Proche de Berlin, la région des lacs autour de Potsdam offre de nombreuses randonnées. Le récit de cette escapade autour du Sacrower See est une invitation à venir découvrir ces paysages somptueux.
Itinéraire
S-Bahn 7 : Direction Potsdam > Arrêt à Wannsee
Bus 316 : Direction Potsdam Glienicker Brücke > Arrêt Glienicker Lake
Bateau-taxi : Départ Park Glienicke > Arrivée Sacrow – Heilandskriche
De Berlin au lac Sacrower See
Le S-Bahn glisse entre les immeubles en direction de Potsdam. Le soleil dégage ses rayons des artères de la ville à mesure que le paysage défile. Le temps de parfaire l’itinéraire et l’on saute déjà sur le quai de la gare de Wannsee à la recherche du bus 316. 19 minutes d’attente ! On se dirige alors de l’autre côté de la rue où quelques tables disposées sur une placette attendent les voyageurs pour un café d’étape. Après plusieurs minutes de trajet, les portes s’ouvrent enfin à l’arrêt « Glienicker Lake », l’autocar s’éloigne dans un dernier grondement et disparaît de l’autre côté du pont.
Un chemin s’ouvre sur la droite le long de la rivière Havel pourtant invisible, encore caché par une bande forestière sur la gauche. Plus loin, une grande bâtisse de style italien se dévoile. La vigne vierge pourpre s’enroule sur les colonnades qui soutiennent un balcon depuis lequel un homme garde un œil sur le lac, l’autre sur son livre. Des sentiers s’enfuient vers la grève depuis la piste pour déboucher sur de petites plages entourées de phragmites. Les voiles des bateaux couvrent la nappe bleue de la Havel de taches blanches en mouvement. Le ballet des étraves soulève de légères franges d’écumes dorées et rythme le vol des cormorans en chasse. Après 20 minutes de marche, le ponton du bateau-taxi nous fait face, vide. Le prochain est dans plus d’une heure… Toujours vérifier les horaires ! Quelques pouces levés pour alpaguer les plaisanciers susceptibles de nous faire rallier l’autre rive n’y changeront rien, on est condamné à attendre.
La plage de la pointe nord
L’embarcation jaune criard est amarrée, on s’empresse de quitter le pont pour entamer le tour du Sacrower See. Une curry-wurst à la main, achetée à un Berlinois au milieu d’une serre sur Kladower strasse, et l’on s’engage dans la forêt par Weinmeisterweg pour rejoindre la rive. La rue, bordée de petites maisons de briques aux jardins soignés, baigne dans une lumière filtrée par les feuilles orangées. Le sentier tapissé de feuilles cuivrées chemine le long du lac, toujours séparé du promeneur par des baliveaux. Parfois, un morceau d’eau saphir se découpe entre les branches dégarnies par l’automne. À mesure que l’on avance vers la pointe nord du Sacrower See, les conifères l’emportent sur les chênes, étirant leurs ombres sous nos pas. La sente abandonne finalement les épineux pour replonger vers le lac, des racines forment un escalier naturel sur un sol devenu sablonneux.
La forêt meurt brusquement sur une plage de sable fin ouverte sur le lac dans toute sa longueur. Le soleil, en déclinant, jette ses feux sur le Sacrower See. Sa traînée embrase la surface et pare d’or les plumes des canards muets, eux aussi, face au spectacle. Seul le vent murmure à nos oreilles la rumeur du bruissement des feuilles. Le ciel et le lac se toisent dans un miroir encadré de frondaisons, deux femmes assises sur un tronc charrié par les eaux cherchent à les départager. Les 2,8 kilomètres du Sacrower See s’étirent du Nord au Sud, bordés par des roseaux d’abord puis par les troncs imposants des fagacées. Le temps de fermer les yeux quelques minutes, allongé sur le sable, et il est l’heure de se remettre en route, le dernier bateau n’attendra pas.
La piste du retour borde la rive de près et, parfois, des terrasses herbeuses s’avancent sur l’eau pour offrir un point de vue. Des hêtres massifs pèsent de toute leur ombre sur les rides de l’eau, seules les feuilles des cimes éclatent encore en feux rougeoyants sous les derniers assauts du tison solaire. Un dernier regard au lac avant de rejoindre les bords de la Havel dévoile un pêcheur en équilibre sur une barque, la fumée de sa cigarette fait apparaître la trajectoire des faisceaux de lumière qui lui parviennent encore.
Cap sur l'Heilandskirche au coucher du soleil
Pour rejoindre l’embarcadère, le sentier suit la Havel plongée dans la douceur orangée des fins de journée que les nuages n’obstruent pas. Le cercle de feu déploie ses rais flavescents sur les lacs et les rivières et vient caresser les dorures de la croix dressée sur le toit de l’Heilandskirche. L’église luthérienne bâtie en 1844 avance ses arcades italiennes sur la rivière pour offrir une halte de choix avant la traversée retour. Un voilier s’encadre entre deux colonnes doriques, la coque à l’ombre, le dernier espar encore dans l’or du ciel.
L’hélice d’étrave gronde pour arracher le bateau, que notre fascination pour ce spectacle semble retenir à la rive. Les contours de l’église se dessinent dans le contre-jour ambré, quand un foc bombé glisse devant la poupe du taxi flottant. La coque en acajou parfaitement lustrée mêle le bleu-gris de l’eau au ciel en fusion comme une invitation à revenir apprécier cette palette de couleurs que les saisons rendent inconstante.
Pour recevoir gratuitement notre newsletter du lundi au vendredi, inscrivez-vous !