guillaume Vandenberghe et réalisée par sept réalisatrices locales, offre un regard profond sur la résilience et la détermination de ces femmes à travers leurs dessins.
Art graphique coloré, bande dessinée, presse… Dessins en résistance
Chaque épisode plonge dans l’univers unique d’une dessinatrice, révélant les défis auxquels elle est confrontée, ainsi que son courage et son humour pour les affronter. Des portraits émouvants qui illustrent comment ces artistes utilisent leur art pour défier les normes sociales oppressives et faire entendre leur voix : « Nous avons commencé par dresser une liste d’une vingtaine de dessinatrices potentielles, explique la productrice Hanne Phlypo, qui porte ce projet aux côtés d’Estelle Robin You depuis plus de quatre ans. En parallèle, nous avons recherché des réalisatrices potentielles dans chaque pays. Dans certains cas, le tandem ne fonctionnait pas bien, il fallait trouver le duo idéal. Lorsque l’on filme dans des pays comme l’Inde, il est crucial que la dessinatrice se sente en sécurité et en confiance. ».
Leurs dessins, animés de façon remarquable tout au long de la série-documentaire, deviennent des moyens d’expression et de liberté. De l’art graphique coloré, jusqu’à la bande-dessinée, en passant par le dessin de presse, chacune trouve dans son genre artistique la capacité de s’évader d’un quotidien oppressant : « L’animation permet de montrer ce que l’on ne peut pas montrer en temps réel, explique Hanne. Parfois aussi, c’est un moment d’oxygène qui offre à la fois à la dessinatrice et au spectateur une pause salvatrice, au sein d’une réalité étouffante. ».
Le fait même de rêver de liberté était impossible.
Amany Al-Ali
Le première épisode, sorti le 6 mars, se déroule en Syrie et retrace l’histoire d’Amany Al-Ali, la seule femme dessinatrice de presse d’Idlib. Confrontée aux raids russes permanents et aux autorités islamistes qui dirigent la ville, elle décide de dénoncer leurs actions et de les combattre à travers ses dessins. La jeune femme dispense également des cours aux femmes de son entourage, les encouragent ainsi à prendre leurs crayons pour exprimer et revendiquer leur liberté.
Au Mexique, la dessinatrice féministe et queer Mar Maremoto tente de lutter contre une réalité effroyable : dix féminicides par jour dans son pays. Son art, qu’elle expose principalement sur Instagram, s’étend même jusqu’au street-art, et ses personnages colorés arborent les murs de la ville comme messages politiques : « Je crois qu’occuper l'espace est une rébellion », exprime l’artiste dans l’épisode dédié à son parcours.
Dessiner sous répression : comment protéger les artistes ?
Dans un contexte de dictature militaire, tel qu’en Égypte, avec la dessinatrice de presse Doaa el-Adl, ou en Inde, avec la dessinatrice de webcomics Rachita Tanejala, la protection de l’identité devient essentielle : « Nous devons faire preuve de prudence dans la diffusion des dessins, notamment dans le cas de Rachita, qui est constamment sous la menace de poursuites judiciaires, explique Estelle Robin You. Il ne faut pas franchir les lignes rouges imposées par les autorités et se projeter dans la diffusion de ce documentaire, d’autant plus lorsqu’il a une visée internationale. ». Le documentaire est d’ailleurs formellement interdit en Inde.
Du côté de la Russie, la dessinatrice Victoria Lomasko se retrouve piégée entre la violence domestique et la violence d’État dans la Russie de Poutine. Dans un contexte de conflit contre l’Ukraine, ses dessins se révèlent à la fois être son refuge et sa perdition, la contraignant à fuir son pays : « Le soutien des partenaires financiers et institutionnels joue un rôle crucial dans la protection des personnes impliquées dans ce projet. La présence de Victoria dans la série a par exemple été soutenue par l’ambassade de Russie française, ce qui nous a permis d’obtenir rapidement un visa et de garantir sa sécurité. ».
Diffusée sur Arte à partir du 6 mars 2024 et disponible sur arte.tv, « Dessiner pour résister » promet de susciter émotions et réflexions. Une série à ne pas manquer.