La crise économique de 2007 semble avoir fait exploser les inégalités en Espagne. Alors que les classes les plus modestes peinent à joindre les deux bouts et que les classes moyennes s'appauvrissent, le nombre de "super-riches" aurait triplé depuis cette période. Qui sont ces nouveaux riches ? Où vivent-ils ?
Les contribuables les plus riches sont ceux qui sont soumis à l'impôt sur le patrimoine, pour des biens d'une valeur minimum de 700.000 euros. On désigne par le terme "super-riches" en Espagne les personnes qui déclarent un patrimoine imposable supérieur à 30 millions d'euros. Selon les dernières statistiques publiées par le fisc espagnol (sur les données de 2017), le nombre de contribuables concernés s'élève à 611 dans le pays. Cela représente trois fois plus de grands millionnaires qu'en 2006, juste avant la crise économique, lorsque l'on en comptait que 200. Les inégalités semblent se creuser et la tendance serait mondiale, comme le précise Bloomberg dans une récente publication économique sur les familles les plus riches au monde en 2019 : "À l'échelle mondiale, les 25 familles les plus fortunées possèdent 24% de richesses supplémentaires par rapport à l'année dernière".
Les mégas riches "poussés" à déclarer
Deux mesures fiscales peuvent expliquer la hausse brutale des patrimoines déclarés ces dernières années en Espagne : tout d'abord l'amnistie fiscale établie en 2012. Cette mesure d'urgence fut mise en place pour permettre aux fraudeurs de régulariser leur déclaration patrimoniale en leur pardonnant leurs "oublis". D'autre part, une seconde mesure est apparue l'année suivante pour faire pression sur les familles les plus riches afin qu'elles déclarent les biens et capitaux possédés à l'étranger, sous peine d'amendes. Cette mesure a permis de mettre en lumière 156 milliards d'euros de patrimoine espagnol caché à l'étranger.
Madrid concentre les grandes fortunes
Il convient de préciser que sur ces 611 super riches, 400 ne paient pas l'impôt sur le patrimoine, une contribution normalement obligatoire pour les personnes dont le montant des revenus patrimoniaux s'élève à plus de 700.000 euros. En effet, la Communauté de Madrid est une exception en la matière, puisqu'elle offre une bonification de 100% de la cotisation de l'impôt sur le patrimoine. Autrement dit, aucun contribuable de la région n'est soumis à cet impôt. Ceux qui possèdent un patrimoine imposable de 2 millions d'euros minimum devront juste formaliser une déclaration, bien qu'ils soient exonérés de l'impôt. Une fleur offerte par le gouvernement régional madrilène qui attire les deux tiers des très grandes fortunes d'Espagne. Selon les spécialistes, ce cadeau fiscal représente un manque à gagner de 955 millions d'euros pour les caisses de l'administration.
Les grosses fortunes espagnoles : les industriels
Les plus riches des plus riches d'Espagne, ceux qui peuvent se vanter de déclarer plus de 30 millions d'euros de patrimoine, ne représentent que 0,3% de l'ensemble des contribuables espagnols. À la tête de la liste Forbes des personnes les plus riches d'Espagne, on retrouve le magnat du textile Amancio Ortega. Le patron du groupe Inditex (Zara, Pull&Bear, Stradivarius,...) a perdu beaucoup d'argent depuis l'année dernière, ce qui ne l'empêche pas d'être scandaleusement loin devant les autres fortunes d'Espagne, avec un patrimoine évalué à plus de 50 milliards d'euros en 2019. On trouve également sa fille et seconde actionnaire du groupe, Sandra Ortega, parmi les dix plus grandes fortunes du pays avec ses quelques 5 milliards d'euros de patrimoine. Dans le top 5 des familles les plus fortunées se trouvent la famille de Rafael del Pino, fondateur de Ferrovial décédé en 2008 (7,6 milliards d'euros de patrimoine imposable), ou encore la famille de Juan Roig, fondateur de la chaine de supermarchés Mercadona (avec 7 milliards d'euros de patrimoine). Sol Daurella Comadrán, présidente de Coca Cola European Partners est la première femme du classement et la quatrième plus grosse fortune d'Espagne avec un patrimoine estimé à 6,3 milliards d'euros.