Bonne nouvelle pour les amoureux de la langue de Molière et de son art, la "Troupe de Théâtre Francophone de Phnom Penh" remonte sur les planches, cette fois avec une pièce à la fois familiale et spectaculaire : "Les Trois Mousquetaires". Trois représentations sont prévues au "Grand Palais", à Phnom Penh, les 9, 10 et 11 décembre.
À quelques jours de la première représentation, rendez-vous était pris avec Julia Leyris qui a adapté et mis en scène l'oeuvre d'Alexandre Dumas. Celle-ci nous rejoignait, à l'heure convenue, armée non seulement de son enthousiasme (ce qui heureusement arrive à d'autres) mais aussi de trois sabres véritables (ce qui vous en conviendrez est plus rare) pour nous parler de la troupe, de la pièce et de ses projets.
Pourquoi ce choix des "Trois mousquetaires" ?
La troupe compte chaque année de plus en plus de comédiens, et il s'agit à chaque fois de trouver une pièce qui permette d'offrir un rôle à chacun. Je me suis alors souvenu d'avoir moi-même joué les Trois Mousquetaires en tant que comédienne, et y avoir pris beaucoup de plaisir. Ce choix offrait aussi l'avantage d'aborder une ?uvre moins grave et moins tragique que les deux précédentes, une demande formulée par les comédiens et qui à mon avis répondait également à une attente des spectateurs. De plus, cette pièce permettait de redonner une place de choix aux hommes de la troupe, après "8 Femmes" qui les avait évincés, et "Don Juan" qui les avait sacrifiés? Enfin, cela présentait l'intérêt d'un travail mêlant classicisme et modernité : le texte classique est revisité et modernisé, lui donnant un caractère intemporel, accentué par les costumes qui ne sont justement d'aucune époque définie.
Vous jouez cette pièce au "Grand Palais", qui n'est pas un théâtre mais un hôtel. Qu'est-ce qui a motivé ce choix ?
J'ai appris l'an dernier que le "Department of living arts", où nous avions pris l'habitude de jouer, serait probablement indisponible. Une personne des "Phnom Penh Players" (la troupe anglophone) m'a alors parlé du "Grand Palais ", où ils avaient présenté "Un tramway nommé désir". Très vite, il m'est apparu que l'endroit, bien que d'une capacité moindre (120 personnes), était tout simplement idéal pour la pièce que l'on s'apprêtait à monter. Ce grand hôtel à deux pas du marché central, qui est un ancien cinéma totalement rénové, au décor lui aussi intemporel, comporte une très grande salle avec un toit ouvrant, et surtout de nombreux balcons et escaliers : que rêver de mieux pour nos mousquetaires ?
Parlez-nous maintenant un peu de la troupe.
Cette troupe est née il y a maintenant six ans, et elle a déjà proposé depuis sa création une douzaine de pièces, même si ce n'est pas avec les mêmes comédiens ni avec les mêmes metteurs en scène qu'aux tous débuts. Aujourd'hui, elle compte une quinzaine de comédiens, qui en tous en commun d'être francophones et passionnés de théâtre, mais qui sont d'horizons variés et de personnalités très différentes. Y cohabitent ainsi hommes et femmes, bien entendu, mais aussi acteurs chevronnés et apprentis comédiens. Et cette année plus encore que les autres, ce sont plusieurs générations qui travaillent ensemble, puisque deux jeunes lycéens se sont greffés au projet. Ils apportent leur fraîcheur et leur spontanéité, et les moins jeunes apportent leur expérience, avec d'ailleurs beaucoup de bienveillance. Cette diversité est une grande richesse pour la troupe, et elle apporte une complicité et une énergie qui se ressentent sur scène.
Un projet aussi riche et ambitieux, de surcroit mené en deux mois, n'est-ce pas par certains aspects un peu compliqué, voir périlleux ?
Ce n'est en effet assurément pas le choix de la facilité ! 15 comédiens ont dû se partager 27 personnages, il a fallu que certains d'entre eux s'initient à l'escrime, et le temps pour préparer le spectacle était, c'est vrai, inhabituellement court. Mais le challenge était excitant, et cette difficulté, cette urgence font partie du travail de metteur en scène, que je mène depuis de nombreuses années et qui me passionne. J'ai de plus été portée par l'enthousiasme des comédiens, et aidée par des partenaires précieux : "Ambre" nous fournit par exemple tous les costumes de la pièce, et la fédération cambodgienne d'escrime a formé les comédiens devant combattre. Certains des membres de cette fédération viendront même sur scène, pour ajouter un peu au spectaculaire de la pièce.
Et après cette pièce, de nouveaux projets ?
Oui, bien sûr ! Je compte proposer à cette grande troupe de se transformer en deux plus petites, pour être en mesure de monter deux spectacles différents dans les prochains mois. À terme, je souhaiterais aussi donner à cette troupe une forme associative, permettant à chacun de s'investir et de se responsabiliser davantage tel ou tel aspect des projets à venir (décors, communication etc). Et pour ma part, je conduis un projet d'opéra avec une autre Production, je réfléchis à une collaboration avec l'IFC, et je coordonne avec les Phnom Penh Players l'organisation d'un festival des arts vivants qui se profile au mois de mai.
Julia ne manque ni d'énergie ni de projets. Mais jusqu'au 11 décembre, c'est à ses "Trois Mousquetaires" qu'elle se consacre pleinement. Pour ses comédiens bien sûr, et pour les associations (SIPAR et Taramana) au profit desquelles le spectacle est donné, mais aussi et surtout pour le plus grand plaisir des petits et grands spectateurs.
Propos recueillis par Philippe Bonamy, mercredi 30 novembre 2016
(www.lepetitjournal.com/cambodge)
Jeudi 9 et vendredi 10 décembre à 19h
Dimanche 11 décembre à 17h
Lieu : Grand Palais Hotel - 13 rue 130 (entre le boulevard Norodom et le Marché central)
Prix des places : 7$ en prévente - 8$ sur place - 5$ pour les moins de 12 ans
Points de vente : Librairie Carnets d'Asie - IFC - Chez Flo - Cloud - Kayser Vattanac - KWest