Édition Inde

AOC indiennes : les saris Chedibutta

Les saris Chedibutta ont été inscrits au registre des appellations d’origine contrôlées (AOC) en 2023-2024. Ils sont tissés par environ 200 familles dans un petit village nommé Veeravanallur, situé dans le district de Tirunelveli, ainsi que par quelques familles des villages voisins.

sari chettibuda posesari chettibuda pose
Écrit par Liliam Boti Llanes
Publié le 26 mars 2025, mis à jour le 28 mars 2025

Où sont produits les saris Chedibutta ?

Le district de Tirunelveli, sixième plus grand district de l'État du Tamil Nadu, est un carrefour commercial et industriel depuis des siècles.

À première vue, Veeravanallur ne se distingue pas vraiment des autres villages de taille similaire au Tamil Nadu ou ailleurs en Inde, si ce n'est que toute la production de ces saris y est concentrée. Je l’imagine comme Phulera, la ville de la série Panchayat — unique, et en même temps, semblable à tant d’autres villages du pays.

 

Veeranalu
Image : https://prtraveller.blogspot.com


Les principales familles de tisserands appartiennent à la communauté Saurashtra, originaire du Gujarat, mais installée depuis longtemps dans les grandes villes du Tamil Nadu, notamment à Madurai. Leur migration vers le sud remonte à l’époque de l’empire Vijayanagara, qui a dominé la région de 1336 à 1646. C'est le roi Krishnadevaraya, qui a occupé le trône pendant 20 ans à partir de 1509, qui les a soutenus en les aidant à s'installer à Madurai et à obtenir le titre de Tisserands de la Famille Royale.

Dans le sud de l’Inde, cette communauté est connue sous le nom tamoul de Patnulkarar, qui signifie "marchands de fil de soie et tisserands de soie". Les premiers migrants ont en effet fondé des guildes de tissage et joué un rôle central dans le commerce des étoffes de soie et des diamants.

 

Comment sont fabriqués les saris faits à la main ?

Les saris Chedibutta appartiennent à cette catégorie de textiles produits sur des métiers à tisser manuels et regroupés sous le terme artisanaux. Cette appellation englobe l’art textile traditionnel de l’Inde et du Bangladesh.

Pour qu’un sari soit considéré comme artisanal, il doit être entièrement fabriqué à la main. Mais, à mon avis, ce qui unit véritablement tous ces saris, c’est que, sans soutien aux artisans et sans un regain d’intérêt des jeunes générations, il leur sera difficile de ne pas disparaitre.

Dans nombre de ces saris, les fils eux-mêmes sont fabriqués à la main. Autrefois, le processus de calibrage, qui renforce les fils et facilite un tissage plus rapide et plus efficace, était réalisé directement par les tisserands. Aujourd’hui, faute de main-d’œuvre qualifiée, le traitement des fils est souvent confié à des spécialistes.
 

sari chettibuda
Image : Cooptex


L’essentiel de la production de ces saris artisanaux repose sur des unités familiales maîtrisant ces techniques de tissage et de fabrication. Mais les temps changent, et avec eux, les traditions : autrefois, les saris étaient étroitement liés à leur région d’origine ; désormais, ils sont aussi à la merci de la mode.

Les plus réputés restent néanmoins attachés à la tradition, comme c’est le cas des saris Chedibutta. La question est de savoir : pour combien de temps encore ?

 

Comment les identifier ?

Les saris Chedibutta sont des saris de couleur unie, claire ou foncée, avec des motifs floraux. Ils possèdent une texture douce, sont légers et ont l’avantage de ne pas se froisser facilement. Leur fabrication repose sur un procédé complexe, exigeant l’expertise d’un tisserand capable de manipuler simultanément et avec précision plusieurs fils de coton.

Les tisserands utilisent uniquement des méthodes et outils traditionnels pour fabriquer ces saris. Chaque étape, de la préparation du fil de coton au tissage final, est réalisée à la main. Aucun métier à tisser mécanique n’intervient dans leur fabrication, et le motif Chedibutta n’est pas produit à l’aide de machines Jacquard ; il est incorporé au tissu lors du tissage.
 

sari chettibuda
Image : Cooptex


Un métier à tisser manuel fonctionne avec des pédales, ce qui limite la production par rapport aux métiers mécaniques. En pratique, la fabrication d’un sari mobilise au moins deux à trois personnes et nécessite entre trois et dix jours selon le modèle.

Le nom Chedibutta est dérivé de deux mots tamouls : chedi, qui signifie « plante », et butta, qui désigne un motif ou un dessin répété plusieurs fois. Ainsi, ces saris se distinguent par leurs motifs végétaux et floraux récurrents : généralement huit motifs répartis sur le corps du sari et cinq sur le pallu — la partie qui retombe sur l’épaule. Au total, un sari comprend treize motifs, chacun nécessitant environ deux heures de travail.

Les matières premières utilisées sont principalement le coton et la soie dite "artistique". Comme beaucoup de termes modernes, le mot art dans Art Silk peut prêter à confusion : il ne signifie ni "artistique", ni même "lié à l'art", mais "artificiel". Toute fibre synthétique qui ressemble à la soie (mais dont le coût de production est inférieur), est appelée "soie artistique" ou "art silk". Dans le cas des saris Chedibutta, le corps du sari est aujourd'hui tissé en rayonne ou en viscose. L’usage de la viscose rend ces saris plus faciles à entretenir que ceux en soie naturelle, tout en les rendant plus abordables.

 

Où les acheter et à quel prix ?

J’ai personnellement acheté le mien chez Cooptex pour 1.200 INR, soit environ 15 €. En général, ces saris ne sont pas vendus avec le tissu assorti pour confectionner la blouse.

Sujets du moment

Flash infos