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Vanessa Paloma ou l’universalité dans les gènes 

Vanessa Paloma Vanessa Paloma
Maurice Elbaz
Écrit par Houda Belabd
Publié le 8 décembre 2020, mis à jour le 18 février 2021

Descendante d’aïeux andalous et née en Géorgie, Vanessa Paloma chante, non sans émoi, son hymne à l’universalité, au vivre-ensemble intercommunautaire et les facettes méconnues de sa culture sépharade.

C’est en ladino que la judéo-marocaine d’origine andalouse Vanessa Paloma chante le passé glorieux maure. Oui, en ladino, ce mélange de latin et d’hébreu et de mots empruntés à d’autres idiomes méditerranéens. Ce témoin de plus de trois millénaires de vivre-ensemble interreligieux etintercommunautaire. Cet hymne à l’œcuménicité, à la mondialité, à l’accalmie et à l’altruisme. Ce dialecte qui, à l’instar de Vanessa, vient d’ici et d’ailleurs.

Et c’est en envolées lyriques que notre chanteuse à la voix suave et entrainante narre au passé simple, une histoire qui ne l’est pas. Un récit lacérée entre adieux et retrouvailles ; entre départs et retours ; entre belligérances et arbitrages ; entre oubli et memorabilia.

Une nova d’ici et d’ailleurs

Son ADN est lui-même un mélange de souvenirs d’ici et d’ailleurs. De parents américo-colombiens au sang écossais, d’ancêtres judéo-andalous ayant vécu pendant plusieurs années dans le Nord du Maroc, cette écrivaine et conférencière jongle avec plusieurs langues, comme d’autres jongleraient avec des quilles. Hébréophone, francophone, hispanophone et anglophone, Vanessa comprend également le catalan, le portugais et la darija, ce parler marocain qui lui aussi est un mélange d’amazigh, de français, d’arabe, d’espagnol et d’une once d’hébreu, entre autres.

D’ailleurs, elle le dit avec ses propres mots : «en chantant ou en écrivant, le métissage linguistique inhérent à nos cultures mélangées est toujours là pour rappeler à ceux qui le veulent bien que nous sommes nous-mêmes le fruit de plusieurs millénaires de migration, de voyage, d’apprentissage et de voisinage avec les autres migrants de la terre. L’amour est, faudrait-il le rappeler, plus fort que la guerre » nous apprend-elle.

Le chant et la musique doivent être perçus comme des écussons de paix, de tolérance et d’universalité

En 2014, elle initie le projet de sonothèque  baptisé « Khoya ». Ce mot qui rappelle «joya », ce mot qui signifie «joyau » en espagnol et «mon frère » en arabe marocain. Une coïncidence linguistique qui n’a pas manqué d’inspirer notre artiste.

Vanessa Paloma
Photo: Maurice Elbaz

Partir vers soi-même

En 25 ans de recherches dédiées à la musique médiévalesépharade et 10 ans à chanter au sein de Kinor David, une chorale judéo-andalouse qui s’est développé sous la baguette de Michel Abittan, Vanessa a appris à voir Gibraltar en tant que pont et non une frontière. 

«Cette passerelle historique devrait nous aider à mieux nous identifier culturellement. Au-delà des déchirures et des belligérances qui y ont eu lieu au travers d’un passé complexe, Gibraltar a aussi été une terre d’accueil, de transit et de voisinage avec tous les peuples de la terre », entrevoit notre chercheuse en musique des exodes, fille d’un anthropologue chevronné qui ne jurait que par les origines lointaines de l’humain ; la seule monnaie qu’il prenait pour argent comptant.

 

Un passé composé

Sur scène, derrière sa harpe, Vanessa gémi le drame de l’Inquisition et les maux du déracinement. «Il y a eu, certainement, des tragédies lors de ces sept siècles de cohabitation entre juifs, chrétiens et musulmans, mais cela ne sert à rien d’inciter à la haine ethnique, raciale ou religieuse sur fond de pages historiques jaunies par des siècles révolus», entraperçoit-elle avant de conclure : «Il ne faudrait pas oublier qu’au-delà de tout, l’Andalousie mauresque d’avant la reconquista a fait partie des rares terres au monde a avoir abrité l’âge d’or d’un islam éclairé. 

Les ténors et poètes arabo-andalous chantaient, côte à côte, les louanges des femmes, du vin et de l’amour

Car lors de cette époque, les hommes de sciences, de lettres et de religion de tous bords militaient pour le vivre-ensemble, comme nous pouvons le lire dans les écrits de Maïmonide.

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