Devenue centre d’activité économique et commerciale de Berlin, l’Alexanderplatz a pourtant vécu de nombreuses vies. Marché aux laines au XVIIIème siècle, elle a été le lieu de la plus grande manifestation jamais connue en Allemagne le 4 novembre 1989. Retour sur les évènements marquants d’un lieu central dans l’histoire allemande.
Les Berlinois la surnomment « l’Alex » tel un proche qu’ils connaissent depuis toujours : celui qu’on côtoie et dont on prend des nouvelles de temps en temps. Celui qui se fait remarquer par sa présence et apprécié par ses allures divertissantes. Celui à qui on reproche parfois d’être trop bruyant, voire envahissant. Tout dépend de la relation que les citoyens allemands entretiennent avec la fameuse place : certains l’admirent pour sa splendeur, d’autres la trouvent superficielle à plusieurs égards. Pourtant, l’Alexanderplatz n’a pas toujours été celle qu’elle est aujourd’hui. Défigurée par la guerre en avril 1945, elle accueille la plus grande manifestation jamais connue en Allemagne de l’Est le 4 novembre 1989. En 2022, alors marquée par l’empreinte du capitalisme, l’Alexanderplatz est devenue le symbole d’une histoire qui a vu naître une nouvelle génération.
Une porte d’entrée à son expansion
Son histoire débute au Moyen Âge. Berlin est alors une petite ville médiévale et l’Alexanderplatz n’existe pas encore. Au XIIème siècle est érigée sur son emplacement actuel la Georgentor (Porte Georges) qui devient rapidement l’entrée principale par laquelle la plupart des marchandises sont filtrées. A partir de là, Berlin grandit et son activité déborde au-delà de la porte où se tient en 1681 un marché aux bestiaux. On l'appelait à cette époque Ochsenmarkt : le marché aux bœufs.
Les faubourgs poussent alors de façon anarchique à ses abords et le milieu du XVIIIème siècle verra accueillir la plus importante foire annuelle aux laines d'Allemagne. A partir de là, tout s’accélère : les grandes usines et les installations militaires cèdent la place aux habitations et aux commerces. Théâtres, tramway, siège de la Police, palais de justice, halle centrale, grands magasins, sont les indices visibles de la volonté de l’empereur de l’époque, Frédéric-Guillaume III, de faire de la désormais baptisée « Alexanderplatz », en hommage à la venue du tsar russe Alexander Ier en 1805, un centre urbain important aux ambitions mondiales, vivant et influent.
Déconstruction et reconstruction de l’Alexanderplatz
La guerre n’a pas épargné l’Alex puisqu’en avril 1945, des bombardements défigurent le carrefour économique florissant. Sa reconstruction prendra du temps et il faudra attendre 1965 pour que soient construits la Berliner Ferneshturm et d’autres édifices socialistes propres à Berlin-Est. Fait intéressant, la place est aménagée afin d’être le centre de grandes manifestations, nécessitant de larges capacités d’accueil, comme le Festival mondial de la jeunesse et des étudiants (Weltjugendfestspiele) l', la célébration des 25 ans de la RDA en ou la cérémonie commémorant les 30 ans de la fin de la guerre en 1975.
Mais son évènement le plus marquant reste la grande manifestation du 4 novembre 1989 contre le régime socialiste. Rassemblant un million de personnes, elle a été une étape décisive de la révolution pacifique qui a conduit à la chute du mur de Berlin et à la réunification allemande quelques jours plus tard.
Centre des centres, elle sert désormais de repère pour les touristes, de lieu de correspondance pour les travailleurs fidèles à leur routine et de divertissement pour les fêtards réguliers. Chaque jour, l’ancien épicentre de Berlin-Est est traversé par plusieurs centaines de milliers de personnes sur terre et en sous-sol. Des voyageurs pressés qui ne la regardent que du coin de l’œil, ou bien des curieux affairés de visiter la Tour Télévision qui la borde. Pourtant, ce lieu porte en lui la marque visible du socialisme de l’ex-URSS et d’une histoire aux multiples rebondissements. Aujourd’hui, les nostalgiques de la République Démocratique allemande admiratifs de son architecture se confrontent à ceux qui ont un avis plus mitigé sur un urbanisme qu’il faudrait corriger à tout prix. Quoi qu’il advienne, les hommes politiques et les investisseurs actuels souhaitent la transformer en un paradis commercial et un quartier d'affaires harmonieux, dénotant avec un passé qu’on pourrait qualifier de moins "bling-bling" et de plus revendicateur.
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