Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

BUCAREST CENTENAIRE - Des Roumains à l'esprit francisé

483px-Edward_Steichen_-_Brancusi483px-Edward_Steichen_-_Brancusi
Wikipedia / Edward Steichen
Écrit par Bucarest/Centenaire
Publié le 30 novembre 2018, mis à jour le 30 novembre 2018

Depuis les temps les plus anciens, les intellectuels des Principautés Roumaines ont fait preuve d'une prédilection toute particulière pour le modèle français, et cela dans différents domaines. C’est peut-être cette trace d’âme slave dont parlent les nostalgiques, amatrice invétérée des extrêmes qui a fortement renforcé l’attachement du peuple roumain pour l’Hexagone. L’amour, le respect et l’admiration ont fleurit surtout après 1918, dans un Petit Paris, capitale de la Roumanie réunie.

 

 



Dans un article publié dans la revue culturelle Dilema Veche, nous découvrons une étude du Journal d’Alice Voinescu, signée par le philosophe et écrivain Andrei Plesu. L’article met en évidence le style de vie d’une génération entière d’intellectuels, qu’ils soient hommes politiques ou artistes. Nous découvrons ainsi qu’Alice Voinescu n’était pas seulement la première femme d’origine roumaine à avoir obtenu, en 1913, le titre de Docteur en Philosophie, offert par la prestigieuse Université de la Sorbonne. Elle était aussi un de ces personnages cultivés, civilisés, que la Roumanie de l’entre-deux-guerres produisait, représentante d’un monde qui avait la capacité de vivre l’érudition comme une affaire personnelle, comme une matière première pour les âpres questions de la vie.

 

Nous assistons à la parade gracieuse d’une véritable école de filles de la noblesse, éduquées dans l’esprit de l’universel et du cosmopolitisme. Le même Plesu parle d’un monde de « dames biens », maîtrisant deux, parfois trois langues […], toutes plus amusantes, romantiques et tendres les unes que les autres. Rappelons-nous ainsi des 3 grâces roumaines - Elena Văcărescu, Anna de Noailles et Marta Bibescu. C’était une triade culte, particulièrement belle, riche et caractérisée par une présence d’esprit inégalable, ce qui nous pousse à donner raison au lord Christopher Thomson: "Toutes ces qualités pour un seul être est un péché impardonnable." En d’autres mots, autour de ces femmes, gravitaient le monde diplomatique et celui de la littérature. Au pôle opposé, l’actrice célèbre Elvira Popescu, qui devenait presque omniprésente sur les scènes des théâtres parisiens, et plus tard, sur tous les grands écrans.

 

Si on jette un regard d’ensemble sur les manifestations artistiques à caractère franco-roumain de l’époque, on découvre que Paris a attiré, tel un aimant, les représentants de l’avant-garde. Les poèmes dadaïstes de Tristan Tzara étaient suivis de près par les peintures de son ami, Marcel Iancu. Quant au surréalisme chanté frénétiquement par tous les poètes français tels André Breton et Louis Aragon pour ne citer que ses chefs de file, nous pouvons dire qu’il a marqué deux autres grands noms de la peinture roumaine. Ainsi, dans les tableaux de Victor Brauner et de Jules Perahim, une sorte d’originalité exaltée se mêlait harmonieusement à la métaphysique et la mythologie.

 

Ce sont dans ses ateliers parisiens, que le sculpteur Constantin Brancusi a trouvé son accomplissement, devenant plus prolifique que jamais, créant de nombreux groupes statuaires mobiles, dans lesquels il intégrait même des socles. Plus tard, son atelier se métamorphosa en un espace mythique, considéré comme une source inépuisable d’inspiration pour de multiples mondes possibles.

 

Les progrès techniques ne sont pas à négliger non plus, dont le fondement a été représenté, plusieurs fois, par le système d’enseignement français, auquel ont eu accès les grands inventeurs roumains. On sait déjà qu’à ses débuts, l’aviateur roumain, Henri Coanda, a été le disciple de Gustave Eiffel. Quant à ce dernier, on raconte que, pour la construction de la célèbre tour qui porte son nom, il aurait eu recours à une méthode brevetée par un Roumain - l’ingénieur Gheorghe Panculescu. Il faudrait également mentionner le nom du prince George-Valentin Bibescu, un aventurier tout à fait dans l’esprit des personnages d’Antoine de Saint-Exupéry; le journal Le Figaro l’aurait même surnommé l’étranger le plus français, le plus connu et le plus aimé de tous.

 

A vrai dire, il n’existe pas une vue d’ensemble pour comprendre toute cette génération de visionnaires et d’intellectuels roumains, amoureux du modèle français et de la vie bohème. Dans une élan de nostalgie, on pourrait simplement se rappeler des paroles du philosophe Emil Cioran : "Tous faisaient partie d’un monde mûr pour disparaître."

 



 Sources: Centrepompidou.fr, Universalis.fr

Andrei Pleșu, Jurnalul doamnei Alice Voinescu (article consulté sur le site Dilemaveche.ro)

 

Ana Maria Rosca 

 

 
 

AMPT-logo
PMB-logo

 

 

 

Flash infos