La première révolte de l'Inde contre les Anglais s’embrase à tous les niveaux de la société dès 1856. Les nobles et les riches se rebellent contre la "Doctrine de Préemption" de Lord Dalhousie, les cipayes se révoltent contre leurs supérieurs dans l’armée britannique et les paysans contre l’occupant …
Lorsque le dernier Nawab de Lucknow est évincé de son royaume d’Awadh en mai 1856 par la Doctrine de Dalhousie, il se réfugie à Calcutta où il vivra jusqu’à sa mort en 1887. Sa mère, la Reine Malika Kishwar, partira en juillet 1856 plaider leur cause auprès de la Reine Victoria sans succès (lire La Begum Malika d’Awadh : de Lucknow au Père Lachaise !).
Pendant ce temps, la Begum Hazrat Mahal est restée à Lucknow … mais qui est-elle ?
La Begum Hazrat Mahal, une servante devenue reine
On ne sait pas exactement où et quand elle est née … mais d’extraction très simple et très pauvre, elle est vendue par ses parents au harem royal du Nawab Wajid Ali Shah. De servante, elle devient petit à petit une favorite du Nawab, puis, quand elle met au monde un fils, Hazrat Mahal reçoit le titre royal de Begum. Jusque là, la vie de la Begum est celle d’une grande courtisane, éduquée, élégante vivant en strict purdah, respectant l’islam shiite et vivant pour servir son roi.
La Begum Hazrat Mahal défie les Anglais
Mais, en Juin 1857 seule à Lucknow avec les rebelles cipayes aux portes d’Awadh prêts à en découdre avec les Anglais, la Begum Hazrat Mahal prend les choses en main au nom de son fils héritier du trône. Elle organise, galvanise et unifie toutes les armées de ses puissants voisins quelle que soit leur foi sous son drapeau. Elle confie même à une Dalit, Uda Davi, (les Dalits sont la caste des intouchables) la responsabilité d’une armée (à suivre).
Forte de ses succès politiques et militaires, Hazrat Mahal et ses armées gagnent toutes leurs batailles !
Le 30 juin 1857, l’armée britannique bat en retraite ! Les survivants se réfugient dans la “résidence de Lucknow”, ville au sein de la ville.
Awadh est libéré et pendant 10 mois, la Begum dirige les affaires, elle est reconnue par tous dans son autorité comme dans sa gestion du royaume. Pendant ce temps, le siège de la résidence de Lucknow où plus de 3500 personnes attendent les renforts anglais est long, très long.
Mais, vaincue 10 mois plus tard, Hazrat s'exile
Hélas, les défections, les trahisons et l’arrivée tardive mais nombreuse de régiments anglais auront raison des forces de la Begum Hazrat Mahal.
En mai 1858, c’est la défaite qui pousse la Begum et ses fidèles à se cacher puis à fuir au Népal où elle mourra à Kathmandu en 1879.
Une héroïne peu célébrée
Il faut éclairer et illuminer à nos yeux d’aujourd’hui les exploits de la Begum d’hier.
A son époque Hazrat Mahal, Begum et femme musulmane, règne sur le plus grand territoire rebelle de toute l’Inde. De toutes les rébellions contre les Anglais, c’est elle et ses armées qui auront résisté le plus longtemps en écrasant l’esprit impérial pendant presque une année.
On dit même qu’elle a combattu à dos d’éléphant auprès de ses troupes et qu’elle n’a jamais cessé de se battre.
Quel exploit de réunir sous son commandement les musulmans, les hindous, les cipayes rebelles, les paysans et les dalits !
En 1858, le Times de Londres écrira:
“La Begum d’Awadh démontre plus de courage, de détermination et de sens stratégique que tous ses généraux réunis !”
Elle meurt en exil en ayant toujours tenu sa promesse de jamais Ô grand jamais retourner en Inde sous le Raj Britannique.
Son souvenir est hélas peu célébré probablement dû à ses origines simples … ou est-ce plus compliqué?
La vie de la Begum Hazrat Mahal a inspiré la romancière, Kénizé Mourad : Dans la ville d’or et d’argent
Ne manquez pas notre prochain article sur les héroïnes oubliées de l'Inde : Uda Devi, de Dalit à guerrière