Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--

COACHING : Après un séjour en France, j’ai du mal à en partir

expatriation, arrachement, envie de Franceexpatriation, arrachement, envie de France
Écrit par Nicolas Serres-Cousiné
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 18 juin 2019

Je ne comprends pas. J’ai toujours été un homme pétri de certitudes, laissant aux autres le soin de se compliquer la vie avec des questions existentielles souvent dénuées de réponses. Cadre supérieur depuis six ans au sein d’une entreprise française basée à New York, marié avec deux enfants en bas âge, je peux dire sans forfanterie aucune qu’à partir du BAC, j’ai réussi tout ce que j’ai entrepris sans trop forcer. Dès qu’une opportunité professionnelle ou personnelle s’est présentée à moi, je m’en suis emparé à l’instinct et ne l’ai jamais regretté, fonçant tête baissée, ceci jusqu’à aujourd’hui. En effet, sur le point de rentrer à Manhattan après de belles vacances passées en France en famille, je doute de tout et de rien, je n’ai plus aucune certitude sauf celle d’être perdu comme un naufragé seul en plein milieu de l’océan.

Suis-je vraiment heureux à New York ? Ma vie est-elle meilleure ici qu’en France ? Est-ce que tout l’argent que je gagne vaut la peine de me retrouver si loin des êtres qui me sont chers et de ma culture ? Je ne sais plus, je ne sais pas. Au secours, je sombre alors que je ne devrais pas...ou le devrais-je ?...

Ce sentiment de confusion n’est pas nouveau. Je crois bien que cela a commencé il y a un an et demi alors que je revenais du mariage de mon cousin. Lui et son épouse avait organisé une fête champêtre “à la française” comme j’aime et, dans l’avion du retour, j’avais été pris dune crise d’angoisse. “Mon Dieu, je rentre à New York avec la terrible impression que chez moi n’est płus chez moi, que chez moi c’est là-bas, le pays que je viens de quitter !”Avec le boulot, la famille et les amis, j’avais vite oublié cette panique qui m’avait subitement envahie la cataloguant ni une ni deux dans la section problèmes de riches. Hélas, tous mes voyages suivants en France m’ont fait le même effet, version exponentielle. J’ai essayé à l’époque de comprendre ce qui m’arrivait en en parlant à ma femme, à des collègues de bureau et même à un psy, mais la culpabilité de douter de l’utilité d’une vie que nombres m’envient avait pris le dessus. “Arrête de te plaindre, New York c’est génial, point barre”.

 

Aujourd’hui, dans la salle d’embarquement du vol AF007 en route pour une destination qui parfois me donne des cauchemars, je sais que mon malaise doit être adressé sérieusement. Ceci dit, malgré ma boule au ventre, je sais que je vais m’en sortir, surtout depuis la discussion que j’ai eu avant-hier soir au resto avec Marc, mon ami d’enfance. “Tu as toujours été quelqu’un qui a suivi les autres comme un toutou, et pour les rattraper puis les dépasser, une façon de soigner ton ego sans doute, tu n’as eu de cesse d’être meilleurs qu’eux”. Sur le coup sa réflexion m’avait bien gonflé, mais une cigarette et quelques verres plus tard, ma vie avait défilé sous mes yeux et j’avais dû admettre que mon vieux copain n’avait pas tort.

 

Au lycée, j’ai choisi la voie scientifique car tout le monde dísait que la voie littéraire était la voie de la loose. J’ai eu mon BAC S avec mention. J’ai fait Sup de Co parce que Marc m’a convaincu que ça allait bien faire sur un CV. J’ai fini mes études au top de ma classe. J’ai enchaîné sur un MBA à Columbia car celle qui allait devenir ma femme venait juste de s’y inscrire et, après trois années à trimer dans ma boîte à Paris, j’ai accepté d’être muté à New York car tous mes collègues en rêvaient ! On peut dire ce qu’on veut, mais ce dîner avec Marc, sans exagérer, a été une vraie révélation pour moi. Toute ma vie, je me suis conforté dans l’idée que j’étais un homme pétri de certitudes alors qu’en fait j’ai vécu la vie des autres et ceci sans m’en rendre compte. Quand je me pose maintenant la question “qu’est-ce tu veux dans la vie”, je suis incapable de répondre directement. Je pense à ce que ma femme, mes enfants ou ma famille répondraient à ma place ! C’est terrifiant de se l’avouer, mais la vérité est que je n’ai jamais su qui j’étais vraiment et venir à New York, loin de mes racines et de mes habitudes a exacerbé ce mal-être sous-jacent. Pour m’en sortir, pour arrêter de me sentir de plus en plus angoissé quand je rentre de France, je ne vois qu’une solution apprendre ou re-apprendre qui je suis, ce qui au final m’ouvrira les yeux sur la vie que je souhaite réellement.

 

Nicolas Serres Cousiné, le life coach des français à travers le monde

En savoir plus: Le site de Nicolas Serres Cousiné  www.monlifecoach.com,

 

Avertissement: Certains éléments de cette chronique ont été modifiés de manière à préserver l’anonymat du client de Nicolas.

Pensez aussi à découvrir nos autres éditions